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lundi 17 janvier 2011

« Tunisie : Voilà de quoi est capable la Jeunesse » N°829 4e année

Je reproduis un article d’un journaliste congolais, Patrick Eric Mampouya. Tout le monde a les yeux rivés sur le monde arabo-musulman oubliant un peu vite que la Tunisie se situe en Afrique. En Afrique Noire, aussi, la révolution tunisienne pourrait électriser !


« Mohamed BOUAZIZI Héros de la révolution Tunisienne
Voilà ce qui arrive quand un régime "suffisant" et autiste refuse de voir que sa population n’a plus les mêmes aspirations que ceux qui prétendent la gouverner.
Les mêmes causes produisant les mêmes effets, le cas de la Tunisie fera nécessairement tache d’huile….
A présent la question de l'emploi des jeunes sera l'élément moteur de toutes les contestations sociales dans la majorité des pays dirigés par des pouvoirs dictatoriales et autocratiques.
La Côte d’Ivoire (toutes tendances confondues) a rêvé d’un changement politique d’envergure, la Tunisie l’a fait. "Tunisie amie" : c’était la formule laconique d’une pub de tour opérator vantant le statut hautement touristique de ce pays. Aujourd’hui, tous les damnés de la Terre aiment la Tunisie. Pas pour le tourisme mais pour tous les risques que son peuple a pris avec succès.
Il y a encore une semaine, le pays ami, c’était la Côte d’Ivoire, laboratoire de la révolution anti-françafrique. Mais la tournure lassante que prennent les évènements dans ce pays a désenchanté chacun.
Comme l’histoire est capricieuse !

Figurez-vous que Marx avait prévu la révolution communiste de 1917 en Angleterre. Au bout du comte elle est arrivée en Russie. Les Africains avaient encore récemment tout misé sur la Côte d’Ivoire, bastion de la résistance contre la nébuleuse appelée "Communauté Internationale" et sa pléiade de dictateurs placés en Afrique comme des pions sur un jeu d’échec avec ses rois, ses reines et ses fous.
La Tunisie a coiffé la Côte d’Ivoire au poteau. Ben ALI, le tombeur de BOURGUIBA est lui-même tombé, emporté par les effets de sa propre dictature. Véritable fou (aussi fou qu’Omar BONGO), Ben ALI, au pouvoir depuis 25 ans, n’a pas hésité de tirer sur la foule de manifestants qui en voulait à son pouvoir.
Après avoir promis qu’il n’allait plus postuler pour un énième mandat en 2014, il croyait amadouer ses compatriotes. 24 h après sa promesse de gascon, le tyran chérifien a finalement pris la tangente vers une destination connue pour abriter les potentats africains : les Emirats Arabes.
La chute de ce baobab du Maghreb a fait saliver de plaisir les peuples des pays d’Afrique qui ont à leur tête des Présidents à la longévité politique excessive. Autant dire, tous, sauf les ghanéens, une exception culturelle au milieu d’un vaste réseau de populations à la merci de dictateurs déments.

Congo-Tunisie

Les similitudes extravagantes de la Tunisie de Ben ALI avec le Congo Brazzaville de Denis SASSOU NGUESSO sont frappantes. A part le développement économique que même les observateurs les plus critiques ne dénient pas au pays du dictateur déchu, népotisme, despotisme, kleptomanie, dérives, délires, démesure caractérisent les régimes de Denis SASSOU NGUESSO et de Ben ALI. Et les Congolais (plus que tous les autres Africains) de songer avec une soif indescriptible à un scénario à la tunisienne.
"Ils l’ont fait !" se sont dits les Congolais en songeant au sort que les Tunisiens ont réservé à un Président réputé cruel et invincible. Mais alors s’ils "l’ont fait" c’est que "nous aussi, on peut le faire" ; une équation politique pas forcément logique mais à laquelle l’énergie du désespoir donne crédit.
C’est que les déterminations ne sont pas les mêmes selon que le mouvement social concerne les Congolais ou les Tunisiens, les Africains au sud du Sahara ou les Africains du Maghreb.
La crise tunisienne a démarré suite à des revendications banales de type alimentaire. Puis l’étincelle est devenue immense brasier, un vaste incendie alimenté par les actions concertées d’une multitude de groupes de pression structurés et de groupes informels. Or les Congolais, échaudés par plusieurs guerres civiles et par un pouvoir politique féroce, ont désormais peur du moindre bruit de bottes.
Mais en même temps, le cas tunisien a démontré qu’aucun régime, fut-il foncièrement militarisé et profondément policier, n’est immuable. D’où cette soudaine mobilisation lisible dans la diaspora africaine, particulièrement congolaise.
"Tia bwa landakana" (battre le fer quand il est chaud), ha ba dila nguba ni ha ba sukula nwa. Autant d’invitations à une prise de conscience dans une situation de crise politique internationale. Il y a la Cote d’ivoire, il y a la Tunisie, l’Algérie. A qui le tour ?

Courage, fuyons !

Sans être dans le secret des Dieux, on peut néanmoins imaginer l’impact de la révolution tunisienne chez les homologues congolais du clan Ben ALI.
On a vu que les membres du clan Ben ALI tiennent à leur vie et, la fuite est une stratégie de survie qu’ils ont mise en pratique. Certains avec succès, d’autres non.
Antoinette SASSOU NGUESSO a dû s’intéresser au mode de gestion de sa sauvegarde développée par l’épouse de Ben ALI face à la vindicte publique. On dit (Libération du 14 janvier 2010) que Mme ALI Ben avait déjà filé à l’anglaise vers Dubaï quand ça commençait à sentir le roussi.
La question est la suivante : les Willy, Kiki et autre Edgar NGUESSO ont –ils songé à assurer leurs arrières ? La réponse est sans doute Oui !

L’exil sera dur

Lieu classique d’asile des dictateurs ayant échappé à la mort dans leurs pays respectifs, la France a fermé ses portes à Ben ALI. Exit le pays de l’ami SARKOZY. Avec l’affaire des biens mal acquis, le clan NGUESSO devrait, dans ce cas, envisager un autre lieu d’exil si jamais les Congolais sifflent, comme en Tunisie, la fin de la partie.

Faut-il s’étonner du silence français ?

Par Emmanuel MARTIN
Alors que les éditos s’enchaînent sur la question du silence, non pas de la France, mais de son exécutif sur la question des violences en Tunisie, la Ministre française des Affaires étrangères a déclaré que la France pourrait prêter son savoir-faire à la Tunisie, et à l’Algérie, pour... sécuriser les manifestations.
La patrie des droits de l’homme va aider des dictateurs à "encadrer" la révolte légitime de leur peuple ? Ce ne serait pas la première fois. La "pacification" new look en somme. N’est-ce pas finalement dans la continuité non seulement de la politique africaine de la France depuis les indépendances, mais aussi d’une vieille tradition française profondément anti-libérale ?

L’ami Ben ALI

En effet, interrogée mardi 11 janvier dans l’hémicycle par le député Jean-Paul LECOQ sur "cette incohérence de notre pays : d'un côté la France appelle au respect de la démocratie en Côte d'Ivoire alors que de l'autre elle soutient de manière indéfectible la dictature de M. Ben Ali" Michèle ALLIOT-MARIE, Ministre des Affaires étrangères a pu déclarer dans sa réponse, qui inclut l’Algérie, : "Nous proposons que le savoir-faire qui est reconnu dans le monde entier de nos forces de sécurité permette de régler des situations sécuritaires de ce type... C'est la raison pour laquelle nous proposons aux deux pays dans le cadre de nos coopérations, d'agir en ce sens pour que le droit de manifester puisse se faire en même temps que l'assurance de la sécurité". En bref, allons aider Ben ALI en Tunisie et les généraux en Algérie à rester au pouvoir, mais en faisant un peu moins de morts ?
Après tout, pour Michèle ALLIOT-MARIE, en France "nous n’avons pas nous ériger en donneurs de leçons". Ou quand ça nous arrange donc. Et Michèle ALLIOT-MARIE n’est pas la seule : Frédéric MITTERRAND, qui n’a décidément rien à envier à son tonton en matière de soutien aux dictatures, estimait lui dimanche sur Canal + que "dire que la Tunisie est une dictature univoque, comme on le fait si souvent, me semble tout à fait exagéré".
Pour Luc CHATEL comme pour le porte-parole du gouvernement François BAROUIN, "la France n’a pas à s’ingérer dans les affaires de la Tunisie". Quand à Éric BESSON, si prompt à aboyer en matière d’immigration, et qui donc devrait avoir au moins réfléchi aux causes de l’immigration, il n’a soudainement "pas d’avis particulier sur la situation en Tunisie".
Même quand, un peu plus tard, un professeur d'informatique à l'université de technologie de Compiègne, Hatem BETTAHAR, est tué par des tirs de la police à Douz ? Enfin le premier Ministre François FILLON s’exprime pour s’alarmer de "l'utilisation disproportionnée de la violence". (Selon la Fédération internationale des ligues de droits de l'homme (FIDH) il y aurait eu alors 66 morts depuis le début du mouvement de protestations).
Le premier ministre François FILLON a ainsi appelé "l'ensemble des parties à faire preuve de retenue et à choisir la voie du dialogue". Le "dialogue" ? En Tunisie ? M. FILLON est visiblement mal informé : le dialogue suppose que les deux parties puissent s’exprimer, il suppose la liberté d’expression. Bien sûr, il ne s’agit pas ici de prôner la révolution en appelant à la violence et à la destruction plutôt qu’au dialogue, mais simplement de critiquer la fausse naïveté d’un premier ministre.
Ce manque total de principes, cette "hyper Realpolitik", tout cela est consternant. L’ami de la France, c’est le peuple tunisien, opprimé depuis trop longtemps ; et non un dictateur qui étouffe son peuple au nom d’un développement en partie illusoire et pour protéger ses intérêts corrompus. Quant à l’argument "Ben ALI plutôt que les islamistes", il ne vaut pas grand’ chose : l’intégrisme religieux pousse sur le terreau de l’oppression.

SARKOZY et les dictateurs africains

Il aurait donc fallu condamner la répression sanglante. Mais le gouvernement français ne fait que suivre la ligne de son Président. Et ce Président ne fait que suivre la ligne de ses prédécesseurs.
On se souvient pourtant un soir de victoire électorale, un certain Nicolas SARKOZY faisant un vibrant appel "à tous ceux qui sont persécutés par les tyrannies et les dictatures" : La France serait "du côté des opprimés du monde".
En recevant KADHAFI sur les pelouses de l’Élysée ? En soutenant sans le dire Ali BONGO ou Denis SASSOU NGUESSO dans des élections tripatouillées en 2009 ? Ou Ben ALI en 2008 en Tunisie, pays où "l’espace des libertés progresse", car "tout n’est pas parfait en Tunisie, certes. Tout n’est pas parfait en France non plus". Oui, visiblement, tout n’est pas parfait en France non plus...

La France anti-libérale

Le vice français est profond : c’est la suspicion à l’égard de la liberté individuelle. Qu’on ne s’y trompe pas : la gauche française soutenait un système qui marchait au goulag et au laogaï. Par humanisme paraît-il. La voir critiquer aujourd’hui le soutien gouvernemental à Ben ALI fait donc sourire. Elle n’a rien à envier à une droite conservatrice : droite comme gauche françaises sont viscéralement anti-libérales.
Contre la liberté entrepreneuriale qui seule permet le développement, elles défendent le monopole (caractéristique d’ailleurs de ce système mafieux qu’on nomme la Françafrique), ainsi que le dirigisme et l’étatisme, qui mènent à l’autoritarisme et au flicage.
Quand le jeune BOUAZIZI s’est immolé, c’est pour le droit de vendre des fruits et légumes pour subvenir aux besoins de sa famille alors que des policiers lui avaient confisqué son matériel.
Les Tunisiens ne sont pas anarchistes : ils veulent simplement que leur État corrompu arrête de "s’ingérer dans leurs affaires", qu’il les laisse respirer. Enfin. »



Jean Vinatier
Copyright©SERIATIM 2011

Source:


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