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lundi 22 juin 2020

Georges Floyd : un télescopage Atlantique ? N°4954 14e année



Les ondes de choc de l’affaire Georges Floyd ont bondi, notamment, en France en prenant les habits d’Amada Traoré s’accompagnant d’une campagne de déboulonnages, de souillures de statues, de propositions de changement des noms de rue au nom de notre histoire d’esclavagiste, de colonisateur, de blanc. Certains universitaires américains s’attaquent maintenant à la musique classique car elle serait le privilège des blancs et des asiatiques…..
Ces événements surviennent lors d’une campagne présidentielle américaine dont la virulence dépassera celle de 2016 : les démocrates (et quelques républicains) déjà opposés à Donald Trump savent qu’une réélection le 3 novembre sonneraient le glas d’une présidence américaine beaucoup plus mondialiste que celle en cours. Les enjeux financiers, économiques, sociaux, démocratiques sont considérables. Cette puissance d’opposition à Donald Trump s’appuie notamment sur un levier qu’est le racisme américain consubstantiel à la naissance des Etats-Unis. Ce levier pro-afro-américain n’est pas isolé puisque toutes les minorités qualifiées de victimes ou d’oppressées tendant à composer une armée hétéroclite mais mue par ce qu’elles prétendent être. Derrière toutes ces revendications, discours et actions, agissent des fondations, des personnes richissimes les seuls à financer et à assurer une publicité, médiatique, sur les réseaux sociaux.
Quand bien même Donald Trump obtiendrait-il un second mandat, les combats pour les diversités ne disparaitraient pas pour autant. En effet, la faute originelle américaine aurait été triple : avoir été des colons, avoir été des esclavagistes puis des ségrégationnistes, avoir mis dans des réserves les Indiens, populations d’origine. On remarquera que personne ne se choque du terme « réserve » qui est à bien des égards aussi pire que la ségrégation et que les Indiens restent en dehors des « Blacks lives matter ». On notera aussi que les afro-américains pourraient être vus par les Indiens comme des colons (contraints ou involontaires) au même titre que les Européens du Mayflower !
On soulignera aussi que décrochage de portraits de confédérés présents au Capitole  ne gênait aucun démocrate jusqu’à ce jour et que Barack Obama pendant ses deux mandats n’avait guère paru être sensible à une purification statuaire….Bref, cette campagne présidentielle américaine présente tous les aspects d’une offensive générale de grande ampleur englobant autant les Etats-Unis que l’Europe pour abolir, effacer, déconstruire tous les symboles des Histoires des susdits pays. Est-ce l’homme blanc qui est visé ? Serait-il question de préparer à un nouveau monde Atlantique dans lequel les nations, une et indivisibles, s’effaceraient au profit des communautarismes, des ethnies, des minorités toutes victimes et toutes bien séparées, divisées ? Il y a chez certains blancs américains le dédain de ce qu’ils sont. On pense à cette femme issue de la couche aisée qui a théorisé autour du « privilège blanc » dans une sorte de trame rédemptrice caractéristique de certaines sectes protestantes. On a depuis longtemps la théorie des genres qui sévit désormais jusqu’en Europe, de même l’implosion du modèle de couple homme/femme. Plus largement, certains esprits américains veulent recréer une autre histoire, d’autres mémoires via un bain purificateur. Les Etats-Unis sont vues comme une Terre promise mais est-elle si juste, si bonne, si pure ? Le terreau protestant, les courants messianiques que les différentes monarchies européennes avaient pris soin d’expédier par-delà les mers aux XVI et XVIIe siècles peinant déjà à émerger des guerres de religion qui durèrent, si l’on part des bogomiles (cathares) et des hussites jusqu’à l’édit de Fontainebleau de 1683 pas loin de trois siècles, ont sédimenté jusqu’à l’avènement à la moitié du XXe siècle des Etats-Unis au rang de première ou hyperpuissance puissance mondiale. Depuis 1945 les Etats-Unis ne cessèrent pas d’affronter des conflits intérieurs qui prennent aujourd’hui une expression offensive jusqu’en Europe et qui s’adhèrent à l’idée née au début du Xe siècle autour d’une unicité historique Atlantique. On assiste à la réunion explosive de questions identitaires américaines et d’une histoire  proposée comme quasi fusionnelle avec les Européens.
Sur ce point important, il faut bien se souvenir que la guerre d’Indépendance américaine puis la naissance des Etats-Unis ont été vus comme un événement par les puissances européennes d’alors comme partie intégrante de leur espace géographique ; que ces même puissances qui devinaient bien que les Etats-Unis voudraient aller jusqu’au Pacifique échafaudèrent des plans pour contenir tout développement territorial. En réalité, les cabinets politiques du XVIIIe siècle qui s’entendaient autour de l’équilibre de puissance voulaient l’appliquer au continent américain. La Révolution française a remisé ces projets. La chute de la Bastille a donc libéré également les Américains de tous les calculs européens.
Le mouvement Black Lives matter dans ce qu’il perpétue rencontre d’autres forces telluriques qui allient l’histoire et un projet sinon de nouvelle histoire d’une aire géographique lavée du pêché.
Ni l’Asie, ni l’Amérique latine, ni l’Afrique, ni l’Orient n’entrent dans cette aire, elle est bornée à l’Europe (surtout celle à façade Atlantique) et aux Etats-Unis. Un angle qui n’interpelle pas et qui, pourtant, éclaire bien que les assauts menés contre nos Histoires ramèneraient au titre de l’ouvrage de Huttington : Qui sommes-nous ?.
Les Européens et les Etats-Unis s’éloignent, ce décrochage aurait débuté en 1789, sur le plan culturel ou artistique les Américains s’émancipent du « vieux continent » au début du XXe siècle. 
Nous pourrions en reprendre conscience si les Etats européens arrivaient à s’autonomiser, à penser autrement que par le seul prisme des campus américains. Les Etats-Unis nous renvoient leurs propres maux quand l’Europe est très en peine de s’entendre sur ce qui l’unit, la fonde, la projette.
Avant même la question américaine, les féodalités surgies après l’empire romain n’étant, ni Etat, ni nation, crurent par les Croisades en Asie quelles appelèrent l’Orient définir  l’Occident.
Le Qui sommes-nous ou Qui devrions-nous être des deux côtés de l’Atlantique, est une question redoutable qu’un simple fait divers tragique démultiplié par les modernités technologiques revient en boomerang, mettant à nu bien des failles et des ambitions contraires.



Jean Vinatier
Seriatim 2020

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