Sur la question arméno-azérie qui l’emportera : les USA ou la Russie ? Ce jour une réunion est prévue à Moscou entre le Président Poutine et ses homologues, arménien et azéri. Quelques jours plus tôt, le Premier ministre arménien, Nikol Pachinian se déplaçait à Washington et à Bruxelles pour envisager, déjà, la signature d’un trait de paix à Chisinau, la capitale moldave le 1er juin. L’Arménie serait prête à reconnaitre la souveraineté de l’Azerbaïdjan sur le Haut-Karabagh, enjeux conflictuels depuis des décennies, en échange de la garantie de la protection des populations arméniennes. Ce serait un bouleversement caucasien et au-delà car le Caucase est un chaudron qui historiquement ne s’est jamais éteint quels que soient les empires qui le prétendirent et nous ramène à des siècles historiques si lointains et si présents.
Pauvre Arménie dont l’histoire glorieuse fut courte et dont les derniers rois, ceux de la maison française de Lusignan ne régnèrent plus que sur la Cilicie bien loin d’Erevan…Mais aujourd’hui, le conflit russo-ukrainien parce qu’il dure et sans doute parce qu’il le doit, s’étend, atteignant au Caucase, le balcon sur l’Asie centrale, direction la Chine. C’est un secret de polichinelle les USA rêvent d’une OTAN à Tbilissi et à Erevan avec en prime certainement l’incorporation à l’Union européenne : une Europe qui court derrière Washington sans réfléchir une seule seconde si ce suivisme est de son intérêt ou pas.
Rien n’est en encore fait car le président azéri, LLam Aliyev a de bonnes relations avec Poutine et Erdogan et nous ne sommes pas à l’abri d’un coup de théâtre. La Russie investie dans l’Ukraine peine visiblement à garder des forces suffisantes pour rassurer l’Arménie qui se sent encerclée par l’Azerbaïdjan : au-delà du Haut-Karabagh il y a la république autonome azérie du Nakhitchevan, autrefois majoritairement arménienne qui a subi de la part de Bakou les pires tourments : déplacement des populations et destruction totale de toutes les églises et monastères. Sur ces faits, on peut douter de la viabilité de la protection de la population arménienne dans le Haut Karabagh et que les Américains penseraient régler à coup de dollars s’ils l’emportaient.
En 2023, l’Arménie est encerclée ou cernée par Bakou soutenu par Ankara, deux capitales qui tiennent malgré tout à garder deux fers au feu : d’un côté les USA, de l’autre la Russie avec en arrière-plan, l’Iran. On peut se demander si son choix de se placer sous l’égide américain serait véritablement la bonne option. Karine Bechet-Kolovko, dans son article sur ce sujet cite l’ancien ministre des Affaires étrangères, Vardan Oskanyan :
"La communauté internationale et l'Azerbaïdjan doivent être conscients que la décision de Pachinian (sur la reconnaissance du Karabakh comme faisant partie de l'Azerbaïdjan) n'apportera pas la paix entre les deux peuples. Même si le Premier ministre signe le document, ce ne sera qu'une déviation temporaire du cours naturel de l'histoire"1
Les Américains sont dans leur logique de containment de la Russie avec une lecture peut-être trop lisse des antagonismes et des histoires caucasiens. Erevan qui jouissait, avec la Russie d’une liberté totale la perdra certainement avec Washington qui aura en plus l’idée d’attiser le patriotisme arménien pour contenir la Turquie et l’Azerbaïdjan : jouer avec de la dynamite…sans oublier qu’au Caucase l’Iran exerce une influence et que la Russie même écartée en gardera une aussi ?
Quant à l’Union européenne…son suivisme tient lieu de maxime sans s’apercevoir que la Géorgie quoique via sa présidente ne cesse de parler d’appartenance européenne (où est-elle historiquement ?) ne suit pas pour des motifs de politique intérieure les sanctions antirusses rendant plus compliquée son otanisation : sur le chemin d’Erevan, Tbilissi n’est pas une étape si sûre.
Source :
1-https://russiepolitics.blogspot.com/2023/05/haut-karabakh-les-etats-unis-reprennent.html
Jean Vinatier
Seriatim 2023
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