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mardi 7 juillet 2009

Turkestan Oriental ou le Xinjiang entre Ouïgour, sunnisme et pétrole – N°497- 2e année

Les dernières émeutes intervenues dans plusieurs villes du Xinjiang dont la capitale Urumchi, ont été violentes, sanglantes -Pékin annonce 156 morts et des arrestations massives-.
Les « Ouïgours » du Xinjiang ex-Turkestan oriental, s’insurgent contre le pouvoir chinois, impérial puis communiste depuis des lustres. Pékin encourage l’installation de l’ethnie chinoise majoritaire Han au détriment des habitants du Xinjiang appelés « Ouïgours » depuis 1921. Lors du congrés soviétique des nationalités tenu à Taskhent en 1921, Sergej Efimovitch Malov désigna par l’ethnonyme « Ouïgour » l’ensemble des populations du Xinjiang. Depuis cette date, les « Ouïgours » désignent tous ses habitants.
Cette précision historique rapportée par l’éminente anthropologue Françoise Aubin dans un passionnant numéro de la revue
CEMOTI consacré à cette question¹ rappelle à point nommé que les Ouïgours du XXIe siècle sont de lointains descendants du peuple Ouïgour de l’empire des steppes qui occupait la Mongolie jusqu’à sa destruction par les Kirghizes au IXe siècle. Ce peuple migra vers l’ouest, s’installa dans les oasis du Turkestan. Devenu sédentaire, pacifique, curieux en croyance, il passe successivement au cours des siècles, de la religion manichéenne au bouddhisme et au christianisme nestorien puis enfin, à l’islam sunnite grâce aux Turcs de culture iranienne. Acceptant la suprématie mongole (plus tard turco-mongole), les Ouïgours se fondirent parmi les différents peuples du Turkestan. Les dynasties chinoises tentèrent, après les Tibétains de conquérir le Turkestan. Ce n’est qu’en 1759 que Pékin parvint à ses fins mais sans réussir à contenir toutes les révoltes qui éclatèrent périodiqument. En 1863, un royaume du Turkestan vit le jour, reconnu par la Russie, l’empire Ottoman et le Royaume-Uni. Mais Londres – qui tentait d’entrer également en Chine par le Tibet – craignant que Saint-Peterbourg n’annexe ce royaume décide la Chine de le reconquérir en 1877. C’est donc seulement en 1884 que le Turkestan prit le nom de Nouveaux territoires ou Xinjiang.
Entre cette date et aujourd’hui, l’identité « Ouïgoure » a fait son chemin au détriment du Turkestan ou « Route de la Soie » dénomination crée au XIXe siècle par le géographe allemand, Ferdinand von Richthofen.
Au-delà de la question « Ouïgoure » interviennent la géographie et son sous-sol.
Le Turkestan Oriental, région d'Asie centrale délimitée au nord par les steppes du Kazakhstan et le massif de l'Altaï, à l'est par la Mongolie et le Tibet, au sud par l'Inde, le Pakistan, l'Afghanistan et l'Iran enfin à l'ouest par la mer Caspienne, est la région autonome chinoise la plus grande devant le Tibet, la Mongolie intérieure et le Guanxi.
Le sous-sol du Turkestan Oriental est très riche avec ses gisements pétrolifères de 410 790 km², une réserve de pétrole de 8,2 milliards de tonnes et 2,5 millions de m3 de gaz naturel !
En 1913 le consul russe Sokov n’écrivait-il pas dans un rapport adressé au gouvernement de Nicolas II:
« Parmi les minéraux que l'on peut extraire ici, il faut noter l'or, l'argent, le cuivre, le plomb, le fer, l'alun, le soufre, le sel, le charbon, l'albâtre, l'asphalte, et diverses sortes de marbre. On trouve aussi presque partout du charbon de terre. Il faut aussi signaler le naphte en assez grande quantité…On peut dire sans exagérer qu'il y a beaucoup de ressources minières et, si des entrepreneurs hardis, disposant de capitaux comme mise de fonds, se rendaient dans la région, ils pourraient tirer du sous-sol des richesses qui par leur quantité étonneraient le monde » ²
Le Xinjiang devient l’enjeu d’intérêts géostratégiques. La Chine joue la carte du pétrole et accorde une attention toute particulière aux collaborations « harmonieuses » avec les puissances régionales. Le Japon propose d'établir une nouvelle Route de la soie pétrolière du XXIe siècle. La Russie essaie de placer sur un même plan le pérole du Xinjiang et celui de la Sibérie. Le Kazakhstan noue des partenariats entre Pékin et Moscou. Le Pakistan entre dans la danse ainsi que l’Inde. En fait, le parti communiste chinois espére construire tout un réseau de distribution inter-asiatique qui lui assurerait une suprématie et une indépendance énergétique plus forte. N’est-ce pas le vœu de toutes les nations asiatiques d’être indépendantes de celles de « Ouest ou de l’Occident » ?
Les sociétés pétrolières occidentales ont longtemps rechigné à investir dans le Xinjiang dont l’infrastructure est à construire de A à Z. Ajoutons un bémol, Pékin n’a accepté de « dévoiler » le secret du pétrole du Xinjiang que depuis les années 1990.
L’instabilité de la région du Xinjiang a depuis longtemps interessé Washington : il y a sur son sol un parti du Ouïgouristan libre. L’arme ethnique peut être considérable mais à double tranchant. Les Etats-Unis mesurent avec plus de prudence l’usage de cette dernière depuis l’Irak, le Pakistan et l’Aghanistan.
Il est certain que les Chinois et les Russes comprennent très bien que le Xinjiang et la Sibérie, par leurs richesses additionnées doivent les conduire à élaborer des coopérations audacieuses.
Qu’en sera-t-il des Ouïgours ? Les Ouïgours, par leurs combats, ont permis que se forme une identité commune à l’ensemble du Turkestan avec un islam sunnite trés influencé par le soufisme ce qui éloignerait, a priori, toute radicalité. Quelque part, les Ouïgours ne recréent-ils pas l’antique Turkestan ?
L’Ouest fait le lien entre le Tibet et le Xinjiang, deux régions stratégiques majeures chinoises et encouragé par certains cercles néo-conservateurs, croit possible d’affaiblir la Chine. L’Ouest ne devrait pas oublier que le jeu de go est chinois……


Jean Vinatier

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Cartes :


Population et richesses du Xinjiang :

http://www.monde-diplomatique.fr/cartes/chine200202


Route de la soie
http://fr.wikipedia.org/wiki/Fichier:Seidenstrasse_GMT_Ausschintt_Zentralasien.jpg


Sources :

1-In Françoise AUBIN, «L'arrière-plan historique du nationalisme ouïgour. Le Turkestan oriental des origines au XXe siècle*», in Cemoti, n° 25 - Les Ouïgours au vingtième siècle, URL :
http://cemoti.revues.org/document42.html

In les Ouïgours au vingtième siècle :
http://cemoti.revues.org/sommaire789.html

2- In Hamide Khamraev :
http://cemoti.revues.org/document58.html



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