Entre les deux tours des élections régionales, le climat intérieur français s’est singulièrement alourdi après les déclarations du Président de la République et du Premier ministre concernant les aggravations des sanctions contre les agressions et les insultes (mot bien vague) envers des policiers.
Pendant ce temps, la crise grecque que l’on pensait sur une voie plus apaisée, est soudainement réapparue dans toute sa vigueur sur fond d’une mésentente entre Paris et Berlin, l’Elysée faisant dire à Christine Lagarde toute une série de critiques sur la façon dont la chancelière allemande gérait l’économie de son pays, la plus grande puissance industrielle de l’Europe.
De son côté Angela Merkel n’a pas hésité à placer en concurrence Dominique Strauss-Kahn et Nicolas Sarkozy en ne désavouant pas la menace du Premier ministre grec, Georges Papandréou, d’en appeler au FMI : Strauss-Kahn sauveur de la Grèce ? Fureur sarkozienne assurée…
Pendant que les deux capitales européennes s’envoient des amabilités, le gouvernement allemand bouscule la zone euro en proposant de créer un Fonds Monétaire Européen (FME), la plus forte proposition depuis que les dettes des PIIGS sont sur le devant de la scène.
La Grèce est-elle l’arbre qui cache la forêt ?Certainement car derrière, se profile la nouvelle politique allemande relative au "couple franco-allemand", à la zone euro, à sa conception de l’Europe, à son rang dans le monde que l’on pourrait ranger sous les aspects :
1-Géopolitique : par les connections russes, turques et chinoises tout en restant une fidèle alliée du Royaume-Uni et des Etats-Unis (OTAN), rappelons-nous, il y a quelques mois, le discours de la chancelière devant le Congrès.
2-Economique et financier : par le renforcement de l’influence allemande en Europe Centrale (hinterland) et la montée en puissance de ses banques et ses industries.
3-Monétaire : par la création du Fonds Monétaire Européen, elle arrimerait ipso facto l’euro à sa politique économique.
4-Politique : en accélérant le processus de régionalisation.
Avec les aspects soulignés qui restent des hypothèses, le couple ou duo franco-allemand n’est-il plus qu’un poids du lendemain de la Seconde Guerre mondiale et de la Guerre froide ? Une Allemagne forte et sérieuse, une France handicapée par des finances déplorables, serait-ce tout ce qui reste de l’entente entre ces deux pays qui furent le moteur essentiel de la construction européenne ? Est-ce le moment de l’inventaire ?
L’entente franco-allemande est devant la réalité : tous les discours pompeux de la majorité des politiciens français sur ce point volent en éclats ; on garde bien de dire aux Français que de l’autre côté du Rhin, les partis allemands s’en moquent comme d’une guigne.
Paris pérore quand Berlin dresse ses plans.
L’Allemagne aurait-elle les moyens d’une nouvelle politique européenne en formant une union avec l’Autriche, le Benelux sauf la Belgique à cause des francophones ? La tentation est immense parmi les dirigeants allemands de renouer avec une conception de leur puissance qui ferait fi progressivement de la relation française.
Regardons, par exemple, la question géopolitique. L’Allemagne réfléchit en direction du Caucase (comme à la fin du XIXe) et de la Sibérie. Pour ce faire, d’étroites relations avec la Russie et la Turquie sont primordiales et ne surprennent pas au vu des antériorités historiques. Ainsi Berlin soutiendrait sans trop rechigner la politique du Kremlin de replacer sous son influence directe la Biélorussie et l’Ukraine. Le gouvernement allemand appuierait également l’action réformatrice du Premier ministre turc, Recep Tayyip Erdogan dont l’un des buts est de faire de la Turquie le centre d’un espace turcophone de 850 millions de locuteurs depuis la Mer Noire jusqu’à la frontière chinoise. La présence de 4 millions de turcs en Allemagne est évidemment un élément important.
Depuis la Chine jusqu’à la mer du Nord, cette politique allemande, ainsi mise en œuvre, l’amènerait à une position clef au sein de l’Eurasie en gestation, laissant alors le Sud de l’Europe (France, Espagne, Italie…etc) non seulement devant des situations financières calamiteuses mais aussi face aux multiples incertitudes politiques qui grandiront pour tous les Etats du Grand Maghreb (Maroc, territoire du Sahara occidental, Mauritanie Algérie, Tunisie, Libye) et du Machrek depuis l’Egypte jusqu’en Mésopotamie et la péninsule arabique.
Et l’Euro ? Nul n’imagine que l’Euro puisse passer à la trappe. Partout on nous dit que la chose est impensable. En fait l’intérêt de l’Allemagne ne serait pas de faire disparaître la monnaie unique mais de l’avoir sous son aile d’où son idée d’un fonds monétaire européen.
Nous sommes à l’aube de très grands bouleversements qui feront la part belle aux Etats-continents : Chine, Inde, Brésil, Russie, l’Australie mais aussi Turquie et naturellement l’ensemble Canada-Etats-Unis. L’Europe allemande pourrait-elle se prévaloir d’être également un Etat-continent à la tête d’une Germanie qui placerait l’Europe Centrale dans son sillage et à l’extrémité du continent eurasien?
Serait-ce viable ? Quels sont les atouts entre les mains de la France ? Quelles sont les pensées devant de tels enjeux ?
Tout ceci mérite d’heureuses et audacieuses réflexions.
Jean Vinatier
Copyright©SERIATIM 2010
Commentaires : Si vous n’avez pas de compte Gmail, et pour éviter le noreply-comment veuillez envoyer vos commentaires à : jv3@free.fr
Internautes : Afrique du Sud, Albanie, Algérie, Arabie Saoudite, Argentine, Arménie, Australie, Biélorussie, Bénin, Bolivie, Bosnie Herzégovine, Brésil, Burkina Faso, Cambodge, Cameroun, Canada, Chili, Chine (+Hongkong & Macao), Chypre, Colombie, Congo-Kinshasa, Corée du Sud, Côte d’Ivoire, Djibouti, EAU, Egypte, Etats-Unis (30 Etats & Puerto Rico), Gabon, Géorgie, Guatemala, Guinée, Guinée, Haïti, Honduras, Inde, Irak, Iran, Islande, Israël, Jamaïque, Kenya, Liban, Libye, Liechtenstein, Macédoine, Madagascar, Malaisie, Malawi, Mali, Maurice, Maroc, Mauritanie, Mexique, Moldavie, Monaco, Népal, Niger, Nigeria, Norvège, Nouvelle Zélande, Oman, Ouzbékistan, Palestine, Pakistan, Pérou, Qatar, République Centrafricaine, République Dominicaine, Russie, Rwanda, Sénégal, Serbie, Singapour, Slovénie, Somalie, Suisse, Thaïlande, Togo, Tunisie, Turquie, Union européenne (27 dont France + DOM-TOM & Nouvelle-Calédonie, Polynésie, Saint-Pierre–Et-Miquelon), Ukraine, Uruguay, Venezuela, Vietnam, Yémen
Pendant ce temps, la crise grecque que l’on pensait sur une voie plus apaisée, est soudainement réapparue dans toute sa vigueur sur fond d’une mésentente entre Paris et Berlin, l’Elysée faisant dire à Christine Lagarde toute une série de critiques sur la façon dont la chancelière allemande gérait l’économie de son pays, la plus grande puissance industrielle de l’Europe.
De son côté Angela Merkel n’a pas hésité à placer en concurrence Dominique Strauss-Kahn et Nicolas Sarkozy en ne désavouant pas la menace du Premier ministre grec, Georges Papandréou, d’en appeler au FMI : Strauss-Kahn sauveur de la Grèce ? Fureur sarkozienne assurée…
Pendant que les deux capitales européennes s’envoient des amabilités, le gouvernement allemand bouscule la zone euro en proposant de créer un Fonds Monétaire Européen (FME), la plus forte proposition depuis que les dettes des PIIGS sont sur le devant de la scène.
La Grèce est-elle l’arbre qui cache la forêt ?Certainement car derrière, se profile la nouvelle politique allemande relative au "couple franco-allemand", à la zone euro, à sa conception de l’Europe, à son rang dans le monde que l’on pourrait ranger sous les aspects :
1-Géopolitique : par les connections russes, turques et chinoises tout en restant une fidèle alliée du Royaume-Uni et des Etats-Unis (OTAN), rappelons-nous, il y a quelques mois, le discours de la chancelière devant le Congrès.
2-Economique et financier : par le renforcement de l’influence allemande en Europe Centrale (hinterland) et la montée en puissance de ses banques et ses industries.
3-Monétaire : par la création du Fonds Monétaire Européen, elle arrimerait ipso facto l’euro à sa politique économique.
4-Politique : en accélérant le processus de régionalisation.
Avec les aspects soulignés qui restent des hypothèses, le couple ou duo franco-allemand n’est-il plus qu’un poids du lendemain de la Seconde Guerre mondiale et de la Guerre froide ? Une Allemagne forte et sérieuse, une France handicapée par des finances déplorables, serait-ce tout ce qui reste de l’entente entre ces deux pays qui furent le moteur essentiel de la construction européenne ? Est-ce le moment de l’inventaire ?
L’entente franco-allemande est devant la réalité : tous les discours pompeux de la majorité des politiciens français sur ce point volent en éclats ; on garde bien de dire aux Français que de l’autre côté du Rhin, les partis allemands s’en moquent comme d’une guigne.
Paris pérore quand Berlin dresse ses plans.
L’Allemagne aurait-elle les moyens d’une nouvelle politique européenne en formant une union avec l’Autriche, le Benelux sauf la Belgique à cause des francophones ? La tentation est immense parmi les dirigeants allemands de renouer avec une conception de leur puissance qui ferait fi progressivement de la relation française.
Regardons, par exemple, la question géopolitique. L’Allemagne réfléchit en direction du Caucase (comme à la fin du XIXe) et de la Sibérie. Pour ce faire, d’étroites relations avec la Russie et la Turquie sont primordiales et ne surprennent pas au vu des antériorités historiques. Ainsi Berlin soutiendrait sans trop rechigner la politique du Kremlin de replacer sous son influence directe la Biélorussie et l’Ukraine. Le gouvernement allemand appuierait également l’action réformatrice du Premier ministre turc, Recep Tayyip Erdogan dont l’un des buts est de faire de la Turquie le centre d’un espace turcophone de 850 millions de locuteurs depuis la Mer Noire jusqu’à la frontière chinoise. La présence de 4 millions de turcs en Allemagne est évidemment un élément important.
Depuis la Chine jusqu’à la mer du Nord, cette politique allemande, ainsi mise en œuvre, l’amènerait à une position clef au sein de l’Eurasie en gestation, laissant alors le Sud de l’Europe (France, Espagne, Italie…etc) non seulement devant des situations financières calamiteuses mais aussi face aux multiples incertitudes politiques qui grandiront pour tous les Etats du Grand Maghreb (Maroc, territoire du Sahara occidental, Mauritanie Algérie, Tunisie, Libye) et du Machrek depuis l’Egypte jusqu’en Mésopotamie et la péninsule arabique.
Et l’Euro ? Nul n’imagine que l’Euro puisse passer à la trappe. Partout on nous dit que la chose est impensable. En fait l’intérêt de l’Allemagne ne serait pas de faire disparaître la monnaie unique mais de l’avoir sous son aile d’où son idée d’un fonds monétaire européen.
Nous sommes à l’aube de très grands bouleversements qui feront la part belle aux Etats-continents : Chine, Inde, Brésil, Russie, l’Australie mais aussi Turquie et naturellement l’ensemble Canada-Etats-Unis. L’Europe allemande pourrait-elle se prévaloir d’être également un Etat-continent à la tête d’une Germanie qui placerait l’Europe Centrale dans son sillage et à l’extrémité du continent eurasien?
Serait-ce viable ? Quels sont les atouts entre les mains de la France ? Quelles sont les pensées devant de tels enjeux ?
Tout ceci mérite d’heureuses et audacieuses réflexions.
Jean Vinatier
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