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jeudi 31 juillet 2008

Nicolas Gilbert : « Le Dix-huitième siècle », une satire oubliée N°258 - 1ere année

Ce poète vosgien né en 1750 dans une famille aisée, passa par les salons lorrains à la fin de la décennie 1760 où il fit ses premières pas de poète chez le comte de Lupcourt, Mandel et Darbès. Venu à Paris se mesurer aux grands esprit du temps, il essuiera bien des échecs mais bénéficiera d’une pension de Louis XVI.
Dans
Dix-huitième siècle (1775), dont des extraits sont proposés ci-dessous, Gilbert fustige les fausses gloires et les faux grands hommes. Cette critique des Encyclopédistes, de Voltaire et des Académies lui valut le mépris et les applaudissements.
Dans
Le Poète malheureux (1772), Nicolas Gilbert ne disait-il pas :
« Savez-vous quel trésor eût satisfait mon coeur ?
La gloire : mais la gloire est rebelle au malheur. »

Il meurt à vingt-neuf ans (1780) des suites d’une chute de cheval avant d’avoir pu donner toute la mesure de son talent que laissait deviner son Ode ou Adieux à la vie (1780) qu’Alfred de Vigny rappela dans Stello. Musset, Flaubert et Charles Nodier, qui publia toute son œuvre en 1826, l’admirent parmi les figures tutélaires du romantisme.
Cette satire sur le dix-huitième siècle n’est-elle pas transposable en 2008 ?

« C' est vainement, Fréron, qu' en tes sages écrits
dévouant nos cotins à de justes mépris,
tu prétens, du bon goût retarder la ruine ;
c' en est fait : sur ces bords, où le vice domine,
plus puissante, renaît l' hydre des sots rimeurs,
et la chûte des arts suit la perte des moeurs.
Par l' erreur et l' orgueil nommé philosophie,
un monstre, chaque jour, croît et se fortifie,
qui, d' honneurs usurpés, parmi nous revêtu,
étouffe les talens et détruit la vertu :
c' est, en nous dégradant, qu' il brigue nos louanges ;
précipité par lui du ciel dépeuplé d' anges,
,
Dieu n' est plus ; l' ame expire ; et roi des animaux,
l' homme voit ses sujets devenir ses égaux :
ce monstre toutefois n' a point un air farouche,
et le nom des vertus est toujours dans sa bouche.
[….]
Ces français si vantés, peux-tu les reconnaître ?
Jadis peuple héros, peuple femme en nos jours,
la vertu qu' ils avoient n' est plus qu' en leur discours.
Suis les pas de nos grands : énervés de molesse,
ils se trainent à peine, en leur vieille jeunesse,
courbés avant le temps, consumés de langueur,
enfans efféminés de pères sans vigueur ;
et cependant, nourris des leçons de nos sages,
vous les voyez encore, amoureux et volages,
chercher, la bourse en main, de beautés en beautés,
la mort qui les attend au sein des voluptés ;
de leurs biens, prodigués pour d' infâmes caprices,
enrichir nos Laïs dont ils gagent les vices,
tandis que l' honnête homme, à leur porte oublié,
n' en peut même obtenir une avare pitié :
destinés en naissant aux combats, aux alarmes,
formés dans un serrail au dur métier des armes ;
qu' ils promettent d' exploits tous ces héros futurs !
[….]
J' aurois pû te montrer nos duchesses fameuses,
tantôt d’un histrion amantes scandaleuses,
fières de ses soupirs obtenus à grand prix,
elles-même aux railleurs dénonçant leurs maris ;
tantôt, pour égayer leurs courses solitaires,
imitant noblement ces grâces mercénaires
qui, par couples nombreux, sur le déclin du jour,
vont aux lieux fréquentés colporter leur amour ;
contens d' un héritier, dans les jours de leur force,
les époux, très-amis, vivant dans le divorce ;
vainqueurs des préjugés, les pères bienfaisans
du serrail de leurs fils eunuques complaisans ;
quelques marquis, d' ailleurs doués de moeurs
austères,
polygames galans et vieux célibataires ;
plusieurs encor, vraiment philosophes parfaits,
en petite Gomorre érigeant leur palais.
Mais la corruption, à son comble portée,
dans le cercle des grands ne s' est point arrêtée ;
elle infecte l' empire, et les mêmes travers
règnent également dans tous les rangs divers.
Il faut voir ce marchand, philosophe en boutique,
qui déclarant trois fois sa ruine authentique,
trois fois s' est enrichi d' un heureux deshonneur,
trancher du financier, jouer le grand seigneur :
monsieur, pour ses amis, entretient une actrice ;
madame, des beaux arts bourgeoise protectrice,
en couvent d' esprits-forts transforme sa maison
et fait de son comptoir un bureau de raison.
Par-tout s' offre l' orgueil et le luxe et l' audace ;
Orgon, à prix d' argent, veut annoblir sa race :
devenu magistrat de mince roturier,
pour être un jour baron, il se fait usurier :
jadis, son clerc, Mondor envioit sont partage ;
tout-à-coup, des bureaux secouant l' esclavage,
il loge sa molesse en un riche palais
et derrière un char d' or promenant trois valets,
sous six chevaux pareils ébranle au loin la rue ;
mais sa fortune, ami, comment l' a-t-il accrue ?
Il a vendu sa femme, et ce couple abhorré,
enveloppé d’opprobre, est pourtant honoré.
[…]

Chacun veut de la vie embellir le passage ;
l' homme le plus heureux est aussi le plus sage ;
et depuis le vieillard qui touche à son tombeau,
jusqu' au jeune homme, à peine échappé du berceau,
à la ville, à la cour, au sein de l' opulence,
sous les affreux lambeaux de l' obscure indigence,
la débauche au teint pâle, aux regards effrontés,
enflamme tous les coeurs, vers le crime emportés :
c' est envain que fidèle à sa vertu première,
Louis instruit aux moeurs la monarchie entière ;
la monarchie entière est en proie aux Laïs,
idoles d' un moment, qui perdent leur pays ;
et la religion, mère désespérée,
par ses propres enfans sans cesse déchirée,
dans ses temples déserts pleurant leurs attentats,
le pardon sur la bouche, envain leur tend les bras ;
son culte est avili ; ses loix sont profanées :
dans un cercle brillant de nymphes fortunées
entens ce jeune abbé : sophiste-bel-esprit,
monsieur fait le procès au dieu qui le nourrit ;
[….]
Sans doute le respect des antiques modèles
eût au vrai ramené les muses infidelles :
eux seuls, de la nature imitateurs constans,
toujours lûs avec fruit, sont beaux dans tous lestems :
heureux:
qui, jeune encor, a senti leur mérite :
même, en les surpassant, il faut qu' on les imite :
mais les sages du jour ou d' heureux novateurs,
de leur goût corrompu partisans corrupteurs,
pour s' asseoir sur le Pinde au rang de nos ancêtres,
ne pouvant les atteindre, ont dégradé leurs maîtres.
Boileau, dit Marmontel, tourne assez bien un vers ;
ce chantre gazettier, Pindare des déserts,
La Harpe, enfant gâté de nos penseurs sublimes,
quelquefois, dans Rousseau, trouve de belles rimes.
Si l' on en croit Mercier, Racine a de l' esprit ;
mais Perraut, plus profond, Diderot nousl' apprit,
Perraut, tout plat qu' il est, pétille de génie :
il eût pû travailler à l' encyclopédie.
Périsse Bossuet ! Quoi ! Ton pinceau flatteur
souilla de son éloge un papier imposteur ?
étoit-il philosophe ? Aveugles que nous sommes !
Combien l' erreur publique a fait de faux grands hommes !
Enfin la raison luit ; leurs talens sont jugés ;
des affronts du sifflet les Cotins sont vengés :
Voltaire en soit loué ! Chacun sçait au Parnasse
que Malherbe est un sot et Quinaut un Horace :
dans un long commentaire il prouve longuement
que Corneille par fois pourroit plaire un moment,
et tous ces demi-dieux que l' Europe en délire
a, depuis cent hivers, l' indulgence de lire,
vont dans un juste oubli retomber désormais,
comme de vains auteurs qui ne pensent jamais.
[….]
Ainsi, de nos tyrans la ligue protectrice
d' une gloire précoce enfle un rimeur novice :
l' auteur le plus fécond, sans leur appui vanté,
travaille dans l' oubli pour la postérité ;
mais par eux, sans rien faire, un fat nous en impose ;
Turpin n' est que Turpin ; Arnaud est quelque chose.
ô combien d' écrivains, philosophes titrés,
sur le Pinde français parvenus illustrés,
ont, par cet art puissant, usurpé nos hommages !
L' encens de tout un peuple enfume leurs images :
eux-même avec candeur se disant immortels,
de leurs mains tour à tour se dressent des autels :
sous peine d' être un sot, nul plaisant téméraire
ne rit de nos amis et sur-tout de Voltaire.
On auroit beau montrer tous ses vers faits sans art,
d' une moitié de rime habillés au hazard,
seuls, et jettés par ligne exactement pareille,
de leur chûte uniforme importunant l' oreille,
ou, bouffis de grands mots qui se choquent entr' eux,
l' un sur l' autre appuyés, se traînant deux à deux ;
et sa prose frivole, en pointes aiguisée,
pour braver l' harmonie, incessamment brisée :
parfaite on croit sa prose, et parfaits ses accords ;
lui seul a de l' esprit, comme quarante en corps :
qui pourroit le nier ? Moi peut-être : j' avoue
que d' un rare savoir à bon droit on le loue ;
que ses chefs-d' oeuvres faux, trompeuses
nouveautés,
étonnent quelquefois par d' antiques beautés ;
que par ses défauts même il sait encor séduire :
talent qui peut absoudre un siècle qui l' admire ;
mais qu' on m' ose prôner des sophistes pesans,
apostats effrontés du goût et du bon sens :
Saint-Lambert, noble auteur dont la muse pédante
fait des vers fort vantés par Voltaire qu' il
vante ;
qui, prêchant les pervers, pour ennuyer les bons,
en quatre points mortels a rimé les saisons ;
et ce vain Beaumarchais qui trois fois avec gloire
mit le mémoire en drame et le drame en mémoire ;
et ce lourd Diderot, docteur en stile dur,
qui passe pour sublime, à force d' être obscur ;
et ce froid d' Alembert, chancelier du Parnasse,
qui se croit un grand homme et fit une préface ;
et tant d' autres encor dont le public épris,
connoit beaucoup les noms et fort peu les écrits ;
alors, certes alors ma colère s' allume,
et la vérité court se placer sous ma plume.
Ah ! Du moins par pitié s' ils cessoient d' imprimer,
dans le secret, contens de proser, de rimer ;
mais de l' humanité maudits missionnaires,
pour leurs tristes lecteurs ces prêcheurs n' en ont
guères :
La Harpe mille fois jura sur Pharamon
de bien nous ennuyer, pour se faire un beau nom ;
Thomas est en travail d' un gros poëme épique ;
Marmontel enjolive un roman poétique
et même Durosoy, fameux par des chansons,
met l' histoire de France en opéras-bouffons :
tout compose ; et déjà de tant d' auteurs manoeuvres
aucun n' est riche assez, pour acheter ses oeuvres.
Pour moi qui démasquant nos sages dangereux,
peignis de leurs erreurs les effets désastreux ;
l' athéisme en crédit ; la licence honorée
et le lévite enfin brisant l' arche sacrée ;
qui retraçai des arts les malheurs éclatans,
les ligues, le pouvoir des novateurs du temps
et leur fureur d' écrire et leur honteuse gloire
et de mon siècle entier la déplorable histoire,
j' ai vû les maux, promis à ma sincérité
et devant craindre tout, j' ai dit la vérité. »

©Jean Vinatier 2008

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Source :

Nicolas Gilbert : Le Dix-Huitième Siècle, satire à M. Fréron Amsterdam, 1775

mercredi 30 juillet 2008

Mathurin Régnier: « Pères des siècles vieux… » N°257 - 1ere année

Mathurin Régnier (1573-1613) était plus connu, à l’époque, pour la qualité de ses poèmes pornographiques (Délices satiriques) très appréciés dans la France de la fin du XVIe siècle que le pouvoir royal ne censurait pas.
Vénérant Marot, Ronsard, (et bien sûr Montaigne son maître) Mathurin Régnier mettra beaucoup de talent à ennoblir les Satyres, à travers ses thémes fétiches, la folie humaine, l’incohérence de la raison, le hasard de nos destinées, les vices et les ridicules de son temps; ainsi dans l’extrait de la
Satyre V proposée ci-dessous.

« Pères des siècles vieux, exemples de la vie,
Dignes d’être admirés d’une honorable envie,
(Si quelque beau désir vivait encor en nous)
Nous voyant de là-haut, pères qu’en dites-vous?
Jadis, de votre temps, la vertu simple et pure.
Sans fard, sans fiction, imitait sa nature,
Austère en ses façons, sévère en ses propos,
Quid dans un labeur juste égayait son repos;
D’hommes vous faisant dieux, vous paissait d’ambroisie
Et donnait place au ciel à votre fantaisie.
La lampe de son front partout vous éclairait,
Et de toutes frayeurs vos esprits assuraient;
Et, sans penser aux biens où le vulgaire pense,
Elle était votre prix et votre récompense;
Où la nôtre aujourd’hui, qu’on révère ici-bas,
Va la nuit dans le bal et danse les cinq pas,
Se parfume, se frise, et des façons nouvelles
Veut avoir par le fard du nom entre les belles;
Fait crever les courtaux en chassant aux fôrets;
Court le faquin, la bague, escrime des fleurets,
Monte un cheval de bois, fait dessus des promenades,
Talonne le genet et le dresse aux passades,
Chante des airs nouveaux, invente des ballets,
Sait écrire et proter les vers et les poulets;
A l’œil toujours au guet pour des tours de souplesse,
Glose sur les habits et sur la gentillesse,
Se plaît à l’entretien, commente les bons mots,
Et met à mêzme prix les sages et les sots.
Et ce qui plus encor m’epoisonne de rage,
Est quand un charlatan relève son langage,
Et, de coquin faisant le Prince revêtu,
Bâtit un Paraymphe à sa belle vertu,
Et qu’il n’est crocheteur ni courtaut de boutique
Qui n’estime à vertu l’art où sa main s’applique,
Et qui, paraphrasant sa gloire et son renom,
Entre les vertueux ne veuille avoir du nom. »

©Jean Vinatier 2008

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Source :


In Les satyres et autres œuvres du sieur Régnier, augmentées de diverses pièces, Ed. L.Billaine, Rouen, Paris, 1667, pp. 33/34.

Lexique :

Courtau : cheval auquel on a coupé la queue et les oreilles
Faquin : mannequin que l’on frappe avec sa lance
Bague : anneau suspendu où le cavalier doit passer sa lance.
Paranymphe : en Grèce antique, discours en faveur du candidat prononcé dans les facultés de médecine et de théologie.

Cher (e)s Internautes N°256 - 1ere année

Pendant une partie de cette période estivale, je vais privilégier les poèmes et les extraits de textes dont certains ne seront pas totalement détâchés de l’actualité.
Je reprendrai le rythme habituel après le pont du 15 août.
Bonnes vacances.

Jean Vinatier

mardi 29 juillet 2008

Alfred de Musset : Tristesse (1840) N°255 - 1ere année

« J’ai perdu ma force et ma vie,
Et mes amis et ma gaieté;
J’ai perdu jusqu’à la fierté
Qui faisait croire à mon génie.

Quand j’ai connu la Vérité,
J’ai cru que c’était une amie;
Quand je l’ai comprise et sentie,
J’en étais déjà dégouté.

Et pourtant elle est éternelle,
Et ceux qui se sont passés d’elle
Ici-bas ont tout ignoré.

Dieu parle, il faut qu’on lui réponde.
Le seul bien qui me reste au monde
Est d’avoir quelquefois pleuré. »


©Jean Vinatier 2008

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Source :

In Poésies complètes, Paris : Charpentier, 1840 & 1850

vendredi 25 juillet 2008

Vincent Voiture : « L’année est bonne » N°254 - 1ere année

Le poète Vincent Voiture (1597-1648) enchanta pendant vingt-deux ans (1625-1647) l’hôtel de Rambouillet, premier salon littéraire français tenu par Catherine de Vivonne marquise de Rambouillet où nobles et roturiers se cotoyaient.
Rimailleur et prosateur de talent, Voiture n’en fut pas moins habile avec les puissants. D’abord du côté de Gaston d’Orléans, frère de Louis XIII, il se rapprocha habilement, après la Journée des dupes, du cardinal de Richelieu qui le fit devenir académicien dés 1635. Il jouit également de la faveur de la Reine, Anne d’Autriche et de Claude de Mesmes comte d’Avaux (1595-1650), diplomate de premier ordre. La Cour lui confia des missions diplomatiques en Italie (1638) et en 1645 il eut la charge d’accompagner la nouvelle reine de Pologne à la frontière. Il mourut comblé de biens.
Cet homme spirituel et inventif plut autant à la Cour que dans les salons de Mesdames de Rambouillet, de Sablé, des Loges. Il savait divertir sans se prendre au sérieux. On le surnommait le « maître es arts de bagatelle » Mais, Vincent Voiture joua un rôle incontestable dans l’histoire de la poèsie française en développant un courant précieux bien éloigné de la gravité démonstrative, par exemple, d’un Malherbe et même de son rival, Isaac de Bensérade (1612-1691) avec lequel il débuta la querelle des Anciens et des Modernes. Ses Lettres ont été applaudies par les hommes illustres, La Fontaine, Boileau, La Bruyère, Pascal et Voltaire.


« Les demoiselles de ce temps
Ont depuis peu beaucoup d’amants;
On dit qu’il n’en manque à personne,
L’année est bonne.

Nous avons vu les ans passés
Que les galants étaient glacés;
Mais maintenant tout en foisonne,
L’année est bonne.

Le temps n’est pas bien loin encor
Qu’ils se vendaient au poids de l’or,
Et pour le présent on les donne,
L’année est bonne.

Le soleil de nous rapproché
Rend le monde plus échauffé;
L’amour règne, le sang bouillonne,
L’année est bonne. »


©Jean Vinatier 2008

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Sources :


Brigitte Level, présidente de la société des poètes français, in François Bluche (Sous la direction de ) :Dictionnaire du Grand Siècle, Paris, Fayard, 1990, pp. 1615-1616.

Œuvres de Voiture : lettres et poèsies, 2 vols.,Genève, Slatkine, 1967 (reprend l’édition de Paris en 1855)

jeudi 24 juillet 2008

USA les élections singulières IV :Obama et “le besoin d’Amérique” N°253 - 1ere année

Le candidat républicain John McCain broie du noir : le New York Times refuse un de ses articles, les journalistes traînent les pieds pour le suivre, les derniers sondages le placent nettement en arrière du candidat démocrate!
Pendant ce temps, Barack Obama entame une tournée européenne, juste après sa visite en Israël, en Allemagne aujourd’hui, en France, demain. Tous les sondages montrent que le candidat démocrate jouit d’une grande faveur auprès des populations qui apprécient sa jeunesse, ses racines africaines et, pour tout dire l’Amérique souriante. Wall Street, elle-même, se met dans le vert, le cours du pétrole recule. Bref, l’air deviendrait-il « obamien »?
Roger Cohen dans un article publié le 20 juillet dans l’
IHT reprend la remarque du social-démocrate allemand le comte Karl-Théodore Zu Guttenberg : « Obama ne doit pas donner l'impression que tout va changer. Il doit instaurer un climat de confiance, mais pas surcharger les visions. »¹
« Climat de confiance », telle est l’expression la plus juste au terme des deux mandats de Georges Bush qui menèrent le pays au bord du gouffre financier et militaire. Les élites atlantistes espèrent beaucoup de cette image promenée à travers le monde d’un jeune sénateur brillant et habile qui paraît croire au rêve. Le « j’ai un rêve » de Martin Luther King qui concernait une espérance purement américaine devient, maintenant, un slogan publicitaire global. A côté, John McCain fait pâle figure, petit, âgé, répétant à l’envi qu’Israël est menacé plus que jamais. Il ne réussit pas à se démarquer de la période bushienne. Barack Obama, sans faire du Clinton, donne toutes les assurances que l’on veut tout en restant flou : la conquête de l’opinion internationale pour réussie qu’elle soit n’a que peu d’impact sur l’électorat américain. Ce dernier veut d’abord avoir des assurances sur la pérennité de son modèle et de son style de vie.
La publication par la FED du
Beige Book sur les tendances et les perspectives du moment n’a rien d’encourageant. Elle craint un ralentissement économique généralisé dans tout le pays : activité, consommation, industrie, immobilier... tout chute, dégringole, vacille, s'enlise, s'embourbe. On oublie les millions d’Américains qui vivent grâce aux coupons alimentaires et ceux qui quittent ruinés leurs maisons et leurs appartements. On met de côté la fragilité de certaines entreprises mythiques tels General Motors et les réassureurs Fannie Mae et Freddie Mac. Le secrétaire d’état Paul Hanson annonce plan de sauvetage sur plan de sauvetage mais tout ceci reste bien fragile : rien ne s’est encore redressé !
Sur le plan extérieur, l’échec en Mésopotamie et l’impossible victoire en Afghanistan plombent le crédit militaire de l’Amérique. Le retour des combattants dans leur pays se fait dans des conditions lamentables et c’est l’électorat de base qui voit les mutilés errés à travers le pays presque livrés à eux-mêmes.
Il y a, bien sûr, tout le potentiel de l’homme américain qui peut très rapidement s’il est derrière un homme d’Etat qui le comprend retrousser les manches et repartir de plus belle. Cependant, les Etats-Unis de 2008 ne sont pas ceux de la Grande dépression. Le pays est à un tournant : si son hyperpuissance quoique admise ne la garantit plus de l’obéissance mondiale, les autres nations qui croissent (Inde, Chine, Russie, Brésil, péninsule arabique, Turquie…etc) ne sont pas en mesure de la contrebalancer et l’Union européenne, qui pourrait être une force stabilisante, a une peur bleue de revenir sur la scène du monde. On le voit bien, « le besoin d’Amérique » n’est pas une simple vue de l’esprit ni davantage une adhésion au modèle étatsunien mais, peut-être, la volonté de garder une hyperpuissance pendant une durée déterminée, le temps pour les pays précités de prendre le relais.
Philippe Grasset dans Defensa.org écrit qu’ « il est possible, peut-être même est-il probable que le jeune sénateur de l’Illinois va se sentir, un peu vite, devenir un héros et un homme d’Etat avant même d’être élu. » C’est là une observation intéressante. La distance qui existe entre l’homme en campagne électorale et l’image qui se fait autour de lui au risque, qui sait, de le transcender, aurait-elle des conséquences négatives ? L’enjeu pour ceux qui apportent leurs soutiens à Barack Obama et ceux qui font du business, le drapeau étoilé dans le dos est bel et bien de garder toute crédibilité au slogan « America first ». L’image idéalisée de Barack Obama doit susciter le « besoin d’Amérique » à l’extérieur (le Japon, la Chine, les monarchies du Golfe assurent le quotidien des Etats-Unis par leurs créances), à l’intérieur des Américains qui s’interrogent devant la progression des hispanophones lesquels exigent de plus en plus l’usage de leur idiome dans les actes administratifs. Le We are you ? de Samuel Huntington est toujours d’actualité ! La société américaine est jeune - l’acte d’indépendance est de 1776 – et on peut considérer la victoire du Nord contre le Sud en 1864 comme sa véritable naissance. Est-il, alors surprenant, que cette société tienne à parfaire son modèle ?Après tout les Etats-Unis ne reconnaissent l’égalité des droits Blancs/Noirs que depuis 1965 !
« Le besoin d’Amérique » pèse sur les épaules des deux compétiteurs. Pour l’heure Barack Obama surfe sur les vagues de la félicité quand McCain s‘embourbe. « Le besoin d’Amérique » entre également dans les réflexions politiques sur tous les continents parce que le mot « besoin » devrait avoir un sens de répartition et de partage. Nous sommes bien devant des élections singulières.

©Jean Vinatier 2008

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Sources :


http://www.guardian.co.uk/world/2008/jul/23/johnmccain.barackobama
1-http://www.iht.com/articles/2008/07/20/opinion/edcohen.php?

In Seriatim :

http://seriatim1.blogspot.com/2008/01/usa-les-lections-singulires.html
http://seriatim1.blogspot.com/2008/02/usa-les-lections-singulires-ii.html

mercredi 23 juillet 2008

L’Europe face à Radovan Karadzic N°252 - 1ere année

Le gouvernement serbe a livré Radovan Karadzic aux représentants du TPIY. Cette décision termine treize années de cavale pour l’ancien dirigeant ultra-nationaliste serbe, pourtant né Monténégrin. Il est le responsable, avec Ratko Mladic du massacre de Srebrenica qui fit les 11-16 juillet 1995 plus de 8 000 victimes bosniaques pour beaucoup musulmanes (hommes, femmes, enfants) sous les yeux impuissants des casques bleus néerlandais.
Si le verbe « livrer » choque, il correspond à la situation. Les dernières élections serbes ont donné le pouvoir au parti pro-européen au sein duquel se trouvent, notamment, des anciens partisans de Slobodan Milosevic. Belgrade ne pouvait plus se contenter de faire mine de chercher le coupable si elle ne voulait plus ralentir le processus d’adhésion à l’Union. En résumé, on livre l’homme dont tout le monde connaissait la cachette, l’identité et le visage de patriarche.
Radovan Karadzic est un criminel, auteur d’une tentative de purification ethnique en Bosnie-Herzégovine. Deux de ses anciens acolytes, les généraux Radislav Krstič et Zdravko Tolimir ont été arrêtés en 2001 et 2007, seul manque le général Ratko Mladic.
La Serbie ne veut plus avoir pour référence les années Milosevic et les rêves d’une grande Serbie. Le TPIY (tribunal pénal international pour la Yougoslavie) devra bien se pencher sur la pensée de cet ulta-nationaliste serbe. Il ne suffira pas de le juger comme criminel ou auteur de génocide, il faudra comprendre, également, les dérives terrifiantes dont l’ex-Yougoxlavie fut le terrain démoniaque : pourquoi Karadzic a-t-il pu mener presque à terme ce projet alors que l’Europe en était le témoin ?L’entourage de Karadzic rétorque qu’il n’a pas plus de sang sur les mains que le dirigeant bosniaque Naser Orič (condamné en 2008) qui massacra en janvier 1993 un bon nombre de Serbes autour de Srebrenica. Le général Morillon pense, également, non que Karadozic ne soit pas coupable mais que certains chefs bosniaques ne firent rien pour prévenir l’acte des Serbes et plus grave, qu’un événement tragique servirait leur cause.
L’Europe incapable d’assumer les implosions en Yougoslavie appela le Président Bill Clinton à son secours lequel mit un terme à la guerre, par les accords de Dayton conclus entre le 1er et le 21 novembre 1995 à la guerre en imposant une partition de la Bosnie-Herzégovine entre une Fédération de Bosnie-Herzégovine (croato-bosniaque) et la République serbe de Bosnie (Republika Srpska). Cette signature confirmait les précédents accords de Washington de mars 1994 qui inscrivaient l’idée de la fédération croato-bosniaque ou musulmane. Une force d’interposition internationale fut mise en place, elle s’appelle depuis 1996 la SFOR et un haut représentant civil, aujourd’hui, Miroslav Lajčák veille à l’application des articles diplomatiques signés. Mais l’équilibre reste fragile entre les différentes populations : les Bosniaques, musulmans, sont entre les Croates, catholiques, et les Serbes, orthodoxes.
L’arrestation de Karadzic a une symbolique très forte, davantage, peut-être que celle de Slobodan Milosevic (mort soudainement en prison) en raison du massacre de musulmans. Pour l’Union européenne, ce point doit être bien analysé au regard de l’Orient et de l’Union pour la Méditerranée. Hansan Kanbolat dans les colonnes du plus grand journal turc, Zaman,¹ écrit justement que Srebrenica est le point d’orgue d’une guerre de trois années (1992-1995) qui fit 312 000 victimes dont 200 000 bosniaques ou musulmans et, s’empresse de rappeler les nombreux exils des Turcs aux XIXe et XXe siècles forcés de quitter cette Bosnie pour s’installer en Anatolie. Ce point ne doit pas être négligé, il indique, par la même occasion, que l’entrée de la Turquie dans l’Union se reliera à sa mémoire. Evidemment Ankara ne rêve pas d’une « Reconquista », mais de reprendre racine d’une manière ou d’une autre dans les Balkans. Belgrade se libère d’un handicap et le passe, qui sait, à l’Union européenne via le TPIY.

©Jean Vinatier 2008

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Source :

Regard turc sur la question :
“Have you considered paying a visit to Srebrenica this summer?”1-
http://www.todayszaman.com/tz-web/yazarDetay.do?haberno=148269

mardi 22 juillet 2008

Badinguet II couronné N°251 - 1ere année

Les 9 abstentions et les votes du Président de l’Assemblée Bernard Accoyer (fait exceptionnel) et de Jack Lang permettent à Nicolas Sarkozy une victoire sur le poteau, à une voix.
François Hollande déclare que le Président de la République «
a perdu », en l’espèce c’est plutôt le PS qui a échoué puisqu’il n’a pas su maintenir le parti de Baylet dans les rangs et doit assumer la défection de Jack Lang et l’abstention de Michel Charasse pas mécontent de se défausser. Ce matin, pourtant, nulle procédure n’est entamée pour entraîner l’exclusion de Jack Lang du PS. Julien Dray estime que l’ancien ministre de la Culture devra tirer les conséquences de son geste et patati et patata…bref le parti socialiste est toujours dans le comas et l’inaudible. C’est Jack Lang, lui-même, qui donne le coup de grâce à ce parti en déclarant dans l’interview accordée au journal Libération qu’il restera un opposant déterminé à Nicolas Sarkozy.
L’UMP pavoise mais les fissures sont dans ses rangs. Les pressions, les hochets et les menaces ont fait plier quelques têtes, Hervé Mariton, Alain Lambert, Bernard Debré, c’était plus que nécessaire au vu du résultat du vote.
L’Elysée savoure le triomphe en espérant que les ventes du disque de Carla Bruni cartonnent, preuve, alors, de l’engouement des Français pour le nouveau régime. Opportunément, un sondage indiquait que 70% des Français soutenait la réforme institutionnelle, sondage pipo qui serait contredit en cas de référendum ? ou simple micro-trottoir lequel montrerait la méconnaissance de nos concitoyens ?
Entre mai 2007 et aujourd’hui, toutes les réformes avancées par Nicolas Sarkozy ont été adoptées. C’est le constat qu’il faut faire. Et le pouvoir ne ralentira pas le rythme, François Fillon, le dos réparé, l’a dit au JT de
TF1, c’est un rouleau-compresseur qui étêtera toute opposition, dégoûtera toute contestation, écœurera toute protestation. Cet établissement de la pensée unique ne plait pas aux Français. Ils ont élu ce Président et ils appartiennent à une société démocratique par conséquent respectueuse de l’échéancier électoral. Nicolas Sarkozy le sait, c’est pourquoi, il veut aller plus loin, toujours plus loin pour installer son pouvoir et in fine, peut-être, sa famille.
Certains écriront que la réforme constitutionnelle adoptée ressemble fort peu à celle proposée quelques mois plus tôt. C’est juste, mais elle entérine ce qui plaît particulièrement à Nicolas Sarkozy être partout et faire croire qu’il renoncerait à tel ou tel choix alors, qu’en réalité, il veillera à tout. On ne retrouve pas de pouvoir aussi absolu depuis Pétain et Badinguet. Guy Carcassonne, membre de la commission Balladur, calme le jeu en précisant que cette réforme « ne constitutionalise pas le sarkozisme », c’est là l’illusion des gens tout entier dans leur spécialité et qui ne voient pas le but ultime du chef de l’Etat. Nicolas Sarkozy a balayé d’un geste la suppression des départements, la réforme du mode de scrutin des régionales et ainsi de suite parce qu’il mesure les avantages inouïs qu’il en tirera pour son gouvernement. On rétorquera que la limitation de deux mandats successifs évite tout césarisme : en dix ans qu’est-ce qui nous garantit d’une remise en cause de cette mesure ? Rien.
Le tour de force réalisé est bien d’avoir gardé tout ce qui avantageait et d’ajouter, à travers un Parlement entre les mains d’un seul parti, des influences décisives. Le travail de communication a été de proposer un miroir aux alouettes aux Français et ceux-ci entre deux calculs au supermarché et à la station service haussent les épaules.
L’ironie a voulu que Nicolas Sarkozy soit contraint, à Dublin, d’admettre le « non » irlandais, d’éviter toute rencontre avec le peuple et de mentir impudemment en disant qu’il n’a jamais voulu les faire revoter. En tout cas, c’est à Dublin qu’il a du s’incliner devant des hommes alors qu’à la même heure à Versailles des parlementaires s’empressaient de lui plaire. Le règne de Badinguet II commence ou pour suivre Robert Batinder, celui de «
la monocratie ».


©Jean Vinatier 2008

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lundi 21 juillet 2008

Medvedev parle aux paneuropéens N°250 - 1ere année

Le Président russe, Medvedev a renouvelé devant le corps diplomatique le 15 juillet puis le lendemain en recevant le Président Giorgio Napolitano sa proposition « de convoquer un sommet paneuropéen qui permettrait de lancer l'élaboration d'un traité juridiquement contraignant sur la sécurité européenne (...). Tous les Etats de l'espace euro-atlantique pourraient y participer en qualité d'Etat souverain »¹
Ce propos reprend dans l’esprit le grand discours de Medvedev² du 5 juin, passé presque inaperçu pour le grand public. Les chancelleries allemande et française si elles n’apportent pas jusqu’à présent une réponse publique, elles savent bien que les relations avec la Russie ne peuvent plus demeurer avec l’esprit de « Guerre froide » qui culminait pendant les présidences Eltsine et Poutine (1992-2008).
L’atmosphère presque de guerre entre la Russie et la Géorgie, si elle ne suscite pas non plus de dépêches officielles, inquiète beaucoup les esprits. On peut dire que les tensions Téhéran-Washington sont vues avec moins de danger que l’idée d’une action militaire russe contre l’état géorgien. Avec l’Ukraine, la Géorgie constitue la ligne rouge à ne pas franchir : Moscou ne cesse pas de le dire. Si à Kiev l’idée d’une intégration au sein de l’OTAN est fortement impopulaire, à Tbilissi le gouvernement en place ne fait guère mystère de son empressement à y entrer. La Georgie³ étant à mi-chemin de l’Europe et de l’Asie, elle offre une place stratégique importante que les stratèges américains lorgnent depuis la fin de l’URSS. Mais l’équipe gouvernementale géorgienne est douteuse quasiment maffieuse. Son salut passerait-il, selon elle, par une protection otanienne ? Dans son esprit oui.
Le renouvellement de la proposition russe arrive à point nommé. L’administration Bush commence à faire ses bagages et les deux candidats, McCain et Obama, se livrent à des exercices de bascule pour à la fois rassembler leur parti respectif et grignoter sur les marges de l’adversaire. La dénonciation du contrat KC-454 a rendu furieuse les trois puissances européennes les plus concernées : Berlin, Londres, Paris. Aujourd’hui, elles forment un front commun tout à fait inédit et qui plombe les relations transatlantiques. La réponse de Washington est maladroite : elle dénonce la volonté de puissance de l’Union européenne ! Maladroite parce que ce contrat obtenu à la surprise générale pouvait très bien être vu lors de sa signature comme un remerciement officiel au soutien apporté par les trois puissances précitées à l’alliance transatlantique. Et c’est ainsi que cette rupture de contrat USAF/EADS est lue par certains élus américains, les uns s’en réjouissant, les autres s’en inquiétant.
Quelques-uns parlent d’affaiblissement de la politique américaine, c’est exagéré. Parlons plutôt de flottements et de tiraillements. C’est dans cette ambiance non ordinaire que les propos du président russe sont reçus dans l’Union européenne mais pense-t-on à produire un texte ou un discours autour de notre propre puissance. Tout se passe, jusqu’à présent, comme si l’Europe cherchait un « maître solide » au lieu d’être le sien. S’il est déjà malavisé de dépendre d’une puissance, il le serait davantage d’en dépendre de deux ! Le raisonnement de Medvedev si on le suit jusqu’au bout nous détacherait de l’OTAN pour entrer dans une autre structure où notre liberté souveraine ne serait guère meilleure. D’ailleurs, il utilise le mot « paneuropéen » dans la lignée du « panslavisme au XIXe siècle et il insiste sur l’adhésion particulière de chacun des Etats de l’Union. Or, nous devons former un bloc. Si l’Union européenne cherche par cette écoute à conduire une réflexion dont la conclusion aurait pour sujet majeur, notre défense commune, alors, nous serions sur une voie novatrice.
La Russie et les Etats-Unis sont des puissances monde à l’instar de la Chine, de la Turquie, de l’Inde. Aucune négociation ne peut être positive si nous ne connaissons pas notre rapport de force, si nous ne le faisons pas. L’intérêt de l’Europe est d’être elle-même et non au crochet de telle ou telle force. Le monde multipolaire imposerait, effectivement, que l’Union européenne soit, elle aussi une puissance monde.
Les discours des dirigeants russes interviennent dans le moment où les puissances européennes les plus impliquées dans l’alliance atlantique subissent des déconvenues graves ; à nos dirigeants de profiter de l’occasion pour saisir la main russe, parce qu’elle est une ouverture qui pose, à nouveau, la question de la viabilité de l’OTAN. Et là nous sommes grâce aux Russes et aux Américains face à nous-mêmes. D’où la nécessité pour l’Europe de se comporter en puissance dans les décennies suivantes.

©Jean Vinatier 2008

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Source :


1-
http://fr.rian.ru/world/20080716/114098917.html

In Seriatim :

2-
http://seriatim1.blogspot.com/2008/05/medvedevpoutine-une-dyarchie-russe.html
4-http://seriatim1.blogspot.com/2008/07/eadsusaf-et-le-kc-45-enjeu-conomique-ou_10.html

vendredi 18 juillet 2008

Albert II : la Belgique c’est moi et les Belges ! N°249 - 1ere année

« CHAMPIGNAC
Qu'on en finisse avec la Belgique, créature des Anglois contre la France ! Flandre indépendante, Bruxelles ville-Etat, Wallonie rattachée à la France, le Roi prend sa retraite à Monaco. Pas d'autre solution, vous verrez. »¹ L’écrit de ce blogueur sur Lemonde.fr pour le moins radical, rappelle, cependant, que la Belgique fut effectivement souhaitée par le Royaume-Uni en 1831 qui craignait comme la peste un drapeau français à Ostende et à Anvers. L’oncle de la future reine Victoria, Guillaume IV, agissait également, pour empêcher l’appel à un prince français, en l’occurrence un fils de Louis-Philippe Ier.
Le refus du Roi Albert II d’accepter la démission du Premier ministre Yves Leterme, libéral flamand, place-t-il le pays dans une impasse ? Si le souverain l’avait acceptée la situation ne serait pas pour autant meilleure. La Belgique présente cette caractéristique d’avoir deux camps radicalement ennemis, flamands et wallons, qui se reconnaissent dans la personne royale. Comment se sortir de cette situation si ce n’est de gérer la crise à venir en concoctant un gouvernement dont on saura la durée et ainsi de suite ?
La Belgique pourrait-elle disparaître ? L’Union européenne garantit les frontières de ses membres et par conséquent leur existence. Voilà donc nos deux ennemis condamnés à s’entendre. Qui s’inquiète du désordre belge ? La presse française n’y consacre pas de très gros titres et les médias belges abordent le problème sans penser à une fin d’histoire.
La nouvelle formule qui fonctionnerait actuellement serait la Belgique confédérale au lieu de fédérale. Avouons que l’on ne saisit pas très fortement la différence entre les deux mots. De doctes légistes et d’habiles rhéteurs ne manqueraient pas de nous éblouir par leurs savantes distinctions ; mais, en l’espèce, il n’y en a pas. En fait, quand on regarde de plus près qu’est-ce qui fait la Belgique : le Roi et les Belges.
Si l’identité flamande a une histoire singulièrement riche et importante, si Charles Quint, né à Gand, tout en étant l’Empereur n’oubliait pas qu’il était Flamand, on ne verrait pas très bien quelle serait la viabilité d’une Flandre indépendante. La Wallonie que certains imagineraient rattachée à la France, n’est le fait que d’une minorité. On a beau tout tourner et retourner les Flamands et les Wallons se reconnaissent dans la Belgique avec un seul interlocuteur le Roi d’ascendance germanique. Quant à vouloir faire de Bruxelles une ville-état, l’idée caresse peut-être certains hauts fonctionnaires de l’administration européenne voire même des gens comme Barroso, Bruxelles capitale de l’UE ! Mais les Bruxellois n’aimeraient certainement pas se retrouver entre les mains des seuls technocrates européens, ils tiennent à leur caractère.
Que sortira-t-il de cette crise ? Un élément positif, année après année, c’est l’idée belge qui grandit. Les deux camps étant dans l’impossibilité de se séparer tout en affirmant leurs différences et se battant becs et ongles pour cela, paradoxalement ils justifient la Belgique.

©Jean Vinatier 2008

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Source :


1-
http://www.lemonde.fr/web/article/reactions/0,1-0@2-3214,36-1074687,0.html

In Seriatim :

http://seriatim1.blogspot.com/2007/08/un-roi-embarrass-albert-ii-de-belgique_98.html
http://seriatim1.blogspot.com/2007/11/la-belgique-une-bombe-europenne.html

jeudi 17 juillet 2008

La complainte de Rutebeuf (v. 1230-v.1283) N°248 - 1ere année

Rutebeuf n’est pas un nom mais un surnom. Qui était-il ? Certains disent qu’il était jongleur, d’autres un clerc. Une chose est certaine, il savait le latin.
La complainte est tirée des
Poèmes de l’infortune, réédités par Gallimard en 1986.
Dans ce poème, il y a un peu de l’auteur de Seriatim….

« Un malheur ne vient jamais seul :
Tout cela devait m’arriver,
Et c’est arrivé.
Que sont mes amis devenus,
Que j’avais si près tenus
Et tant aimés ?
Je crois qu’ils sont trop clairsemés ;
Ils n’ont pas été assez fumés,
Aussi les voilà disparus.
De tels amis m’ont mal traité,
Car jamais, tant que Dieu me frappa
De maints côtés,
Je n’en vis un seul en ma maison.
Le vent, je crois, me les a enlevés,

L’amitié est morte.
Ce sont amis que vent emporte,
Le vent soufflait devant ma porte
Et il les emporta.
Car jamais aucun ne me réconforta
Ni ne m’a fait le moindre don.
J’en retiens
Que le peu qu’on a un ami le prend ;
Et il se repent trop tard
Celui qui a trop mis
De son bien pour gagner des amis,
Car il n’en trouve pas la moitié d’un
Pour lui porter secours ;
Maintenant je laisserai donc courir la Fortune
Je m’appliquerai à me porter secours à moi-même
Si j’en suis capable.



©Jean Vinatier 2008

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mercredi 16 juillet 2008

Ambiance générale N°247 - 1ere année

Aujourd’hui tout est vert du CAC40 à Wall Street ; deux jours plus tôt on craignait la faillite en chaîne de banques et des deux réassureurs américains Fannie Mae et Teddy Mac. Georges Bush déclarait (c’est une première) la situation grave : pensez-vous, les deux réassureurs pèsent pour 5 200 milliards de crédit soit le tiers du PIB du pays ! L’intention de les nationaliser en tout ou partie grandirait le déficit jusqu’à le porter à presque 9 000 milliards de dollars. Un chiffre vertigineux !
Le baril de pétrole plonge à 132 $ deux jours après avoir frôlé les 150$ parce que les stocks américains sont plus élevés que prévus. Et demain tout remonte ? Ambiance.
Dans ce mouvement de yo-yo, l’apaisement n’est pas de mise. Aucun économiste, aucun analyste n’osent dire quoi que ce soit. Qui les écoute ? Le secrétaire d’état au Trésor, Hanson, avoue, entre les lèvres que son pays est en récession, nul ne réagit : qui sait, demain, la même personne affirmera l’exact contraire !
En France, Bernard Tapie saute de joie en apprenant la sentence du tribunal qui lui accorde ainsi qu’à ses créanciers la somme de 400 millions d’euros (intérêts inclus) pour les dédommager du manque à gagner dans la cession d’Adidas. Le Crédit Lyonnais (en 2008 LCL) paiera-t-il ? Et non, c’est le CDR c’est-à-dire l’Etat et par conséquent les contribuables qui acquitteront les fautes du Lyonnais !
Au milieu de l’incertain, il y a au moins un bonhomme qui ne doute de rien et pour cela qui carbure au Red Bull hyper-concentré, c’est Nicolas Sarkozy ! Les 13 et 14 juillet ont été une sublime cerise : toute la mise en scène a été réussie, pas un faux-pas : les quarante chefs d’Etat et de gouvernement se sont empressés de signer les articles fondateurs de l’Union pour la Méditerranée sous la grande verrière du Grand Palais, récemment libérée des tôles d’acier de l’Américain Richard Serra placées dorénavant dans le jardin des Tuileries. Le lendemain, le défilé militaire illusionna tout le monde et surtout les Michu. Tandis que les protestataires étaient embarqués au commissariat, la promotion de Saint-Cyr, « Lieutenant Antoine Dejean de la Bâtie », nom d’un officier tué lors de l’attentat du Drakkar en 1983 présentait ses armes devant Bachar Al-Assad dont le père ainsi que l’Imam Khomeyni sont toujours considérés, malgré le maladroit démenti de l’Elysée, comme les auteurs principaux de cet attentat : ambiance !
Le soir le feu d’artifice et le concert du Champs de Mars d’une puissance sonore inégalée abrutissaient les spectateurs et concluaient les festivités estivales. N’oublions pas, entre temps, la garden-party qui vit, une fois encore, Ingrid Betancourt, en vedette américaine avant que Jean Sarkozy ne vienne capter les attentions courtisanes.
Pouvons-nous souffler ? Que nenni, le Président Sarkozy lâche tout ce qu’il peut pour que le congrès réuni à Versailles entérine le 21 juillet les réformes institutionnelles. Les marchandages à la limite du marchand de tapis se faisant presque en public, les Français auront-ils une bonne opinion si elles sont votées et seront-ils rassurés dans les cas contraire ?
Rien n’est moins sûr quand on voit le succès de la vidéo fait par des élus UMP (Lambert, Carrez ) se moquer ouvertement du déficit budgétaire et du ministre Woerth : ambiance toujours !
Tout se déroule sur bruit de guerre entre la Perse et les Etats-Unis via Israël. Mais, y croit-on encore ? Les Perses ont bien lancé des missiles les 9 et 10 juillet sans susciter plus de réprobation que d’habitude : Washington confirme bien l’ouverture prochaine d’un bureau à Téhéran : ambiance !
En Chine, le PC a décrété l’air pur pendant les olympiades et renforcé la répression contre des dissidents autant Tibétains que Chinois ou Ouighours. Ah, détail, ici et là on signale des traces d’amiante sur des sites olympiques : est-ce important ? Oui, non, ambiance !
Sont passés inaperçus les vols russes dans le ciel géorgien, le veto sino-russe, en accord avec les dirigeants de l’OUA, contre toute sanction envers Robert Mugabe. Et pour faire bonne figure, Pékin défend le Président soudanais, Omar el-Bechir, menacé par la Cour Pénale Internationale. Washington qui ne reconnaît pas la CPI apporte son soutien contre ce dirigeant : ambiance !!!
La Belgique peut disparaître : ça intéresse quelqu’un ?
Prenez tout de n’importe quel côté, rien ne tient, rien n’a de sens : ambiance

©Jean Vinatier 2008

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vendredi 11 juillet 2008

Pont du 14 juillet N°246 - 1ere année

Prochain article en ligne le mardi 15 ou mercredi 16 juillet 2008

Bon pont du 14 juillet.

Nicolas-Germain Léonard : « Au bois de Romainville » N°245 - 1ere année

« Un seul être vous manque et tout est dépeuplé » Lamartine ? Et non, il s’agit d’un extrait de l’œuvre poétique de Nicolas-Germain Léonard (1744-1793) né à La Guadeloupe.
Envoyé très tôt en France, il ne tarda pas à s’y faire distinguer par l’Académie de Rouen avant de publier en 1766,
les Idylles morales. Sa La nouvelle Clémentine, roman publié en 1774 révèle l’influence exercée par Rousseau.
Poète mélancolique qui annonce par son style le romantisme dont Sainte-Beuve signala la qualité.
Secrétaire de légation auprès du prince-évêque de Liège (1773-1783), il retourna en Guadeloupe en 1784 dont il fit une narration élégante et récemment éditée par les éditions
Rumeur des Âges en 2007. De 1787 à 1791 il fut lieutenant de la sénéchaussée de Pointe-à-Pitre. Contraint de fuir son île en raison des premières révoltes d’esclaves, il regagna la France puis arriva à Romainville en octobre 1792. C’est pendant ce séjour triste qu’il composa le poème proposé à votre lecture ci-dessous.
Regroupant ses dernières forces, il voulut repartir à la Guadeloupe mais il décéda la veille de son embarquement à Nantes le 26 janvier 1793.Contemporain d’un autre grand poète né à l’île Bourbon (Réunion), Evariste Parny (1753-1814), se fréquentèrent-ils dans les salons parisiens à la fin du règne de Louis XV et au début de celui de Louis XVI?

« Au bois de Romainville

J’ai vu le monde et ses misères :
Je suis las de les parcourir.
C’est dans ces ombres tutélaires,
C’est ici que je veux mourir !

Je graverai sur quelque hêtre :
« Adieu fortune, adieu projets !
Adieu, rocher qui m’a vu naître,
Je renonce à vous pour jamais. »

Que je puisse cacher ma vie
Sous les feuilles d’un arbrisseau,
Comme le frêle vermisseau
Qu’enferme une tige fleurie !

Si l’enfant qui borde un bandeau
Voulait embellir mon asile,
Ô bocage de Romainville !
Couronne de fleurs ton berceau.

Et si, sans bruit et sans escorte,
L’amitié venait sur ses pas
Frapper doucement à ma porte,
Laisse-la voler dans mes bras.
Amours, Plaisirs, troupe céleste,
Ne pourrai-je vous attirer,
Et le dernier bien qui me reste
Est-il la douceur de pleurer ?

Mais, hélas ! le temps qui m’entraîne
Va tout changer autour de moi :
Déjà mon cœur que rien n’enchaîne
Ne sent que tristesse et qu’effroi !…

Ils viendront ces jours de ténèbres
Où la vieillesse aux doigts pesants,
Couvrira de voiles funèbresLes images de mon printemps.
Ce bois même, avec tous ses charmes,
Je dois peut-être l’oublier ;
Et le temps que j’ai beau prier
Me ravira jusqu’à mes larmes. »



©Jean Vinatier 2008

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Sources:


William Moseley Kerby, The Life, Diplomatic Career and Literary Activities of Nicolas Germain Léonard. Paris : Librairie ancienne Édouard Champion, 1925
Lettre sur son voyage aux Antilles, Edition Rumeur des Âges, La Rochelle, 2007
La nouvelle Clémentine ou Lettres d’Henriette de Berville, La Haye, Paris, 1774

jeudi 10 juillet 2008

EADS/USAF et le KC-45 : enjeu économique ou transatlantique? N°244 - 1ere année

A la surprise générale, EADS avait damé le pion à son concurrent Boeing en signant un accord historique, en 2007, pour l’attribution du programme de ravitailleur en vol KC-45 de l’USAF, aviation militaire américaine ; un marché prestigieux portant sur un peu plus de 35 milliards de dollars.
A l’époque le sénateur McCain s’était fait l’avocat de la société européenne au vu de la mauvaise réputation de Boeing sur fond de corruptions. Aujourd’hui le sénateur, candidat républicain, défend la solution inverse, Boeing serait donc redevenu une entreprise honorable.
La récente dénonciation du contrat signé entre l’USAF et le consortium européen EADS est passée pratiquement sous silence, pas de communiqués ni de l’Elysée, ni de la Chancellerie, ni d’aucune autre capitale continentale.
Seule la presse anglo-saxonne (pourquoi ?),
The Times, Financial Times, fait feu de tout bois contre la décision de Robert Gates, secrétaire d’Etat à la Défense de repartir à zéro. Ce dernier charge, maintenant, son sous-secrétaire d’état à la défense, John Young, de conduire le processus d’acquisition du KC-45.
Le ministre américain, Gates, reprend les arguments avancés par le GAO (cour des comptes) pour dénoncer les irrégularités commises lors de l’attribution de ce marché. Et ô surprise, il semblerait, effectivement, que l’USAF visiblement agacée par le laisser-aller de Boeing, ait voulu qu’EADS l’emporte. Les irrégularités constatées seraient donc les seules à aboutir à la dénonciation du contrat. C’est certainement exact en grande partie mais le ministre américain a-t-il pensé aux conséquences en Europe. L’honnêteté force à dire que non.
S’étonne-t-on, alors, que la presse anglaise économique peste autant contre ce revirement protectionniste ? Non, mais le fait-elle au nom de la perte d’emplois ? Non, puisque tout devait être monté sur le sol américain. Certes, le bénéfice retiré de ce contrat aurait permis à EADS de développer ses sites, voire d’en créer d’autres et d’accélérer la construction de l’A-380. Craint-t-elle que l’union américano-européenne ne puisse jamais être positive auprès de l’opinion publique ? Oui.
Effectivement, que reste-il de la coopération atlantique, si ce n’est le BMDE (réseau anti-missile américain) qui peine à trouver preneur : la Pologne, autrefois enthousiaste traîne les pieds et seule la Tchéquie accepte d’une recevoir un seul, entraînant de facto la colère russe.
Quel crédit, enfin, accordera-t-on à la signature d’un PDG américain si celle-ci se trouve contredite et biffée quelques mois après ?
Sur le plan politique américain, les candidats Obama et McCain enfourchent le cheval nationaliste (peuvent-ils faire autrement ?) et réclament une meilleure protection de la base industrielle et technologique du pays devant des auditoires conquis d’avance. Autant dire que la coopération des deux côtés de l’Atlantique ne possède que peu de chance de redémarrer avant l’année 2009.
Ceci étant dit, la présidence française profitera-t-elle de cette situation nouvelle pour exiger de Washington une négociation plus positive à la fois pour renforcer notre politique de défense commune européenne et obtenir pour les Européens des postes de commandement au sein de l’OTAN ? Rien ne doit être négligé pour créer un rapport de force favorable. Même si l’on sait que le résultat ne sera pas immense, Nicolas Sarkozy pourrait, s’il le voulait, prendre non seulement pour prétexte la dénonciation du contrat KC-45 mais aussi le cas du réseau anti-missile américain en navigation libre en Europe pour monter au créneau.
N’aurait-il pas, et de façon surprenante, l’appui des anglais et des plus enthousiastes pro-américains furieux de voir s’évanouir un contrat à la portée symbolique ? Il y a, peut-être là une opportunité.
Pour le moment, il est incroyable, comme l’écrit Philippe Grasset dans
De Defensa.org, de voir « les Européens amoureux du “rêve américain” [qui] accusent les Américains de trahir ce “rêve américain” » !

©Jean Vinatier 2008

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Sources :

http://business.timesonline.co.uk/tol/business/industry_sectors/engineering/article4305504.ece

mercredi 9 juillet 2008

Social-sarko : un grand bond dans l’inconnu ? N°243 - 1ere année

Les députés entérinent la fin des 35 heures et celle des RTT. Des employés aux cadres (électorat en majorité pro-sarkozien), la réforme sociale présidentielle n’épargne personne exception faite des dirigeants des entreprises. Le slogan « Travaillez plus, pour gagner plus » se réalise donc pour moitié. Et la seconde me direz-vous, c’est pour quand ? C’est quand tout ira mieux. Les économistes prévoyant un retour de la croissance dés les années 2010/2011, tous les salariés pourraient-ils espérer reconquérir, d’ici deux ans, une partie de leur pouvoir d’achat grâce à une augmentation de la feuille de paie ? Oui mais…il y a un peu plus au nord dans le donjon BCE, le seigneur Trichet qui pourfend la vilaine inflation et qui envoie force messages aux Etats européens pour qu’ils n’encouragent pas une progression salariale.
Dure rentrée pour tous les vacanciers en septembre : risquera-t-on une explosion sociale ? Les syndicats toujours en ordre dispersé, toujours affaiblis, n’ont pas voulu opérer leur aggiormento au moment de l’affaire Gautier-Savagnac. Ils sont décrédibilisés dans l’opinion publique et taillés en croupière par le duo Sarkozy-Soubie.
Les rapports sociaux ne seront plus régulés branche par branche, mais entreprise par entreprise. Si dans les grandes sociétés la représentation syndicale joue et jouera temporairement malgré tout, il n’en sera pas de même dans les PME-PMI qui n’excéderont pas cinquante employés. Ils mettront face à face chaque entreprise et chaque salarié, c’est-à-dire une personne morale et une personne physique.
La gauche n’a été d’aucun contre-poids sur cette contre-révolution sociale. Même Martine Aubry a gardé presque le silence : un comble pour l’auteure des 35 heures !
La réforme sarkozienne est globale. Tout le monde est concerné. Le hic est que de plus en plus de salariés ne parviennent plus à assurer à leur famille une vie décente avec un seul salaire, un second voir un troisième s’imposent. La France connaît donc le cas du travailleur pauvre ou précaire conduit à accumuler de plus en plus d’heures de labeur.
La Commission européenne venant de porter de 48 heures à 65 heures la durée maximale hebdomadaire du travail, c’est toute l’Europe en générale et la France en particulier qui reçoit en pleine face cette mesure. Le discours officiel français durcit considérablement sa politique envers les chômeurs et, demain, les bénéficiaires des minima sociaux. Le thème principal est le suivant « faites n’importe quel travail mais travaillez ». Fort bien, mais le salaire du travail permet-il de vivre ? C’est le fameux «
enrichissez-vous » de Guizot sauf que la richesse se fera attendre. Robert Castel le résume d’un titre dans Le Monde, « Travailler plus, pour gagner quoi ? »¹.
Si les Anglais et les Américains supportent docilement ces conditions de vie, les Français ne se cabreront-ils pas brutalement ou bien protesteront-ils dans une multitude de conflits sociaux ?C’est une possibilité que le gouvernement intègre parfaitement en privilégiant la généralisation des étincelles sociales qui resteraient invisibles pour les Français. Ces derniers fixés devant la télévision hausseront plus facilement les épaules en écoutant le présentateur du JT signaler telle et telle grève au lieu d’apprendre la paralysie du pays par des syndicats puissants.
La grève a été déconsidérée depuis mai 2007, le ministre André Santini ne la trouve-t-il pas « surannée » ? Le message subliminal adressé aux citoyens n’est-il pas : subissez, vous ne pouvez rien faire d’autre ! Que pouvez-vous contre la réalité du monde, de la mondialisation ? C’est donc une chape de plomb qui tombe sur chacun d’entre nous. Or, jusqu’à présent les avancées sociales se font faites avec des syndicats et des partis politiques puissants.Le sentiment d’une régression sociale est profond. Ce sentiment grandit encore depuis que, fin 2007, le travail de nuit est autorisé aux adolescents dés l’âge de 15 ans. Comme si le volet social ne suffisait pas, la multiplication des fichages policiers des citoyens augmente tel « EDVIGE ».
Acquis sociaux et acquis citoyens sont attaqués de façon quasi simultanée : le moment est donc grave. Plus rien n’est intangible, tout est destructible sans que les contre-feux soient puissants ou actifs.
La France aime l’idéal, c’est ainsi qu’elle est née. Les Français tiennent à leur identité qui comprend un socle de libertés et d’égalité tant chez eux que dans la vie professionnelle. L’Etat sarkozien dispose de la bienveillance des chaînes privées et publiques, des amitiés des propriétaires de groupes médias et revendique une admiration béate pour le modèle britannique ou blairiste (qui se casse la figure) adhère, enfin, aux idées les plus libérales qui soient.
Les Français constatent-ils par eux-mêmes la fin des partis, des syndicats ? N’est-ce pas à eux d’imposer un nouveau modèle social ? Aujourd’hui, l’actuel gouvernement a gagné en effaçant d’un trait des décennies d’améliorations sociales sans écrire un projet sociétal harmonieux.
L’Elysée est face aux Français sans intermédiaires et réciproquement. C’est une page inédite dans notre histoire.

©Jean Vinatier 2008

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Source :

1-
http://www.lemonde.fr/opinions/article/2008/07/08/travailler-plus-pour-gagner-quoi-par-robert-castel_1067614_3232.html

mardi 8 juillet 2008

L’Australie propose l’union des Etats d’Asie-Pacifique N°242 - 1ere année

Le début du mois de juin a été riche en initiatives en Asie et en Océanie.
Une dépêche de l’agence israélienne francophone
, Guysen International News, indique que le Premier ministre australien, Kevin Rudd, s'est prononcé, au début du mois de juin 2008¹ pour la création d'une Union des Etats d'Asie-Pacifique sur le modèle de l'Union européenne d’ici 2020.
Lors de son voyage en Chine (4-7 juin) le ministre indien des Affaires étrangères, Pranab Mukherjee a déclaré devant les étudiants à l’université de Pékin, que son gouvernement était prêt à assurer la paix et la stabilité en Asie et « au-delà » (allusion à la Russie), en s’alliant avec la Chine pour créer une nouvelle architecture sécuritaire. Cette structure prendrait en compte les conditions prévalant en Asie, dans un cadre « ouvert et inclusif », suffisamment flexible pour s’accommoder de la grande diversité asiatique. Il ajoutait aussi « Nous devons être patients au sujet des frontières. La Chine et l’Inde devraient travailler ensemble sur les questions sécuritaires de la région. Nos deux pays ont une responsabilité commune et un intérêt commun à préserver nos frontières. Nous avons acquis l’expérience nécessaire pour maintenir la paix et la tranquillité à nos frontières. » Si la question des frontières est un sujet singulièrement sensible, par exemple au Cachemire, et dans le Sikkim, royaume annexé par l’Inde en 1975, d’autres thèmes retiennent l’attention de ces deux nouvelles nations comme la sécurisation des routes maritimes ou l’examen des intérêts communs entre la Chine, l’Inde et d’autres états eurasiatiques dont la Russie.
Union d’Etats d’un côté, axe sécuritaire de l’autre, nous avons deux expressions clefs qui montrent non seulement les ambitions des uns et des autres mais, surtout, la prise de conscience pour bâtir un environnement le moins influencé par des puissances extérieures.
Si on n’est guère surpris par les évolutions sino-indiennes, l’entrée en scène de l’Australie attire plus fortement le regard.
Cambera est la capitale d’un pays continent qui prend un peu plus la mesure de son potentiel économique. Fondatrice et présidente du Groupe de Cairns en 1986 qui regroupe 19 pays agro-exportateurs² pour contourner le protectionnisme de l’Union européenne et des Etats-Unis. Si l’Australie reste bien la « ferme du monde », son gouvernement a conscience des hauts potentiels en minerais (fer, d’uranium, de cadmium, de cobalt, de plomb) et de charbon dans son sous-sol : New Delhi et Pékin en manquent. La croissance économique ne faiblit pas depuis 16 ans et le taux de chômage reste d’une grande faiblesse.
Le point commun entre l’Australie et l’Asie n’est-il pas dans ce dynamisme économique et dans la recherche d’une reconnaissance géopolitique ? Cambera joue un rôle actif dans toutes les organisations régionales (p.e :APEC) qui mettent à une même table des pays d’Asie, d’Indonésie et d’Océanie. Chine et Inde, usent avec habileté de ces structures pour se jauger et le cas échéant concéder sans perdre la face.
Le Premier ministre Kevin Rudd, écrit, lit et parle en mandarin. Il vient d’ordonner le retrait de ses troupes de Mésopotamie. Tout cela le distingue de son prédécesseur, John Howard. Mais, pour avancer dans son projet d’Union Asie-Pacifique, l’Australie a besoin de l’alliance américaine et du soutien britannique - la Reine Elisabeth II est toujours sa souveraine -. C’est là encore un point commun avec la Chine et l’Inde qui toutes deux ne tiennent pas à se fâcher avec les Etats-Unis. En fait, il apparaît que l’alliance américaine doit servir leurs intérêts propres plutôt que permettre à Washington de faire la pluie et le beau temps. Ne serait-ce pas le calcul de Kevin Rudd : revendiquer l’appui de la Maison Blanche pour mieux asseoir son leadership en Asie ?Nous sommes, peut-être, en présence d’évolutions diplomatiques originales qui montrent, une fois encore, le formidable bouleversement du rapport de force mondial. L’autre carte entre les mains du Premier ministre australien est celle du Japon, 2e puissance mondiale ! Tokyo est totalement dans le camp américain mais l’empire du Soleil levant ne renonce pas à redevenir une force sur le continent asiatique. Peut-être qu’une alliance australo-japonaise aurait des effets ?
L’Union des Etats d’Asie-Pacifique a-t-elle des chances de voir le jour ou bien restera-t-elle une chimère ? A priori tant de différences de cultures de l’Asie jusqu’à l’Océanie forment des obstacles difficiles à surmonter. Mais, le défi proposé par Kevin Rudd, d’une part, est tellement dans l’air du temps et d’autre part, répond au souci d’indépendance de l’Asie que rien ne saurait être infaisable. La première tâche qui pourrait être menée à bien serait la sécurisation des voies maritimes via des accords de coopérations militaires.
Une autre puissance non-asiatique pourrait être intéressée stratégiquement: la France. Elle est présente en Polynésie (Pacifique) et dans l’Océan Indien. Sachant l’importance croissante que prendra cette partie du monde, pourquoi la France n’initierait-elle pas un dialogue constructif avec l’Australie ? Si Londres et Washington toussent, il n’est pas dit que Cambera n’entame pas des pourparlers. Etrangement, le
Livre Blanc de la Défense fait l’impasse sur le Pacifique et l’Océanie.
Kevin Rudd , par son projet d’Union des Etats d’Asie-Pacifique, rappelle la place qu’il tient voir occupée par l’Australie. Les kangourous, les koalas et Flipper le Dauphin ont popularisé ce pays continent ; maintenant ce sont les Australiens, eux-mêmes, qui veulent une reconnaissance³. On s’interrogeait lors du dernier référendum australien sur le choix fait de garder la Reine pour chef d’Etat ; aujourd’hui, on le comprend mieux et on suppose que d’ici vingt ans, l’Australie aura, sans doute, un Président.


©Jean Vinatier 2008

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Notes :

2-Australie, Afrique du Sud, Argentine, Brésil, Colombie, Costa Rica, Bolivie, Canada, Chili, Indonésie, Malaisie, Guatemala, Nouvelle-Zélande, Pakistan, Paraguay, Pérou, Philippines, Thaïlande, Uruguay.
3- L’Australie n’interpelle-t-elle pas aussi le quatuor du B.RI.C : Brésil, Russie, Inde, Chine ?

Sources :

1-Discours de Kein Rudd le 4 juin à Sydney :
http://www.pm.gov.au/media/Speech/2008/speech_0286.cfm
Discours de Kevin Rudd le 9 juin à l’université de Tokyo :
http://www.pm.gov.au/media/Speech/2008/speech_0294.cfm


a-
http://www.thaindian.com/newsportal/tag/pranab-mukherjee
b-Site : http://www.guysen.com/?nnid=189826
c-http://blog.mondediplo.net/2008-07-04-Vu-d-Australie

In Seriatim :
http://seriatim1.blogspot.com/2008/02/australie-kevin-rudd-vers-lasie.html

lundi 7 juillet 2008

Les jours heureux du Président Sarkozy N°241 - 1ere année

La fin de la détention d’Ingrid Betancourt et son arrivée à Paris est le rayon de soleil qui fait s’applaudir Nicolas Sarkozy. Sans revendiquer le rôle décisif de cette libération, il croit pouvoir se lâcher quelque peu. Samedi dernier devant les militants UMP réunis à la Mutualité, il ne résista pas à se moquer des grèves qui ne se remarquent pas ! Bien qu'il sache très bien pourquoi les journées de grèves décidées par les syndicats ne pouvaient pas donner toute leur puissance, il ne peut pas se retenir : il a gagné la bataille sociale ! Les Français ne partent-ils pas en vacances ? Est-il Pyrrhus qui prend les vessies pour des lanternes ?
La sortie de l’album de Carla Sarkozy le 11 juillet constitue un rendez-vous très important pour la suite du quinquennat. Si les Français l’achètent en très grand nombre, alors ils auront succombé au charme de la Première Dame ; son influence sera reconnue et sur le plan politique, l’Elysée en tirera toutes les conséquences. Nicolas Sarkozy croit à l’engouement national. Michel Drucker l’amplifiera au besoin, en recevant la « star ».
Fin juillet, le Président compte réunir les 3/5 des élus pour approuver la réforme des institutions. Ainsi les Français étant sur les plages, les syndicalistes ayant le bec cloué ainsi que tous les autres opposants : c’est le moment de plénitude.
Les nuages, pourtant, encombrent le ciel, national, européen et mondial. Mais, peu importe, comme la bourse, canard sans tête, la planète et la classe politique nationale s’enivrent. Rien ne tient plus mais tout le monde prétend le contraire. Pour l’heure Paris accélère les préparatifs festifs pour recevoir toute l’Europe et le monde méditerranéen le 13 juillet et le lendemain, le 14, pour applaudir une armée à l’humeur mauvaise.
Cerise sur le gâteau la remise de la Légion d’Honneur à Ingrid Betancourt. C’est Nicolas Sarkozy qui récupérera la gloire en épinglant sur la poitrine de la plus célèbre des Colombiennes une décoration qui n’est accordée que pour des faits illustres et remarquables, la séquestration à défaut de l’évasion en sera donc un.
Semaine surréaliste : la fête sarkozienne commence !

©Jean Vinatier 2008

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jeudi 3 juillet 2008

La Colombie libère sa compatriote Ingrid Betancourt N°240 - 1ere année

Un rayon de soleil sarkozien entre les orages : Ingrid Betancourt et une dizaine d’otages sur les 750 ont été libérés grâce à l’intervention conjointe de l’armée colombienne et de l’aide américaine.
Elle est apparue en pleine forme, pas du tout amaigrie, ni les traits tirés, et tout à la joie de retrouver ses enfants, sa famille. Au-delà de ces retrouvailles qui appartiennent à l’intime que peut-on écrire sur ce sujet. De toute évidence deux camps existaient, le premier était une alliance américano-colombienne favorable à la plus grande fermeté, le second une relation franco-vénézuélienne qui prônait la négociation. Au vu des événements d’hier soir, ce sont les partisans de la fermeté qui l’emportent. Mais la France n’a pas à rougir de ce qu’elle a tenté et ce même si elle ne comprenait que par un petit bout le fonctionnement des alliances et des rivalités dans l’aire géographique colombienne. Le Président Uribe assuré du soutien sans faille de toute la population contre les FARC et parce qu’il a des liens solides et incontournables avec les services américains (CIA, DEA), il ne pouvait pas se rallier à une coalition qui l’aurait placé, notamment, au contact régulier avec son ennemi de toujours, Hugo Chavez.
Nicolas Sarkozy, en devenant Président de la République avait fait savoir sa décision de reprendre en main l’affaire Betancourt là où Dominique de Villepin avait échoué en tentant de lancer une opération aéroportée. Le Président français ne réussit jamais à se rapprocher véritablement de son homologue colombien qui se vexait de toute cette effervescence élyséenne : ne rappelait-il pas le nombre de plusieurs centaines d’otages en jeu ? De leur côté les FARC connurent des coups durs, les plus sévères depuis leur fondation en 1964 : la mort, en 2008, de plusieurs de leurs leaders (p.e Manuel Marulanda) dont le numéro 1,Raul Reyes. Son successeur, Alfonso Cano, présenté comme la tête de file des modérés, a-t-il négocié ou subi la libération des otages ? C’est le mystère le plus complet.
Si l’on s’en tient à la voie française, celle de la négociation, il était proposé d’accueillir sur le sol national des FARC repentis et de proposer le paiement d’une rançon. Choix pour le moins illogique : comment la France pouvait-elle recevoir des membres d’une organisation terroriste et envoyer nos soldats en Afghanistan contre les talibans également terroristes ?
De quel côté que l’on prenne l’option franco-vénézuélienne, celle-ci ne possédait pas de crédibilité et heurtait de front la Colombie. Le rôle d’Hugo Chavez était aussi douteux puisqu’il abrite une partie des effectifs des FARC à l’instar de l’Equateur. L’armée colombienne n’a pas hésité à lancer une opération sur le sol de ce pays pour bien faire comprendre qu’elle seule conduirait à terme cette libération tant attendue ; alors que la France voulait regrouper les puissances régionales.
L’autre acteur resté dans l’ombre étant les Etats-Unis. Les FARC s’enrichissent dans le commerce de la drogue et des armes. Pour Langley -cité dortoir de Washington et siège de la CIA - la disparition des FARC serait-elle une bonne opération ?Certainement pas, c’est chasse-gardée. L’existence d’une telle structure autorise les Américains à intervenir sur le sol sud-américain et à veiller au maintien de leur influence : c’est une plate-forme convenable pour eux.
La pression médiatique a-t-elle précipité la libération d’Ingrid Betancourt ? Ce sont plutôt les réalités géopolitiques qui l’emportent sur cette nouvelle qui devrait émouvoir les téléspectateurs et les internautes français plongés pour l'heure dans de sombres calculs (essence, nourriture, loyer, remboursement de crédit…etc) avant de partir ou pas en vacances.
Maintenant, d’autres questions surgiront. La bonne mine d’Ingrid Betancourt indique-t-elle une mise en scène ou une préparation ? Les photos précédentes montraient une captive les joues creuses, le corps presque décharné. Que s’est-il passé entre temps ? Le palais de l’Elysée prévoyait de faire un direct avant d’y renoncer pour proposer un discours enregistré : quel élément est-il intervenu ? Dernier point, la libération d’Ingrid Betancourt par l’armée colombienne épargne-t-elle à la France, le versement d’une grosse somme d’argent ?
La secrétaire d’Etat aux droits de l’Homme, Rama Yade, rappelle le rôle de la France et répète que « la pression internationale ça marche ». Elle avoue, pratiquement, que Nicolas Sarkozy faute d’être le Président libérateur sera celui qui accueillera l’amie du couple Villepin, Ingrid Betancourt.

©Jean Vinatier 2008

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In Seriatim autour d’Ingrid Betancourt


http://seriatim1.blogspot.com/2007/12/bientt-en-tourne-farc-et-ingrid.html
http://seriatim1.blogspot.com/2008/03/farc-dans-la-grande-colombie.html

In Seriatim Amérique Latine :

http://seriatim1.blogspot.com/2008/04/fernando-lugo-de-lautel-la-prsidence-du.html
http://seriatim1.blogspot.com/2008/05/bolivie-el-4-de-mayo.html