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dimanche 3 juillet 2022

Paris jachère N°5879 16e année

 On a une idée de la démence d’une ville, autrefois capitale souveraine, à quelques signes. Ainsi pendant plusieurs jours, les feux de signalisation disparurent de la place de la Résistance (pont de l’Alma) sous les yeux des policiers en charge de la sécurité de la cathédrale russe dont pas un n’eut l’initiative de réguler la circulation. De même pas un ne bougea quand les trottinettes lancées à toute vitesse passèrent au feu rouge (rétabli) manquant de renverser cyclistes et passants….

L’autre signe est la désinvolture qui gangrène tout Paris à laquelle s’agrège la vulgarité pour ne pas dire l’insulte qui assaille le malheureux passant évitant à peine d’être renversé par un vélo, une trottinette : l’utilisateur (parfois à deux) oreillettes enfoncées, le mobile en usage (selfie ou autre) s’empourpre dès que son élan trouve une contrariété dans son monde de glisse, d’isolement, d’autisme. D’ailleurs les voies dites à « circulation douce » sont un concentré de tensions et de je-m’en-foutisme : moi-même cycliste passionné, je préfère la proximité de la voiture infiniment plus prudente tout simplement parce que le conducteur est responsable ce que le deux roues (vélo, vélo électrique, trottinette) n’est pas du tout : je fais ce que je veux, rien à cirer des autres, l’urbanité est pour les chiens…L’habitude prise de prendre les rues, avenues en sens contraire, certaines autorisées mais beaucoup pas, fait que désormais la circulation douce va et vient dans n’importe quel sens : les pistes cyclistes elles-mêmes en font les frais : beaucoup sont à sens unique, il n’est point rare de voir surgir vélo et trottinette, sans parler des bandes adolescentes qui monopolisent toute la piste sous les yeux passifs de la police (nationale, municipale)

L’autre signe également est l’appropriation de l’espace public par des particuliers pour assouvir leur zumba et autres gymnastiques sonores : les quais de Seine, les parcs et jardins de Paris ont font les frais. Il est à voir l’état lamentable du parc Monceau : bancs cassés, pelouses râpées avec des matinées aux musiques puissantes installées par les coachs…On est dans la plaine Monceau, le XVIIe chic et pourtant s’y développe le « moi d’abord »

S’ajoute bien évidemment le bruit ou l’agression sonore : le tam-tam ayant une capacité de nuisance démesurée via la Seine quand il ne pourrit pas tout un bois (Vincennes, Boulogne…etc) : là-aussi passivité de la mairie de Paris, de la préfecture.

On sait depuis Boileau que les embarras de Paris font partie de la vie quotidienne mais avec cette différence entre les bruits liés à un chantier, à un travail et ceux générés par l’égoïsme particulier. Le Paris jusque dans les années 50 était un Paris où les parisiens goutaient les chants qui ne sollicitaient ni micro ni ampli ne rendant pas les sons agressifs.

La mairie de Paris depuis Bertrand Delanoë n’a d’yeux que pour la nuit. J’ai connu les derniers temps de Paris la nuit, où la nuit appartenait aux promeneurs et "baguenaudeurs" : le silence, la merveille de la Seine une fois les bateaux-mouches au lit. Nuit rêvée pour les insomniaques et amateurs de furtives galipettes, il y avait ces moments merveilleux d’être dans un « monde » et d’autant plus que les transports en commun cessant tout fonctionnement, le parisien retrouvait sa ville, c’était ces heures remparts…Aujourd’hui, les errances, touristiques et  banlieusardes telles des sauterelles ont gommé ce Paris là qui ne reviendra plus…..

Il est de voir comment le parisien est passé pour la mairie de Paris au second plan : sont prioritaires les touristes, les étrangers, les multinationales. Pour un peu Anne Hidalgo ferait bien de l’anglais la langue vernaculaire administrative parisienne…L’idée des villes globales dans un monde globale trouve à Paris son laboratoire diabolique servi par une équipe municipale et aussi une sociologie applaudissant le monde connecté. Peu importe les salles de shoot, les chantiers, les laideurs et même les écologistes approuvant les arbres abattus, les parcs et jardins ensauvagés (d’ailleurs en Allemagne les Verts se taisent sur le charbon… !) entre  Tour Triangle et des idées débiles de forêts urbaines  le tout alimenté par la haine du quatre roues : David Belliard est plus dans un taxi que sur un vélo, Anne Hidalgo est plus dans sa tuture électrique et les avions (bonjour le CO2) : il est vrai que certains africains l’entourent d’une aura de génie et d’intelligence (sommet des maires francophones d’Abidjan)  alors même qu’elle affiche son incapacité à faire des phrases, visiblement sa mégalomanie éblouie le chaland ivoirien….

S’installe l’idée que Paris a été extrait de l’Histoire pour n’être plus qu’un espace ou lieu ou endroit au sein d’une géographie nationale qui est, reste encore hexagonale (temporaire ?). Paris n’est plus la ville politique puisqu’elle n’est plus capitale au sens où s’y tenait et s’exerçait la souveraineté, celle-ci déléguée à Bruxelles (Union européenne, OTAN) et aussi aux organisations internationales gouvernementales ou pas. La société parisienne est morte, s’installe et s’y déploient les « va-et-vient ». Autant Londres ou Rome garde son identité, autant Paris la défait avec la complicité de l’État. Ainsi, voir l’Élysée et l’Hôtel de ville, Emmanuel Macron et Anne Hidalgo, deux têtes d’un même corps, deux mégalomanes, se crêpant le chignon pour les Jeux Olympiques de 2024 tout en s’accordant sur le fond : il serait cynique de voir Paris mis sous tutelle par un État lui-même sous la "tutelle" d’autres….

Quand j’écrivais quelques lignes plus haut que Paris n’était plus politique et donc intellectuelle, j’entendais que depuis l’après-mai 68, les exécutifs successifs, par peur d’une secousse nouvelle, entreprirent le déplacement les universités et grandes écoles hors du centre de Paris : c’était la première étape de l’évidement parisien (en même temps que la fin des halles, ventre de la ville) L’intellect est en 2022 dispersé autour de la ville, son émiettement empêche toute coalition. La seconde étape a été avec la disparition progressive de la société issue de la guerre, l’évidence de l’attractivité américaine comme adhésion intellectuelle et économique et géopolitique sur fond d’hédonisme de société du spectacle (divertissement). La troisième étape a été et est ce qu’on appelle la construction européenne. La quatrième étape, est l’appel d’air lancé par la mairie de Paris avec la bénédiction étatique : « migrants du monde venez à Paris ». La cinquième étape dans laquelle nous sommes est cette illusion écologique telle que l’on nous l’expose et nous l’assène qui s’apparente plus à un rêve de bobo aseptisé imaginant la vache à l’étage et le blé sur le toit…De Paris, il ne reste que des parcs aux herbes rares, un bétonnage délirant dont les corollaires sont la saleté, l’insécurité quotidienne…. et le tout à l’avenant.

L’identité parisienne comme celle de l’État est en jachère : les aménagements des Champs-Élysées, du Champs-de-Mars/Trocadéro, des places sont dans cette ligne quand elles ne sont pas sous la houlette d’une multinationale (Champs-Élysées/LVMH) qui n’y voit que son intérêt publicitaire propre et l’impose autant à la mairie qu’à l’exécutif. Les Jeux Olympiques de 2024 devront être le point d’orgue ou le point culminant de la déconstruction de Paris. Paris sera dans Eurodisney, une attraction parmi d’autres, un divertissement plat…

L’arasement identitaire de Paris va de pair avec celui de l’Élysée (siège présidentiel), il fait place à la jachère, c’est un attelage dramatique mais souriant et hédoniste qui n’a plus que le pain, des jeux et des lois de surveillance liberticides

Jean Vinatier

Seriatim 2022

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