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mardi 3 février 2009

Antoine-Léonard Thomas : « Ô temps suspends ton vol… » N°391 - 2eme année

Alphonse de Lamartine a plagié cet hémistiche fameux extrait de l’Ode sur le temps écrite par Antoine-Léonard Thomas (1732-1785) et pour laquelle il reçut le prix de l’Académie française en 1762 !
Thomas, ce natif de Clermont-Ferrand est bien oublié alors qu’il fut louangé en son temps pour les éloges qu’il écrivit sur des personnalités (Marc Aurèle, Duguay-Trouin
(« Duguay-Trouin s’avance, la victoire le suit… ») Descartes, Mme Geoffrin, le maréchal de Saxe, Sully, le fils de Louis XV, le Dauphin père de Louis XVI…etc)
C’est l
’Ode sur le temps qui lui apporta la renommée et lui valut sa place à l’Académie française en 1766. Etait-il courtisan ? Pas le moins du monde, le plaisir qu’il avait pour les belles lettres l’emportait sur le souci de garder une place comme par exemple celle de secrétaire du duc de Praslin. Son hommage à Sully lui valut l’hostilité des fermiers généraux et, par contre-coup, la faveur du parti philosophique (Diderot, d’Holbach, Helvétius, Voltaire…etc) Son éloge de Marc-Aurèle applaudit par les salons, fut interdit d’impression en 1770 et il s’attaqua, en 1771, au très puissant avocat-général du Parlement de Paris Séguier qui voulut le mettre en quarantaine. L’Académie fit bloc avec Thomas.
En 1772, son
Essai sur les caractères, les mœurs et l’esprit des femmes qui contenait cette interrogation célèbre : « Si aucune femme ne s’est mise à côté des hommes célèbres, est-ce la faute de l’éducation ou de la nature ? » déclencha une polémique importante.
Thomas n’est donc pas seulement un homme de lettres mondain. Il est un acteur de la vie parisienne à la fin du règne de Louis XV et pendant celui de Louis XVI, une période encore négligée ou peu étudiée aujourd’hui.


« Ode sur le temps (extrait)
…………………………………………………
Trop aveugles humains, quelle erreur vous enivre !
Vous n'avez qu'un instant pour penser et pour vivre,
Et cet instant qui fuit est pour vous un fardeau !
Avare de ses biens, prodigue de son être,
Dès qu'il peut se connaître,
L'homme appelle la mort et creuse son tombeau.
____
L'un, courbé sous cent ans, est mort dès sa naissance ;
L'autre engage à prix d'or sa vénale existence ;
Celui-ci la tourmente à de pénibles jeux ;
Le riche se délivre, au prix de sa fortune,
Du Temps qui l'importune ;
C'est en ne vivant pas que l'on croit vivre heureux.
____
Abjurez, ô mortels, cette erreur insensée !
L'homme vit par son âme, et l'âme est la pensée.
C'est elle qui pour vous doit mesurer le Temps !
Cultivez la sagesse ; apprenez l'art suprême
De vivre avec soi-même ;
Vous pourrez sans effroi compter tous vos instants.
____
Si je devais un jour pour de viles richesses
Vendre ma liberté, descendre à des bassesses,
Si mon coeur par mes sens devait être amolli,
O Temps ! je te dirais : "Préviens ma dernière heure,
Hâte-toi que je meure ;
J'aime mieux n'être pas que de vivre avili."
____
Mais si de la vertu les généreuses flammes
Peuvent de mes écrits passer dans quelques âmes ;
Si je peux d'un ami soulager les douleurs ;
S'il est des malheureux dont l'obscure innocence
Languisse sans défense,
Et dont ma faible main doive essuyer les pleurs,
____
Ô Temps, suspends ton vol, respecte ma jeunesse ;
Que ma mère, longtemps témoin de ma tendresse,
Reçoive mes tributs de respect et d'amour ;
Et vous, Gloire, Vertu, déesses immortelles,
Que vos brillantes ailes
Sur mes cheveux blanchis se reposent un jour. »


Jean Vinatier

©SERIATIM 2009

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Source
:

Thomas, Antoine Léonard, Ode sur le temps, Les Devoirs de la société, ode adressée à un homme qui vit dans la solitude, Paris,Vve Brunet, 1762.

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