Info

Nouvelle adresse Seriatim
@seriatimfr
jeanvin22@gmail.com



lundi 19 mai 2008

Chine et Myanmar : ondulations N°207 - 1ere année

Cyclone au Myanmar, tremblement de terre en Chine ! Voilà deux régimes, l’un dictatorial, l’autre très autoritaire contraints de tenir compte de l’aide proposée par les autres nations à leur population respective.
La Chine soutient le régime des généraux birmans et s’y considère quelque peu « suzeraine » ce que conteste l’Inde tandis que la Thaïlande noue d’importants contacts économiques et que Singapour sert de courroie financière aux dirigeants birmans.
Cependant, si le régime de Myanmar fait preuve d’une quasi-fermeture à l’aide étrangère et accepte de facto de voir une partie de sa population dépérir, la Chine montre, apparemment, une disposition plus souple pour accueillir les formes de soutien à ses concitoyens du Sichuan.
Pourtant le Sichuan comprend une partie du Tibet historique, zone très sensible ces derniers temps pendant la révolte des moines. Il n’est pas très éloigné de la ville de Changqing situé sur le Yang-Tsé( Yanzi Jiang) juste en amont du barrage des Trois gorges, fierté du PCC et qui ne semble pas avoir été touché par les secousses.
Le gouvernement central ayant en vue la bonne tenue des Jeux Olympiques, constatant l’empressement des sociétés occidentales à vouloir fournir argent et outils opte pour une politique de communication habile¹. Elle lui permet d’offrir un contraste avec les dirigeants birmans (ses alliés), de donner un gage suffisant au monde extérieur et de le convaincre (à demi) d’avoir retenu la leçon des événements tibétains et du parcours chahuté de la flamme olympique. Le deuil national de trois jours s’il réaffirme le nationalisme chinois est aussi un signal envoyé à l’extérieur : nous Chinois, nous sommes unis !
Le Myanmar serait-il laissé à la dérive ? Quand Bernard Kouchner propose une « intervention humanitaire massive » on supposerait presque que les rôles ont été distribués !
On imagine bien la tentation pour Washington d’opérer une révolution dans ce pays par sacs de riz interposés. Si cela survenait, les Etats-unis, qui prendraient naturellement la tête de cette coalition humanitaire, avanceraient leurs pions contre la Chine. Mais ils ne sont plus en état. Premièrement, monter une coalition serait difficile tant leur crédit moral est exsangue dans le monde entier : on ne peut à la fois dénoncer la dictature birmane et envahir un pays (Mésopotamie) hors les lois internationales et sur un mensonge (ADM²), torturer à Guantanamo et dans différentes bases dont celle située au sud du Kosovo (Bondsteel) au mépris des droits fondamentaux -. Deuxièmement, les états de l’Asie du sud-est, se souvenant des guerres d’indépendance, froncent le sourcil en écoutant la morale occidentale.
Il n’empêche, les Birmans souffrent ! On est dans le cynisme le plus complet. Chacun des acteurs est, néanmoins, contraint de faire des concessions. A l’heure d’Internet, nul régime dictatorial, ne peut maintenir fermée sa porte à double tour. Dans le cas du Myanmar, le légère entrouverture tient exclusivement à la géopolitique et aux intérêts sino-indiens sans oublier le poids de compagnies privées comme
Total qui est partie prenante dans le gazoduc birmano-thaïlandais³ et participe, ainsi, à la pérennité du régime militaire.
La Chine et le Myanmar essaient les parades adéquates pour déjouer la pénétration d’une puissance étrangère. Pense-t-on que les autorités officielles chinoises tolèreront des « intrus » dans une province située au milieu du pays ? C’est là l’enjeu, ne nous y trompons pas un seul instant. La facilité avec laquelle le parti communiste chinois autorise les images du Sichuan dévasté ne doit rien à une spontanéité, elle obéit à une nécessité d’ordre politique extérieur et intérieur. Les populations touchées cruellement par le cyclone et le séisme servent, en partie, à arbitrer des influences et des intérêts stratégiques, économiques. On remarquera, tout de même, que dans ces deux pays les ONG n’ont pas de liberté de manœuvre tant elles paraissent suspectes. Les ondulations sino-birmanes ne doivent donc rien au hasard. Ces régimes gagnent du temps mais pour la Chine, confrontée à son « premier désastre humanitaire de la génération de l’enfant unique »4, , qui la place devant un défi social (paysan) et familial sans précédent. Son futur séisme ?


©Jean Vinatier 2008

Commentaires : Si vous n’avez pas de compte Gmail, et pour éviter le noreply-comment veuillez envoyer vos commentaires à :
jv3@free.fr

Notes :
1-Pékin a menacé de rendre plus difficile l’octroi du visa affaire et notamment pour les Français.
2-ADM : arme de destruction massive

Sources :

Martine Bulard :
http://blog.mondediplo.net/2008-05-18-Le-bling-bling-humanitaire-frappe-aussi-la
RonyBrauman :
Robert D.Kaplan :
http://www.iht.com/articles/2008/05/14/opinion/edkaplan.php?page=1

3- Eric Charmes, « Total et le gazoduc birmano-thaïlandais », FLUX, n°70/2007/4, p.59-64
4-in Sylvie Kaufmann, Lettre d’Asie , « Uniques et disparus » in Le Monde, 20 mai 2008

In Seriatim :

http://seriatim1.blogspot.com/2007/09/entre-chine-et-inde-le-myanmar.html
http://seriatim1.blogspot.com/2008/03/pays-des-neiges-du-grand-ouest-chinois.html
http://seriatim1.blogspot.com/2007/12/linde-dsillusion-gopolitique.html

Aucun commentaire: