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jeudi 29 septembre 2022

Ukraine, North Stream : au bout l’allumette totémisée? N°5900 16e année

Avec les derniers sabotages intervenus sur les gazoducs North Stream, se confirme ce dangereux cheminement vers des sentiers de plus en plus incertains, de moins en moins balisés avec au bout, l’allumette totémisée…

Dans un monde placé de plus en plus en mode résilient qui confine à l’apathie sur tout, ces dernières actions dans le cadre du conflit en Ukraine, grandissent donc cet immobilisme de l’homme. Certes, les sanctions succèdent aux sanctions, les campagnes communicationnelles se succèdent les unes aux autres, les principales étant du côté Atlantique, celle russe étant quasi invisible même si l’on nous répétera du matin au soir que nous succombons à leur propagande. La guerre psychologique a une puissance au moins aussi grande que la bataille sur le terrain, idem pour les outils financiers et monétaires qui peuvent par des mouvements soudains déstabiliser l’adversaire et décourager les éventuels alliés ou soutiens.

Avec la guerre en Ukraine, nous vivons dans un conflit à la fois localisé mais totalement globalisé dans les moyens. Dans ce domaine, les États-Unis jouissent d’une prépotence incontestable qui masque actuellement leurs maux intérieurs et d’une façon plus profonde leur appréhension à ne plus être la puissance des puissances. Sans doute les États-Unis ont réussi un coup imparable en précipitant l’opération spéciale russe en Ukraine, un acte qui permettait la scénarisation (peu importe les souffrances pour les populations ukrainiennes) et l’installation d’une narration jusqu’à maintenant impeccable. Néanmoins, le grain de sable dans la stratégie et la tactique est, sans doute, le calcul trop juste de la résistance russe aux punitions et mesures coercitives contre de simples citoyens russes (les oligarques sont, quoiqu’on en dise, relativement épargnés notamment dans les paradis fiscaux). Actuellement c’est le refus de russes d’aller combattre en Ukraine qui autorise à écrire que la population se retournerait contre le maître du Kremlin. Quand des milliers d’Américains fuyaient au Canada, au Mexique pour ne pas aller se battre au Vietnam, les États-Unis s’effondrèrent-ils ? Non. Quand en 1914 et 1939 des milliers de Français refusèrent la mobilisation générale, les français se retournèrent-ils contre leur gouvernement ? Non. Ce qui immobilise avant de l’écrouler un régime est la désertion massive ou bien l’insurrection au sein de la troupe ou bien encore la déroute militaire sur fond, généralement, de mauvais approvisionnements de la population.  A priori, la Russie n’est pas arrivée à ce stade. Mais le but étant de démoraliser l’ennemi, d’y semer la discorde, placer sur un même plan psychologique le refus de la mobilisation et la déroute, est un acte de guerre à part entière qui a son sens.

Cependant, on a le pressentiment que d’une part, les propos de Vladimir Poutine ne sont plus pris au sérieux (il ne s’agit pas de savoir s’il dit vrai ou pas mais de bien le lire entre les lignes) ; d’autre part, que la fuite en avant ne serait que le seul fait de la Russie…Bref, émerge l’invulnérabilité d’un côté, son contraire de l’autre. Cette affirmation Atlantique qui vise aussi la Chine la fait opérer sur deux champs conflictuels, le premier étant en phase active, le second en cours de façonnage en Asie qui serait le coup d’après. Une vision qui fait fi que Pékin tire bien naturellement les leçons de tout ce qu’il ne faut pas faire, que l’Inde sait bien que les flatteries adressées ne le sont que dans le cadre indopacifique tel que le regarde l’axe anglo-américain. De même la Turquie, qui soutient l’Azerbaïdjan humiliant dans le sang l’Arménie sans que ni la Russie ni l’OTSC n’interviennent, la première par accaparement sur le front ukrainien, la seconde faute d’unanimité, qui fait le jeu américain tout en obtenant la liberté d’agrandir son champ d’intervention (Caucase) sans pour autant songer, actuellement, à la formation d’un continuum turcophone économique et militaire.

Débuté en février 2022, le conflit abordera en octobre son huitième mois où l’on voit que les Balkans, l’Afrique, l’Asie caucasienne sont, désormais, des espaces plein de mèches. Le danger est bien l’extension guerrière qui oblige par le nombre des acteurs à s’assurer la maîtrise d’aires géographiques qui auront nécessairement des failles. La fuite en avant de Vladimir Poutine me parait moins certaine que celle du monde Atlantique. Les avertissements relayés dans nos médias des chinois, des indiens auprès des russes s’adressent tout autant à nous mais nous ne le les lisons pas. Ce qui me fait craindre un pas de trop de côté, c’est bien notre morgue qui nous placerait à la merci d’un geste de trop qui ne préviendrait pas.

Sans en avoir l’air, nous quittons le champ de la raison pour épouser celui de la puissance à maintenir coûte que coûte. La diffusion récente d’une carte où la Fédération de Russie serait découpée en plusieurs entités (ce fut le cas au début des années 2000 pour la péninsule arabique) est dans cet ordre (la France a connu des plans de découpage qui circulaient dans les valises diplomatiques, par exemple : 1716, 1814, 1944)

Le dollar et l’Otan sont des armes redoutables face à une seule puissance quelle quelle soit, elle l’est moins face à deux (Russie/Chine) et moins encore face à trois (Russie/Chine/Inde), des armes moins redoutables aussi face à l’hermétisme ou au masque : opiner devant et par en dessous agir selon soi.

L’allumette totémisée est face à nous tous…..

Jean Vinatier

Seriatim 2022

 

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