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jeudi 21 juillet 2022

La fraude sans fin des puissants par Alizée Delpierre N°5884 16e année

 

« À propos de : Pierre Lascoumes, L’économie morale des élites dirigeantes, Presses de Sciences Po »

« Fort de ses recherches sur la corruption et la criminalité en col blanc des classes dominantes, Pierre Lascoumes nous plonge dans les mécanismes institutionnels des fraudes de ceux qui détiennent le pouvoir politique et économique en France.

« Recension par Alizée Delpierre :

 

Pourquoi les élites ont-elles des pratiques illicites ? Comment expliquer que ces pratiques se perpétuent dans le temps ? L’ouvrage de Pierre Lascoumes s’inscrit dans la lignée de ses travaux dédiés à la délinquance économique et financière et à la « démocratie corruptible », où il a déjà eu l’occasion d’éclairer les facettes plurielles des illégalismes des élites

. Les élites dont il est question dans ce livre sont les personnes appartenant aux classes dominantes qui occupent de hautes fonctions politiques – députés, ministres, présidents, principalement –, et/ou économiques – tels que les PDG, chefs d’entreprises, professionnels de la finance. S’il est parfois question de femmes, la majorité des cas analysés par Pierre Lascoumes concerne des hommes, sur-représentés dans ces fonctions dirigeantes.

À l’appui des matériaux collectés lors de différentes enquêtes (rapports et statistiques des institutions ministérielles et judiciaires, articles de presse et interventions médiatiques, entre autres), l’auteur propose ici d’éclairer les facteurs structurels du contournement des lois par les élites. L’objectif est de comprendre les rouages des institutions politiques et économiques favorisant la banalisation des fraudes des élites dirigeantes.

Des élites distantes aux normes et aux sanctions


L’argument selon lequel les pratiques illicites des élites s’expliquent par des facteurs structurels part de la thèse suivante : les élites entretiennent un rapport très distant aux lois et aux sanctions. En sus des précédents travaux de Pierre Lascoumes et de ses co-auteur·es, plusieurs recherches montrent en effet à quel point elles se conçoivent comme un groupe à part, supérieur, qui s’autorise à ne pas respecter les lois et les valeurs applicables aux autres

. Pierre Lascoumes vient étayer autrement ce résultat : il propose une analyse organisationnelle et historicisée des jeux d’alliance et de soutien qui se nouent entre et au sein des institutions politiques et économiques, publiques comme privées, qu’il conçoit comme des conditions aux fraudes des élites.

Il identifie trois facteurs propices aux pratiques illicites. D’une part, les élites imposent des règles aux gouvernés tout en adoptant des dérogations qui leur profitent. D’autre part, elles justifient constamment ces règles dérogatoires. Enfin, les sanctions à leur égard sont très faibles. Ces trois facteurs sont les piliers des deux grandes logiques organisationnelles et rhétoriques que Pierre Lascoumes file tout au long de l’ouvrage : l’économie morale et l’auto-régulation. En empruntant le premier concept à la sociologie des classes populaires, il désigne l’ensemble des croyances et des solidarités partagées par le groupe dominant, qui contribuent à le fédérer et à l’autonomiser. L’économie morale est à la fois cause et conséquence de l’auto-régulation, second concept mobilisé par Pierre Lascoumes pour rendre compte du pouvoir de définition, d’application et de justification de règles propres au groupe dominant, qui l’écartent des régulations publiques lui devenant ainsi extérieures. Parce que l’économie morale et l’auto-régulation permettent aux élites dominantes de maintenir leur position de pouvoir, elles structurent les inégalités sociales contemporaines.

Les conditions de la fraude »

La suite ci-dessous :

https://laviedesidees.fr/La-fraude-sans-fin-des-puissants.html

 

Jean Vinatier

Seriatim 2022

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