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lundi 28 septembre 2020

Macron et la « trahison »N°4963 14e année

 

Le Président Macron a-t-il raison de parler de trahison pour qualifier l’incapacité du gouvernement libanais à former un gouvernement ?

Dès le début de l’entreprise présidentielle, je soulignais sur twitter, le danger à aller trop vite, de croire que de simples phrases et bains de foule suffiraient à éblouir les grandes familles syro-libanaises, de même que tous les pro-Saoud sans même évoquer le hezbollah !

Débarquer en Orient sans avoir ni les poches pleines, ni la force militaire est une action vouée à l’échec. Comme en toute chose, pour pratiquer une bonne politique avec un autre Etat, il faut être en rapport de force, être au moins en équilibre sinon le bâtir. La France n’amenait rien si ce n’est des consignes, des avis et un calendrier.

Qui a trahi qui ? Les libanais ne peuvent-ils pas à rebours du commentaire dépité élyséen, exprimer la déception de voir une France dans l’incapacité de donner une consistance à ses exigences ?

Je ne crois pas que l’on puisse parler à proprement dit de « trahison » de la part des élites libanaises corrompues ou pas, faibles ou fausses. Ces libanais n’ont rien promis, ils ont accueilli et attendu. Le peuple libanais qui souffre de l’amoralité de leur classe politique est elle-aussi désappointée par la besace vide française.

L’Orient fascine. C’est l’Occident qui a imaginé un Orient qui serait en quelque sorte son reflet d’où la succession des catastrophes sur cette terre.

En Orient, les vrais frontières sont familiales (claniques) tribales, ethniques, religieuses, celles des Etats pour beaucoup dessinées par des Européens, n’ont qu’une faible correspondance avec les nôtres.

En Orient, la patience est une vertu, le temps est différent du nôtre. La fascination et le respect qu’ont les orientaux pour le potentat est vrai.

On ne sait si les orientalistes du quai d’Orsay furent consultés avant que le Président ne se lance dans cette entreprise. En tout cas cette façon de faire portait en germe la déconvenue.

Au-delà de cette « trahison » s’éloigne pour la France de revenir dans le jeu oriental, sur terre via le Liban, sur mer en soutenant la Grèce dans ses face à face avec la Turquie laquelle a avancé un peu plus ses pions.

Cet été en Méditerranée orientale  a un gout amer pour la politique française d’autant qu’à l’échec diplomatique s’ajoute un désaveu personnel pour le Président. Et c’est le point le plus grave d’autant plus que le Président recommencerait, cette fois-ci en Europe, à promettre aux opposants biélorusses de Loukachenko depuis la Lituanie tout en prenant contact avec la Russie de Poutine. Quel objectif ? Quelle vue géopolitique ?

Cette communication obsédante qui noie stratégie et tactique, forme et fond a ses limites. Se balader en Obama, s’extasier sont des postures : c’est sympathique mais cela ne fonde pas une politique du temps, de même que les neutralisations depuis le bunker élyséen : quel intérêt si elles sont dissociées de la politique à long terme ?

Emmanuel Macron s’emmêlerait-il tout seul dans les filets faute de tenir entre ses mains les bons outils de son ambition dont un se nomme patience ?

 

Jean Vinatier

Seriatim 2020

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