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samedi 17 mai 2008

Pierre Reverdy (1889-1960) : 2 poèmes N°206 - 1ere année

« De sa naissance à sa mort, et plus loin, jusqu’à nous, Reverdy n’a jamais bougé. Je veux dire qu’il n’a jamais reculé, n’a jamais cédé un pouce de terrain, n’a jamais transigé sur un mot »¹

L’un des poètes les plus mystiques du XXe siècle français est né dans une famille de sculpteurs et plus précisément de tailleurs de pierre d’église. Monté à Paris en 1910, il fréquenta, naturellement à Montmartre le bateau lavoir. Il y noua de solides amitiés avec les figures les plus en vue d’alors dont : Guillaume Apollinaire, Aragon, André Breton, Tristan Tzara, Pablo Picasso, Georges Braque, Henri Matisse. L’espace d’une année (1917-1918) il créa et dirigea la revue de poésie, Nord-Sud qui publia des surréalistes et des dadaïstes. En 1926, il se retira dans l’abbaye de Solesmes avec son épouse. Il y mourut en 1970.


« Un homme fini in La balle au bond (1928)

Le soir, il promène, à travers la pluie et le danger nocturne, son ombre informe et tout ce qui l’a fait amer.
A la première rencontre, il tremble –où se réfugier contre le désespoir ?
Une foule rôde dans le vent qui torture les branches, et le Maître du ciel le suit d’un œil terrible.
Une enseigne grince –la peur. Une porte bouge et le volet d’en haut claque contre le mur ; il court et les ailes qui emportaient l’ange noir l’abandonnent.
Et puis, dans les couloirs sans fin, dans les champs désolés de la nuit, dans les limites sombres où se heurtent l’esprit, les voix imprévues traversent les cloisons, les idées mal bâties chancellent, les cloches de la mort équivoque résonnent. »

« Chemin tournant in Sources du vent (1929)

Il y a un terrible gris de poussière dans le temps
Un vent du sud avec de fortes ailes
Les échos sourds de l’eau dans le soir chavirant
Et dans la nuit mouillée qui jaillit du tournant
Des voies rugueuses qui se plaignent
Un goût de cendre sur la langue
Un bruit d’orgue dans les sentiers
Le navire du cœur qui tangue
Tous les désastres du métier

Quand les feux du désert s’éteignent un à un
Quand les yeux sont mouillés comme des brins d’herbe
Quand la rosée descend les pieds nus sur les feuilles
Le matin à peine levé
Il y a quelqu’un qui cherche
Une adresse perdue dans le chemin caché
Les astres dérouillés et les fleurs dégringolent
A travers les branches cassées
Et le ruisseau obscur essuie ses lèvres molles à peine décollées
Quand le pas du marcheur sur le cadran qui compte
Règle le mouvement et pousse l’horizon
Tous les cris sont passés tous les temps se rencontrent
Et moi je marche au ciel les yeux dans les rayons
Il y a du bruit pour rien et des noms dans ma tête
Des visages vivants
Tout ce qui s’est passé au monde
Et cette fête
Où j’ai perdu mon temps »


Note:

In Main d’œuvre, recueil de poèmes 1913-1949,Paris, Mercure de France, 1949.
On y retrouve:
La balle au bond, Marseille, Les Cahiers du Sud, 1928
Sources du vent, Paris, Maurice Sachs (éd), 1929

Sources :
1-
http://poezibao.typepad.com/poezibao/2006/10/dossier_pierre_.html
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