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vendredi 28 septembre 2007

Orient/Occident. N°42 - 1ere année

« Au Proche Orient, j’ai conversé avec un grand nombre d’habitants des pays du nord et de l’ouest de l’Europe, de ces pays qui sont aujourd’hui en possession de tous les pouvoirs et de tous les savoirs, dont les armées ne peuvent rencontrer aucune résistance, et dont les flottes gouvernent les régions les plus lointaines du globe. Quand je compare les habitants de ces nations aux natifs de notre royaume et de ceux qui l’entourent, il semble presque que ceux-ci appartiennent à une autre espèce. Chez eux, il est difficile d’espérer quoi que ce soit qui ne doive pas être obtenu : mille arts, dont nous n’avons même pas l’idée, concourent à leur confort et à leur plaisir ; et ce que leur climat leur a refusé, ils le gagnent par leur commerce.
Comment les Européens, dit alors le Prince, peuvent-ils être aussi puissants ? Ou pourquoi, s’ils peuvent aussi aisément atteindre l’Asie ou l’Afrique à des fins de conquêtes ou de commerce, les Asiatiques et les Africains ne peuvent-ils pas en retour envahir leurs côtes, implanter des colonies dans leurs ports et imposer des lois aux princes naturels de ces peuples ? Les mêmes vents qui les conduisent vers nous devraient aussi nous porter vers eux.
Sire, répondit Imlac, ils sont plus puissants que nous, car ils sont plus sages ; le savoir dominera toujours l’ignorance, comme les hommes dominent les animaux. Pourquoi leur savoir est-il supérieur au nôtre ? Cela, j’ignore quelle raison peut-être donnée, sinon une volonté impénétrable de l’Être Suprême. »
L’extrait du livre de l’écrivain anglais Samuel Johnson, Histoire de Rasselas, prince d’Abyssinie, paru en 1759 met en scène le poète Imlac qui accompagne son prince dans son périple oriental. Il rend compte de l’état du monde.
Depuis la traduction de l’arabe en français des
Mille et une nuits par Antoine Galland en 1706 - en anglais en 1713 -, le conte oriental est une mode qui occupera une large part du XVIIIe siècle jusqu’à Vathek de William Beckford S’il ne prétend nullement rapporter une vue précise de l’Orient( Asie) – que peu de gens connaissent alors – il confirme aux européens, notamment, leur supériorité sur les peuples asiatiques.
Qu’écrirait en 2007, un auteur de cette partie émergente du monde ? Faisons cette petite réflexion à l’envers!
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jeudi 27 septembre 2007

Les 38 000 deniers du juge Burgaud. N°41 - 1ere année

L’affaire Outreau s’enfoncerait presque dans la longue nuit des erreurs judiciaires si l’attention scrupuleuse d’un juge très sensible à tout ce qui touche sa personne ne la ramenait pas sur le devant de la scène publique. Que se passe-t-il ?
En 2006, Libération publie un article dans lequel l’auteur fait une comparaison entre le juge et le nazi Eichmann. Un an plus tard, le tribunal de Nanterre accorde 30 000 euros de dommages et intérêts au magistrat. Le 25 septembre dans la même enceinte, ce sont 8 000 euros qui lui reviennent par la condamnation d’un journaliste et du directeur de Télérama pour l’avoir comparé à un « Ben Laden d’un mini 11 septembre ».
Première remarque, il est étonnant qu’un directeur de publication laisse ses journalistes établir des comparaisons douteuses et dangereuses. Quelles que soient les fautes gravissimes de ce juge, le placer sur le même plan qu’un nazi, parfaitement organisé, ordonné et un Ben Laden assurant avec une maîtrise complète les attentats contre les Twins, intrigue beaucoup. Il y a - et c’est indéniable- une faute professionnelle de la part des journalistes lesquels ne savent pas comparer ce qui se compare.
Deuxième remarque, les attendus des magistrats dans les deux jugements n’épargnent pas la critique envers leur collègue.
Troisième remarque, le montant total des dommages et intérêts indispose véritablement. L’euro symbolique eut suffit tant l’énormité de l’erreur judiciaire secoua toute la magistrature, tout le peuple français. Faute donc de la part des magistrats qui répond, presque, à celle des journalistes.
Rappelons-nous que la presse et la justice ne regardèrent le drame qui se jouait à Outreau que bien longtemps après le début de l’engrenage judiciaire. Assistons-nous à un rattrapage ? D’un côté, la presse contre Burgaud, en face le corps de justice protégeant de son hermine un des siens ? Le malaise perdure. Que pensent les familles d’Outreau en voyant celui qui fut leur « ennemi » farouche, terrible, imperturbable gagner des sommes importantes sur des faits, certes condamnables mais à replacer dans l’ensemble de ce drame ? N’oublions pas que cet homme repoussa l’idée de s’excuser devant les treize malheureux.. Ne gommons pas sa morgue devant la commission parlementaire le 8 février 2006. Pendant sept heures, il ne varia point. Il se tint coi. Toute sa défense tint dans l’application de la procédure. Ce goût pour l’exactitude mathématique sans l’ombre de la réflexion fait froid dans le dos. Le soin qu’il prit à se placer derrière un code et sa qualité de magistrat glace le sang. Devant ses pairs il jeta à leur face son absence de faute puisqu’il avait suivi à la lettre la procédure.
Les 38 000 deniers du juge Burgaud appellent à la pudeur, la sienne.

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mercredi 26 septembre 2007

Un cœur à prendre : la Palestine ? N°40 - 1ere année

En bas de l’estrade des Nations-Unies (c’est une image) pendant que le Président français propose le New Deal planétaire, Mahamoud Abbas parle à Georges Bush de l’avenir des territoires palestiniens. Comment se fera la conférence dite de Washington à la moitié de novembre prochain ? Si le public ignore la réponse des USA, le président palestinien ne dissimule ni ses plaintes, ni les peines de demain pour son peuple.
Depuis de si longues décennies, le Proche Orient est « au cœur » des négociations. Quelle est la puissance régionale qui n’a pas « à cœur » de résoudre le problème ? Quelle est la puissance internationale qui n’a pas trop de mots pour parler « à cœur » ouvert ? Cette expression retient l’attention d’abord sur le plan diplomatique, ensuite sur le plan linguistique, enfin, dans le langage médiatique. Est-il utile de développer la notion « au cœur » ? Mieux vaudrait épargner une peine supplémentaire aux Palestiniens en détaillant tous les sens que l’on donne à « au cœur ». Dans le même moment, l’honnête homme est déçu par la façon dont l’homme traite aussi cyniquement ce qui lui tient à cœur !
Pour les chrétiens la Palestine est au cœur de leur héritage pluriséculaire. Idem pour les Hébreux, pour les Arabes qu’ils soient musulmans ou non tant l’évidence de ce Proche Orient pèse sous chacun de leurs pas ! Cette Palestine agit tel un aimant sur nos esprits « occidentaux » lesquels répugnent à regarder à égalité même leurs frères chrétiens orientaux ! Contradiction supplémentaire.
Dans l’absolu, les Etats-Unis ont la capacité à résoudre la problématique Proche Orientale ; or leur intérêt général conduit à entretenir une tension favorable à des desseins géopolitiques semblables à d’autres répartis sur la planète. L’élément religieux, même s’il est certain, occupe une place modeste exception faite de la nécessité politique de l’heure. Dans l’absolu les puissances arabes peuvent dépassionner le débat. Dans l’absolu les Israéliens ont le pouvoir de déclarer la fin définitive de la revendication territoriale. Les Palestiniens sont les seuls à n’avoir pour absolu que d’être seulement reconnus. Hélas pour eux, ils sont ce cœur terrible décrit et annoté par les diplomates, les hommes d’état. Les Palestiniens sont ce cœur palpitant auquel on refuse toute médecine.
Quelle est leur place dans le New Deal planétaire français ou autre ? Les Palestiniens forment une nation à la suite d'un marché de dupe. Ils veulent aujourd’hui être une réalité. Cette revendication ne convient à aucun des acteurs en place.
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mardi 25 septembre 2007

Si vous avez compris ce que je veux dire, c’est que je me suis mal exprimé ! N°39 - 1ere année

L’intervention du Chef de l’Etat la semaine dernière devait mettre en ordre les principaux chantiers du gouvernement Fillon : économie, social, immigration, politique étrangère, défense, santé, éducation…et, in fine, taire toute dispute avec le Premier ministre ! De ce grand tour que reste-t-il aujourd’hui ?
La présentation du budget pour l’année 2008 est énigmatique, les franchises médicales sont annoncées en hausse pour lutter contre le déficit de la sécurité sociale, le contrat unique est renvoyé aux calendes grecques, la politique dite de l’immigration choisie marquée par les tests ADN volontaires met le feu aux poudres, la politique étrangère est une valse hésitation. Arrêtons la liste des points sur lesquels cette présidence quinquennale peine à trouver, à la fois, le rythme et la logique. Quelques internautes écrivent que les municipales de mars 2008 bloquent en quelque sorte le gouvernement et, même, le parti socialiste dans sa refondation : pense-t-on déjà à 2012 ?
François Fillon, lassé de ne pas compter et apparemment pas satisfait des mots présidentiels lâcha en Corse la phrase fameuse sur l’état en faillite. Etait-ce Calonne à l’assemblée des notables de 1787 qui au détour d’une phrase dit tout de go, c’est la banqueroute ? Christine Lagarde, rabrouée au début de septembre lorsqu’elle parla d’un plan de rigueur pour la fonction publique, regimbe comme pour répliquer aux propos sévères de Nicolas Sarkozy à son endroit. Bernard Kouchner belliciste au crépuscule puis irénique à l’aube sur la question perse et son outil nucléaire avale la couleuvre devant le courroux présidentiel fâché de voir son inclination pour la politique républicaine américaine exposée publiquement. Sur ce point Nicolas Sarkozy osera devant l’assemblée générale de l’ONU dire qu’il aidera tout pays qui opterait pour le nucléaire civil. Etonnante proposition quand on sait qu’un programme nucléaire est par destination autant militaire que civil. A Téhéran les mollahs se caressent la barbe !
Sur des parties essentielles la présidence sème le trouble même si elle sait communiquer, donner l’illusion. La réalité quoique déguisée, grimée n’a qu’un temps. L’opinion publique encore largement favorable à Nicolas Sarkozy du fait même de la déliquescence de la gauche se gratte la tête et incidemment s’interroge. Que nos concitoyens se tranquillisent, nos partenaires européens sont dans l’expectative : ils ne saisissent pas le fonctionnement de la boussole présidentielle. Au café du commerce on demande un second verre de blanc pour saluer la décision du Président d’avoir une croissance de 3%, de l’autre côté des frontières on demande quel mage vit à l’Elysée !
L’entourage de Georges Bush est resté bouche bée en lisant l’interview du Président à l’Herald Tribune (http://www.iht.com/articles/2007/09/24/europe/24sarkozy.php) sur ses conditions pour réintégrer l’OTAN. Il met la barre si haut – et avec justesse – qu’il plaide pour une défense européenne qui impliquerait logiquement la fin de l’OTAN. Or, il s’y refuse : que comprendre ?
Pour le Darfour, il botte Kouchner qui croyait convenir à Washington en s’engageant pour la mise sur pied d’une force internationale capable d’arrêter les massacres dans cette province soudanaise…et protéger une voie sécurisée pétrolière. Le détail est tout autre, Nicolas Sarkozy tient à ce que l’Europe via ses contingents, se place au Tchad et au Centrafrique avec un commandement hors OTAN. Les Anglais boudent et les membres de l’Union ne savent quoi faire. Une fois de plus, nous sommes dans le flou.

L’automne commence, les Français applaudissent le cortège présidentiel et le gouvernement tire la gueule. Claude Guéant et Henri Guaino, respectivement secrétaire-général de l’Elysée et conseiller du Président forment à eux deux le ministère par leurs discours aux médias. Sont-ils le hue et le dia du Palais ? Est-ce normal ? Depuis quand un secrétaire-général et un conseiller ont-ils le pas sur un gouvernement choisi, placé par le Président en personne ? Là encore interrogation !
Nicolas Sarkozy reprendrait-t-il la phrase d’Alan Greenspan citée par Pierre Assouline : « Si vous avez compris ce que je veux dire, c’est que je me suis mal exprimé »
(http://passouline.blog.lemonde.fr/)
Alan Greenspan a été l’artisan de l’émergence de toutes les bulles spéculatives, quelle présidence aurons-nous ?
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lundi 24 septembre 2007

Entre Chine et Inde, le Myanmar N°38 - 1ere année

Largo Winch dans « La forteresse de Makiling » et « L’heure du tigre » traversait la Birmanie (aujourd’hui l’Union de Myanmar) pour sauver son ami Ovronnaz. Dictature militaire, commerce de drogue, ethnies opprimées n’épargnaient pas les nombreux lecteurs de la BD. Imagination ou réalité ?
La période démocratique commencée le jour de l’indépendance, janvier 1948, finit en 1962 par le coup d’état militaire qui amena les généraux à diriger le pays. En 2007, ils ne craignent pas les manifestations journalières des moines bouddhistes et moins encore les larmes du prix Nobel de la Paix, Aung San Suu Kyi, fille du héros de l’indépendance birmane le général Aung San assassiné en 1947. Souvenons-nous qu’en 1988, les Birmans tombèrent par milliers sous les balles des soldats !
Comment tient le régime ? Les généraux exercent une pression accrue sur les « sept races » nationales reconnues (Shan, Môns, Karen, Karenni, Chin, Kachin Rakhine) en usant , notamment, de l’arme de la drogue dont le pays est la plaque tournante avec l’Afghanistan. Les Karen et les Shan sont particulièrement opprimés. La seule répression ne suffirait pas si le Myanmar ne jouissait pas des calculs géopolitiques des acteurs régionaux.
Quels sont les voisins ? Inde, Chine, Thaïlande, Bengladesh, Laos. L’ASEAN, regroupe les nations du sud-est asiatique. Elle veille à maintenir un jeu relativement clos aux Européens et aux Américains : nous sommes entre nous, est un possible résumé. Le Myanmar se moque assez des condamnations internationales tant que sur le plan régional les généraux ne se départissent pas d’une prudence et de la reconnaissance de l’influence de Pékin. Les réserves naturelles, pétrole et gaz, activent la compétition entre l’Inde et la Chine. La construction du pipeline par les Chinois à travers le pays se fait au détriment de New Delhi. Pékin voulant disposer d’une voie de passage, autre que celle du détroit de Malacca, et étant exclusif fournisseur de l’armée birmane, la junte s’inclina rapidement. L’exploration des réserves en gaz est déjà l’objet d’une âpre compétition entre les deux puissances précitées. Le golfe du Bengale, plus précisément la mer d’Adaman, devient stratégique à l’instar du golfe de Thaïlande où les espérances pétrolières et gazières sont importantes.
Face aux généraux qui tiennent entre leurs mains l’économie, les moines bouddhistes paraissent une menace mineure. Ces moines forment des communautés ou Sangah lesquelles constituent le seul contrepoids à la dictature. Le bouddhisme étant la religion de la quasi totalité de la population, l’actuel pouvoir conscient de ce point doit laisser une relative liberté. Le régime, cependant, ne pourra pas esquiver longtemps une réforme structurelle. L’Asie du sud-est qui tient à éviter les conflits inter-régionaux, travaille aussi à présenter une façade démocratique : n’est-ce pas meilleur pour le business ?
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vendredi 21 septembre 2007

Je pose la plume : l’art de se taire ! N°37 - 1ere année

Cette nuit, je laisse un ecclésiastique mondain, l’abbé Dinouart, dire ce qu’il pense des auteurs et de la manie de narrer. Le texte ci-dessous est extrait de L’art de se taire, principalement en matière de religion publié en 1771 à la fin du règne de Louis XV.

« Il faut l’avouer, il n’y a pas de nation pour faire rouler les presses, comme la nation française, et peut-être pour les faire gémir. Les auteurs naissent chez nous comme les champignons, et malheureusement, le plus grand nombre en a toutes les qualités. La nation s’est tournée tout à coup vers l’agriculture, qu’elle n’avait que trop négligée, aussitôt, des essaims d’auteurs agriculteurs ont couvert toutes les campagnes, et la plupart ne la connaissait que par les livres de leurs cabinets. Quelques esprits ont jugé à propos de traiter la matière des finances et les opérations du gouvernement, aussitôt, mille auteurs se sont crus ministres, financiers ; on n’écrivait plus qu’impôt, politique, et cette liberté dégénérée en une sorte de manie, attira l’attention du souverain, qui imposa silence […] Telle est notre suffisance, de vouloir parler de tout, d’écrire sur tout, souvent sans autres connaissances que celles que nous avons acquises par quelques lectures rapides ou dans les conversations du monde. Qui pourrait compter, par exemple, les brochures de tous nos romanciers et de nos petits poètes ?
………
Si le sujet sur lequel on travaille est grand, utile, entrepris avec choix et discernement, on tombe souvent sur un défaut : c’est d’écrire trop au long les meilleures choses ; et par là, on nuit au succès de l’ouvrage.
Quand on traite un sujet, il y a des mesures à garder ; c’est le bon sens et la raison qui les déterminent. Quand on écrit, il faut du goût, de l’usage, de l’attention pour ne pas aller trop loin, comme il en faut pour ne pas demeurer en chemin avant que d’avoir atteint le terme. Ajoutez quelque chose à cette juste étendue, ou retranchez-en, alors la composition est difforme […] J’en dis autant de l’esprit ; un auteur doit remplir son dessein ; et pour plaire à ceux qui le liront, il doit particulièrement éviter d’écrire trop au long, ce qu’il écrit de bon et de raisonnable. On se plaint rarement de la brièveté, on se plaint toujours de la longueur.[…]
L’auteur se répand quelquefois avec plaisir sur des endroits qu’il aime par préférence ; c’est son charme, et souvent c’est l’ennui du lecteur ; ce défaut vient aussi de ce que l’auteur est plus prêt sur certaines choses dont il est instruit, que sur d’autres qu’il traite plus légèrement. On sent son faible en le lisant, et on ne lui pardonne ni ce qu’il écrit avec trop d’appareil ni ce qu’il se contente de traiter superficiellement, faute de connaissances suffisantes.
Il en est ordinairement des auteurs comme des orateurs sacrés et profanes ; les plus courts sont écoutés avec plus de plaisir, quand ils remplissent un excellent dessein, sans fatiguer les auteurs. Un homme qui parle, ou qui écrit plus qu’on ne veut, ennuie toujours ; la patience échappe, et on laisse l’orateur en chaire, ou l’auteur sur la table comme on se défait d’un fâcheux qu’on rencontre. »
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jeudi 20 septembre 2007

Lève-toi et marche brave Fillon ! N°36 - 1ere année

La France découvrit l’existence du Premier ministre le jour où il protesta de l’inexactitude de son état, un collaborateur du Président de la République. Ce cri surgit de la rue de Varenne rompt avec son prédécesseur totalement incapable d’oublier ce qu’il était et, surtout ce qu’il ne pouvait manquer de produire. Dominique de Villepin, auteur rapide de quelques ouvrages vient d’en commettre un dernier, Le soleil noir de la puissance, où l’empire sert de prétexte à dénoncer le parcours du successeur de Jacques Chirac. Bon, rédigé entre les manifestations anti-CPE, l’affaire Clearstream et un possible destin national, on devine que le mot noir s’ajoutait au dernier moment. Il pensait un peu à lui : au fond l’empire il en rêve !
Les rugissements réguliers de l’ancien secrétaire-général de l’Elysée s’opposent à François Fillon qui habite un hôtel particulier dans le VIIe arrondissement gardé de gendarmes, de CRS lesquels figurent par leur mâle présence l’existence d’un lieu de pouvoir. Visiblement, François Fillon s’agace de ne pouvoir en placer une : vient-on le voir ? Peut-être ! Heureusement Paris-Match permet une sortie un peu people de cet homme qui y confie ses états d’âme. Coincé entre un Chef de l’Etat obsédé par sa permanence médiatique, un Claude Guéant, secrétaire-général de l’Elysée qui parle entouré de ministres et distribue les points positifs, négatifs, l’espace de vie pour François Fillon rétrécit. Autre nuage à l’horizon, la commission Balladur chargée de la réforme des institutions avance l’idée de gommer le poste de Premier ministre. Il y a de quoi être triste. Des générations de politiciens se sont battus pour être rue de Varenne et voilà que cet hôtel deviendrait presque un musée : François Fillon a-t-il l’âme d’un conservateur ?
Son positionnement effectivement singulier pèse davantage par l’humeur qui préside à l’Elysée. Du soir au matin, le brave Fillon se verrait en charge de telle ou telle affaire de taille sans même en obtenir la haute main y compris dans la durée. L’unique acte politique tiendrait dans la démission. Partir quatre mois après son arrivée, montrerait les défauts du bonhomme, irriterait qui on sait. Il lui faut prendre son mal en patience pour terminer la comédie dans un temps raisonnable. François Fillon rallié à Sarkozy par rancœur contre Chirac a abreuvé de venin son nouveau mentor avec la naïveté d’en imposer à un instant T. Cruelle déception. L’amertume ronge le Premier ministre. Les soirées avec son épouse galloise, Pénélope ont la discrétion que ne pouvait avoir l’auteur des
Cent jours, d’une Anthologie de la poésie française
Lève-toi et marche brave Fillon, un personnage modeste de l’empire décrit par Villepin ? On n’imagine pas Sarkozy reprenant le billet célèbre d’Henri IV écrit à l’illustre homme de guerre, Louis de Crillon :« Pendez-vous, brave Crillon! nous avons combattu à Arques, et vous n'y étiez pas. »
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mercredi 19 septembre 2007

Le contrat social au galop N°35 - 1ere année

Fidèle à sa méthode, Nicolas Sarkozy travaille en amont toute la communication avant le jour J du lancement du programme présidentiel. Cette action a déjà des mérites : dire aux intéressés ce qui va être entrepris, borner le cadre d’action, aplanir les obstacles.
A la faveur de la réforme des régimes spéciaux de retraite, le Président entend balayer d’un coup tous les obstacles qui freinaient depuis des décennies l’entreprise et le travail. Le moment est encore bon. Sur le plan économique, le chômage est à un niveau jugé convenable. Sur le plan social, les syndicats savent leur faible représentation générale, ne bénéficient plus des courroies habituelles de la gauche, d’une certaine partie de la droite. Sur le plan politique, la désintégration du parti socialiste ne s’arrêtant pas, celle du PC également, la voie s’ouvre impériale pour l’Elysée. Bien sur, il y a de la faiblesse : croissance en berne, un euro trop haut. Mais d’une façon générale, l’opinion publique ne voit pas encore ces obstacles tellement sent-elle le besoin de frapper un grand coup. Aveuglement ou lassitude ?
En 1995, Alain Juppé entamait sa descente aux enfers en proposant la réforme des dits régimes de retraite. Il voulait tenir, Jacques Chirac l’empressa de céder effrayé par l’immobilisation des moyens de transport dans la France entière. Douze années plus tard, nous n’assisterons pas à cette répétition. Nicolas Sarkozy a déminé le chemin : le service minimum est acquis dans les transports publics. Point de détail certes mais point stratégique. Nul ne pourra être empêché d’aller sur son lieu de travail.
La gauche, naturellement, cherche la riposte. Sous nos yeux, elle s’est désenflée. Tenait-elle vraiment à entrer dans un rapport de force avec le pouvoir ? Les leaders socialistes marmonnent facilement que l’Elysée fait ce qu’ils ne firent jamais. Ils protesteront, ils savent le faire et après tout, les cadres dirigeants se placent davantage en direction de l’économie libérale. Ce sont des sociaux-démocrates déguisés en socialistes.
Pour le patronat, le nouveau contrat social l’enthousiasme certainement après les propos tenus par le Chef de l’Etat lors de l’université du Medef : la dépénalisation du droit des affaires en règle générale avec en ligne de mire la mise à l’encan de l’abus de biens sociaux.
La vitesse reste le meilleur atout du Président. Elle est aussi son talon d’Achille. Il mise sur l’approbation de fait des Français autour de ces réformes. Son succès intérieur le renforcera dans sa politique étrangère recadrée et pour laquelle les Français ne montrent pas de passion particulière. En tapant aussi fortement sur Jean-Claude Trichet, l’Elysée a désigné l’ennemi, la «puissance » extérieure. C’est une défausse mais elle a toutes les chances de marcher.
Apparemment toute la machine a reçu suffisamment d’huile pour empêcher le blocage. Il a su par le bouclier fiscal mettre de son côté ces nouveaux bourgeois de propriétaires envers lesquels il s’engage à garantir le toit acquis. Ceux-ci issus de milieux divers et avec des écarts de fortune se retrouvent dans un même ensemble déstabilisant pour les habituels partenaires sociaux. Il n’en reste pas moins que le Chef de l’Etat charge un peu plus sa barque. Il doit avancer les autres chantiers avant même de finir avec celui-ci. C’est dans cette succession que repose sa communication positive. Il compte sur cette fébrilité, ces secousses permanentes pour durer. De ce contrat social naîtra-t-il un nouveau contrat politique ? La commission Balladur a pour partie cet objet. Que pèsent alors les doutes des syndicats, du PS ? Maintenant rien. Le PC se tait. L’extrême gauche est dans les bois. Taïaut, taïaut… !
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mardi 18 septembre 2007

Se préparer au pire… N°34 - 1ere année

En fin de semaine, la presse américaine se fait l’écho d’un énième plan d’attaque contre la République islamiste. Des spécialistes comptabilisent les navires de guerre US en place dans le Golfe persique. Bref, dans le bruissement washingtonien les rumeurs les plus opposées traversent la ville. Ces multiples odeurs de poudre existent depuis de longs mois. Le désastre mésopotamien (1200 000 victimes en 4 ans, 2 000 000 millions de gens exilés) atteint un tel degré à tous les niveaux de l’horreur qu’effectivement la tentation de faire plus et pire existerait dans quelques cerveaux influents proches de la Maison Blanche.
C’est dans ce climat singulier qu’au mois d’août Nicolas Sarkozy évoquait déjà les bombardements puis dimanche soir Bernard Kouchner se préparerait au pire, c’est-à-dire à la guerre.
Toute une rhétorique, martiale, belliciste, se met en place. François Heisbourg, vole au secours des derniers propos du ministre des Affaires étrangères en assurant que le discours français n’est pas isolé, le Royaume-Uni, l’Allemagne l’approuveraient. Jusqu’à présent la troïka freinait des quatre fers le bellicisme de Georges Bush. Ce revirement brutal s’exprime par la colère de Mohamed el-Baradei, directeur de l’AIEA, devant les représentants de l’Union. « Nous devons garder notre sang-froid et ne pas faire du battage autour de la question iranienne » précise-t-il.
La France serait-elle à l’origine de ce nouveau ton ? Quels arguments ont-ils été employés pour séduire Londres, Berlin mais aussi La Haye ? Une première partie de la réponse se trouve, peut-être, dans le voyage officiel du Président français en Russie les 9 et 10 octobre prochain. La Russie avec la Chine ont des intérêts avec Téhéran et l’une comme l’autre n’encouragera aucune décision qui viendrait donner du corps au nouvel Orient esquissé par l’équipe républicaine. Le compte-rendu de la visite promet d’être enveloppé pour masquer la fin de non-recevoir.
L’hypothèse serait donc d’une initiative strictement française. Sa conséquence principale donner le gage, aux Etats-Unis, que la politique élyséenne s’inscrirait dans une solidité inédite. Pour Washington, cette arrivée française, porte-étendard hostile à l’invasion de l’Irak en 2003, autorise un discours rassurant en direction de l’électorat traditionnel, à l’extérieur de mettre en avant la valeur de la parole de la France : Paris a dit non en 2003, Paris dit oui en 2007.
La réintégration de la France dans l’OTAN commence par une soumission consentie et c’est là le point le plus grave. Que gagnera-t-on dans cette organisation ? Peanuts !
Bernard Kouchner, Nicolas Sarkozy proposent une aventure à notre pays, source d’inquiétudes d’une belle taille. Si l’on réfléchit bien à l’impact qu’aura ce bellicisme résolu du Président de la République sur les autres nations, on n’a aucune peine à deviner les dommages collatéraux. Combien de soldats français tomberont dans le nouvel Orient ? Depuis les croisades les occidentaux ont le goût des chimères ! Depuis le dépeçage de l’empire ottoman en 1920, nous avons déjà su dessiner le nouvel Orient par une série de tracés frontaliers au gré de nos seuls intérêts mercantiles. Pourquoi se retenir ?
Il est remarquable de voir comment la République islamiste est diabolisée : pourquoi son programme nucléaire aurait-il une dangerosité supérieure à celui du Pakistan ? New Delhi a obtenu de réaliser le sien sur le plan civil. Promesse de gascon, qui a le nucléaire civil, a le nucléaire militaire. Le seul obstacle à l’ambition américaine dans cette partie asiatique est la Perse, elle ne doit plus l’être.
Si les Etats-Unis renoncent à l’acte militaire, ils auront gagné la France à leur vision mondiale. Ce sera une victoire importante. Se préparer au pire ? Que les autres nations reprochent à la France de s’incliner, par exemple ?
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lundi 17 septembre 2007

Banques centrales, capitalisme financier et nous. N°33 - 1ere année

Nous voyons la première crise du capitalisme financier évoluer dans le désordre et l’inconnu. Deux mouvements néfastes pour les bourses très attachées à la confiance, à l’absence de rumeur.
Premier étonnement, les banques centrales, américaine, européenne, japonaise, injectent des centaines de milliards sans laisser paraître la moindre concertation, sans oser une déclaration commune. L’interaction de tous les flux financiers rend toute crise internationale. On s’interroge sur l’incapacité de la part de ces banquiers centraux à agir au grand jour afin de rassurer le public, taire les cabales. On devine bien qu’ils se parlent, pourquoi n’occupent-ils pas la scène médiatique ?
Le second étonnement tient à l’impossibilité de dire quel est le niveau de la crise financière ! Jamais les entreprises n’eurent une santé aussi solide. Jamais la croissance n’a fléchi. Nous avons donc deux fondamentaux qui assoient en profondeur les piliers de la solidité. Le hic ou le grain de sable se situe avec le capitalisme financier qui a pulvérisé, en une décennie, tous les scénarii habituels. Les entreprises, les particuliers sont atteints par ce nouveau capitalisme. Les fonds d’investissement, avant-garde puissante de ce capitalisme, pêchent par l’opacité (pour ceux immatriculés dans le Delaware, par exemple), le secret puisqu'ils sont pour la plupart établis dans les paradis fiscaux.
Dernier point, quels sont les rapports de force entre les fonds et les banques : qui tient l’autre ? Les premiers ou les secondes ?
A ce jour les fonds dominent et, ô paradoxe, les banques répugnent aux prêts interbancaires. La panique des clients de la banque anglaise Northern Rock est un signe inquiétant pour les jours à venir. La Fed pourra annoncer toutes les baisses de taux, baisse qu’elle ne pourra poursuivre longtemps, la conséquence positive décroîtra inévitablement à l’annonce de telle ou telle défaillance d’un établissement financier, bancaire. Tant que les crises du subprime, du carry trade ne trouveront pas un discours général rédigé par les autorités légitimes, nous aurons des mouvements en montagne russe.
Les Etats interviennent avec prudence. Nicolas Sarkozy n’hésite pas à vouloir secouer le monde clos de l’eurogroupe. Ces propos obéissent en grande partie à la nécessité de prévenir l’opinion nationale des difficultés à venir, de se dédouaner vigoureusement sur une institution européenne dont il est assuré de la raideur. Sa sortie sur la croissance à 3 % indique bien son anticipation. Le Président, néanmoins, a le mérite de placer le débat au centre pour la BCE : quelle est son action ? Quel est son pouvoir ? Mais il indique aussi que la banque centrale boite gravement devant l’inexistence d’une politique européenne économique, fiscale commune. Sa dénonciation de la passivité de l’eurogroupe est justifiée ; elle rebondit, cependant, sur tous les états de l’Union, la France incluse.
Que conclure fort grossièrement ? On constate que personne ne connait exactement la dimension de la crise financière ; ensuite, le maintient étonnant de frontières entre les banques centrales alors que les bourses se rachètent les unes les autres; enfin, le danger d’un capitalisme financier soit indépendant des autorités politiques soit complice pour diverses raisons géopolitiques ; et, in fine, les citoyens lambda happés par l’apparente facilité du crédit, lâchés au premier tir de canon. Ce mouvement financier mondial mettrait, en toute logique, le politique au centre de la décision. On voit très bien par l’attitude de certains d’entre eux que les inflexions données forment leur raisonnement. Le capitalisme financier mérite une régulation que les anglo-saxons appellent transparence. Comment harmoniser les différentes cultures capitalistes ? Là est la question et, en grande partie, la base du problème à résoudre. Ce que nous observons est donc du plus haut intérêt.
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vendredi 14 septembre 2007

Fin de dessein à Meseberg N°32 - 1ere année

Selon la presse allemande le baisemain de Jacques Chirac à Angela Merkel était trop old fashion, la bise de Nicolas Sarkozy trop commune. Les relations franco-allemandes ne sont donc pas simples !
L’amitié franco-allemande est-elle utile en 2007 ? Le legs du général de Gaulle et du chancelier Adenauer est-il un poids des deux côtés du Rhin ou bien une simple évidence parfaite pour tranquilliser les opinions ?
Hormis les relations commerciales entre les deux pays, nous voyons bien les différences apparemment fondamentales entre Paris et Berlin sur la plupart des sujets. EADS est un exemple, AREVA un autre.
La politique étrangère ne réussit jamais à être commune, exception faite de l’année 2003 lors de l’invasion de la Mésopotamie. Les corps diplomatiques grincèrent des dents mais se turent. Si une grande partie de l’élite d’outre-Rhin s’exprime dans un Français à faire pâlir un agrégé de lettres, l’inverse n’est pas à la hauteur. Quelle opinion commune forgerait-on devant un déséquilibre si éclatant ? Il est pénible de penser la négligence sur ce point lors des retrouvailles franco-allemandes dans les années 60.
Berlin a choisi le camp américain depuis longtemps. Paris affectait de ne pas le compter pour décisif. La nouveauté de la présidence de Nicolas Sarkozy tenant dans son admiration pour les idées néo-conservatrices en vogue aux USA le rapproche à terme plus exactement du discours allemand. Le retour de la France dans l’OTAN conjugué à la nécessité d’une Europe de la Défense indépendante( ?) proclamée par Nicolas Sarkozy reçoit les compliments de bien des cercles germaniques. L’Allemagne qui craint l’Histoire en l’assumant seule ne veut la recommencer qu’avec une bénédiction, en l’occurrence celle de la Maison Blanche. Si, en plus, la France lui donne une caution morale, c’est pain béni. Il n’est pas dit que cette réunion diplomatique, militaire soit un avantage pour les deux peuples, pour le continent européen. Tout au contraire. Notre avenir ne sera pas radieux mais sombre et orageux. Le couple franco-allemand se métamorphose sous nos yeux, change de cap. La chancelière passe outre les initiatives élyséennes attachée aux conséquences de la nouvelle diplomatie française éminemment dynamique pour ses intérêts. Elle ne s’agace pas de la bise sur la joue. Le gain à venir est trop grand. Du moins l’espère-t-elle !
Paris-Berlin dit oui aux sanctions contre Téhéran, dénonce la Russie (pour la courtiser les caméras parties), s’accorde sur le dossier du Kosovo, opine à l’idée de la guerre contre la terreur. Que de signaux envoyés à Washington ! Dans le dossier nucléaire, Sarkozy voudrait à peu de frais s’offrir une victoire « patriotique » en repoussant Berlin d’AREVA au motif de son hostilité au tout nucléaire. Ce dessein, s’il aboutissait, l’enflerait énormément…mais Berlin a envie de rigoler un peu.
Le sommet informel tenu dans le château de Meseberg déconstruit l’axe Paris-Berlin historique. Le hic est que cette nouvelle connivence entre les deux puissances affaiblit davantage aux yeux des Indiens, des Chinois la viabilité de l’Union européenne. Si New Delhi se gausse de la chimère européenne (rappelons-nous l’affaire Arcelor/Mittal), Pékin la cherche sur une carte. Les autres puissances émergentes s’esclaffent tout autant. On s’apercevra des dommages collatéraux rapidement.
Il ne reste pas grand chose du grand dessein plutôt français qu’allemand suggéré voilà prés de cinquante ans. 2007 abolit tout simplement l’ambition ou l’espérance au profit de la norme, du conformisme. Terminons par cette observation que le couple franco-allemand qui n’existât que peu, vivra, demain, totalement évidé de sa moelle. Ita missa est !
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jeudi 13 septembre 2007

Hindûstân ou Pakistan N°31 - 1ere année

Le Pakistan est né le 14 août 1947. D’où vient son nom? On hésite entre le néologisme issu de l’ourdou (langue officielle), pays des purs et l’acronyme qui reprendrait la première lettre de chacune des provinces : Panjab, Afghania, Kashmir, Sind, Baloutchistan. Sa légitimité ? Regrouper la population musulmane (sunnite) vivant en Inde qui était jusqu’en 1857 l’empire Moghol(né en 1526) puis le Raj britannique de 1876 à 1947.
Les noms des provinces éclairent : Panjab, terre des Sikhs, Afghania, province limitrophe avec l’Afghanistan dont la capitale est Peshawar, le Cachemire, état stratégique au contact de la Chine et de l’Inde, le Sind, capitale Karachi, le Baloutchistan, antique Gédrosie où Alexandre le Grand faillit mourir avec son armée. Les Baloutches, originaires de Perse se fédérèrent au XVIIIe siècle sous l’égide du royaume de Kalat dissous en 1955. En 1871 et 1893, les Anglais répartirent le Baloutchistan entre la Perse, l’Afghanistan, et l’Inde.
Le fondateur de cette république musulmane, Muhammad Ali Jinnah, se heurta d’entrée aux particularismes des provinces, en particulier le Baloutchistan et le Cachemire qui faillirent provoquer l’implosion du jeune état. Le problème n’est toujours pas réglé. L’armée et la religion éléments fédérateurs du Pakistan peinent à consolider une nation totalement liée aux tribus qui l’illustrent. Les grands partis politiques (Ligue musulmane, parti du peuple pakistanais) participent plus à entretenir des passerelles entre la « haute caste » (bourgeoisie) et l’armée qu’à bâtir véritablement un état démocratique. Les coups d’état jalonnent le cours du pays depuis 1958. Le dernier en date en 1999 a porté au pouvoir le général Musharraf.
Le Pakistan voudrait-il vivre dans une sorte de neutralité que l’actualité et sa situation géographique lui en ôtent la possibilité ! Quels sont ses voisins ? La Perse, l’Afghanistan, l’Inde, la Chine. Par sa confession sunnite, les monarchies du Golfe jugent naturelles d’agir financièrement. S’invitent évidemment les USA, la Russie pour des raisons évidentes. Et cerise sur le gâteau, Al-Quaïda et les talibans vont et viennent dans le Waziristan.
Sur le plan intérieur, les chefs de tribus jouissent d’une autorité incontestée. Ils sont craints par leur habileté à être les bénéficiaires en tout : sur le plan intérieur ils négocièrent avec le nouvel Etat, le recrutement des soldats et des sous-officiers ; sur le plan extérieur, ils jouent avec une facilité irritante sur tous les tableaux : gardiens du calme, du commerce, de la contrebande, du marché du pavot, des armes, des fluctuations inter-étatiques…etc. Ils s'offrent même le luxe de se quereller. Les Américains, on le devine, s’arrachent les cheveux tout comme quelques-uns à Islamabad. In fine les monarchies arabes passent par eux pour soutenir les groupes musulmans dits islamistes.
Les cérémonies de l’indépendance d’août dernier ne masquèrent pas le malaise général. Cette puissance nucléaire implose. La question des retours d’anciens dirigeants (Nawaz Sharif, Benazir Bhutto) est emblématique d’une fuite en avant. La population les suspecte de connivence avec la volonté américaine et anglaise de reprendre la main sur la direction du pays. La popularité du président de la cour suprême, Iftikar Mohammed Chaudhry, arrêté par Musharraf puis libéré est symbolique du degré d’énervement national. La marge de manœuvre du général Musharaff rétrécit comme peau de chagrin, contraint qu’il est d’être l’allié de tout le monde et, par conséquent l’ennemi de tous.
Le Baloutchistan menace de faire sécession (cas prévu à Washington par le courant néo-conservateur), le Cachemire source de guerres contre l’Inde (la dernière date de 1999) intéresse la Chine depuis que celle-ci en a arraché une parcelle (Aksai Chin) en1962. Et New Delhi rappelle au Pakistan qu’il n’a pas quitté l’Hindûstân, c’est-à-dire la terre des Hindous en langue persane. Comment s’appelait l’ourdou avant 1947 ? L’hindoustani.
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mercredi 12 septembre 2007

Les nouveaux aveugles N°30 - 1ere année

Il y avait deux endroits où le souvenir du 11 septembre pouvait être : aux Etats-Unis, à Bagdad. A Washington comme à New York les officiels et les parents des défunts s’unirent dans la juste prière du souvenir. Pendant ce moment religieux, le général Petraeus débutait son grand oral devant le sénat sans subir la prestation de serment. C’est un détail pour les plus négligents, c’est un point politique intéressant quand on sait les complaisances des démocrates pour la guerre contre la terreur, l’invasion de la Mésopotamie. Dans cette circonstance, la lecture du rapport du général Petraeus requiert une prudence de sioux. Certains disent presque à haute voix que tout fut rédigé par des plumes de la Maison Blanche. Tout le souci tient donc à rassembler le plus grand nombre d’Américains dans le recueillement, surtout ceux du Middle West, et dans le même temps à cadencer les faits et les gestes du dit général commandant en second à Bagdad. Autre point, sur le terrain le général critique en chuchotant son supérieur l’amiral Fallon, comportement qui ajoute davantage de piquant à la conviction que celui-ci aura devant les sénateurs.
A New York, la cabale enfle contre l’ancien maire Giuliani qui aurait confié le chantier à des sociétés incompétentes et fait courir des risque insensés aux hommes pour sauver l’or, les diamants entreposés dans les tours. Deux pompiers viennent de mourir dans le trou. Et oui, six ans après et trois ans après l’adoption du projet 1776, rien n’a débuté. Tout un symbole.
A Bagdad c’est-à-dire dans la zone verte, le 11/9, monte d’un degré supplémentaire dans la mise en scène. Le gouvernement Maliki qui existe sans exister tout en existant sait sa place comme conséquence des attentats contre les Twin et de l’application du plan des néo-conservateurs. Face aux femmes, enfants, hommes tombés par dizaine de milliers dans les guerres intestines, la torture sous les yeux de l’occupant et sous sa direction, la gêne arrive, tout de même, à éviter les impairs, l’impudeur.
Depuis notre mont Pagnote, le regard général est frappé par la désolation de ce monde que d’aucuns veulent contrôler, d’autres y retrouver d’antiques positions de suprématie. Depuis ce désordre par effet boule de neige des fissures supplémentaires paraissent. Le 11/9 ou 9/11, reste le point de départ d’une mécanique bizarre et sanglante contre les hommes. Le sénateur Ike Shelton, président de la commission des forces armées à la Chambre résume d’une phrase terrible le dédain du réel « si ça va mal en Irak, c’est à cause des Irakiens qui n’ont pas compris ce que nous leur apportions ». Il n’a pas tort : les Irakiens ne voient toujours pas ce que la bannière étoilée leur a apporté au sens de la civilisation. Tout comme nous, nous ne voyons rien de positif depuis six ans. L’horreur du 11 septembre n’a pas rendu la parole aux philosophes, aux poètes. Le peuple américain est aveuglé par ses bons sentiments, les Mésopotamiens, eux, sont aveuglés.
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mardi 11 septembre 2007

Le Roi qui avait un ami N°29 - 1ere année

Je vous propose deux lettres tirées de la publication de l’ouvrage, Vauban, un militaire très civil, lesquelles sont significatives d’une manière de dire, de demander sans tomber ni dans le dédain, ni dans la flagornerie.
Pourquoi ? N’est-il pas agréable de poser quelque moment sa plume sur le côté de nos faits contemporains dont certains alourdissent notre goût pour l’existence, pour prendre quelque plaisir à la relecture d’une correspondance entre deux hommes unis par l’amitié, l’un régnant, le second sujet mais les deux jamais gagné par la lassitude d’être?



Louis XIV à Vauban, Marly le 22 août 1697 :

« Je suis fort persuadé de votre joie en la prise de Barcelone et sur ce qui est arrivé à Carthagène. Vous êtes trop bon français pour n’en pas avoir et pour ne pas souhaiter ce qui est dans la lettre que vous m’avez écrite. Je pense tout comme vous et je ferai ce que je croirai convenable pour mon avantage, celui de mon royaume et de mes sujets. On s’en peut rapporter à moi qui sais et connais le véritable état où nous sommes. Si la paix se fait, elle sera honorable pour la nation. Si la guerre continue, nous sommes en état de la bien soutenir de tous côtés quoi qu’il arrive. J’aurai la même considération pour vous et vous verrez dans la suite que mon estime et mon amitié sont toujours telles que vous les connaissez depuis si longtemps. »

Vauban à Louis XIV, Paris le 2 janvier 1702 :

« Le bruit qui court à Paris, à Versailles et dans toutes vos troupes, d’une prochaine promotion de maréchaux de France, m’autorise à représenter à Votre Majesté que ma qualité de lieutenant-général, plus ancien que la plupart de ceux qui sont le plus à portée d’y prétendre, et mes services mieux marqués que les leurs, dont je ne veux pour témoin que Votre Majesté, me donnent lieu d’espérer qu’Elle ne me jugera pas indigne de cette qualité.Après cela, Sire, comme je suis absolument dévoué à tout ce qui plaira à Votre Majesté faire de moi, si Elle juge qu’il convienne à son service que je me borne au caractère dont il lui a plu de m’honorer, je m’y soumets de tout mon cœur et je lui sacrifierai sans peine toute mon ambition ; vu même qu’il semble qu’une telle élévation doit être embarrassante pour un emploi ambulant comme le mien qui a tant de places à voir et à visiter et qui se trouve dans une obligation continuelle d’être si souvent mêlé parmi tant d’ouvriers.
Mais, au cas que Votre Majesté juge cette situation nécessaire à son service, qu’Elle ait au moins la bonté d’en rendre un témoignage public qui me disculpe envers ceux qui ne me croient pas indigne de la qualité de maréchal de France. C’est la grâce que je lui demande avec celle de vouloir bien m’en consoler par me donner une maison dans Paris. Elle le peut sans qu’il lui en coûte rien. Il y en a deux qu’Elle fait vendre présentement dont Elle ne retirera pas grand-chose, ne s’y étant encore présenté personne pour les acheter.
Ces deux maisons sont celles de la Couanne et de Saunion. Si Elle a la bonté de m’en accorder une, je lui demande la plus grande avec les jardins et héritages qui en dépendent, la maison pour me loger et les héritages pour avoir de quoi la meubler, et je continuerai le reste de mes jours à la servir avec tout l’attachement et l’affection dont le meilleur sujet du monde et le plus désintéressé peut être capable. »
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lundi 10 septembre 2007

Maghreb une singulière île de l'Occident N°28 - 1ere année

Du Maroc à la Tunisie, le Maghreb ne reste pas insensible à la montée de l’islamisme radical. Pour l’heure les régimes de ces pays réussissent à garder la main sur leurs membres les plus déterminés.
Les dernières élections législatives marocaines donnent une courte victoire au parti de l’indépendance (Istqlal) devant le parti de la justice et du développement (PJD) organe public des islamistes du royaume. Ce résultat, encore provisoire, est une nouvelle positive quand bien même cet état passe non sans heurt les étapes d’une démocratisation. Le niveau de vie des marocains s’est élevé depuis la mort d’Hassan II. Mohammed VI a libéré la plupart des prisonniers politiques, les libertés se sont étendues quoique tenues au bon vouloir du souverain. Un monarque commandeur des croyants évolue par à-coups d’où ici et là des avancées et de brusques coups de bâton. Les journalistes ne tiennent pas la censure pour une plaisanterie, elle survient. La classe moyenne peine à grandir, les campagnes triment. Rabat maintient une politique africaine et s’interroge sur un rapprochement avec les USA. Les liens avec Paris ne sont plus aussi naturels.
L’Algérie est la nation qui eut la période la plus sinistre de son histoire. Le FIS et ses avatars semèrent la terreur à partir des années 1990. Ce dernier commet encore des actes. La situation sociale vacille au milieu des richesses naturelles. Une classe dirigeante- principalement militaire – contrôle les endroits clés de l’économie. L’attentat contre le Président Bouteflika n’étonne guère les observateurs. Le chef de l’Etat est malade, sa succession incertaine. Sur le plan international, l’Algérie se bat pour préserver son indépendance énergétique, a refusé d’accueillir le QG américain pour l’Afrique. Les relations avec la France sont médiocres.
La Tunisie de Ben Ali a éliminé les islamistes. La censure et les atteintes aux droits de l’Homme ne suscitent pas des critiques du locataire de l’Elysée. La France appuie et encourage le régime.
Les trois pays du Maghreb forment un espace géographique de premier plan. Avec la Libye et la Mauritanie, on parle alors de Grand Maghreb. L’Afrique noire ne les retient pas beaucoup à l’inverse de l’Union européenne et du Machrek (l’Orient arabe) qui va de l’Egypte à la Mésopotamie en incluant la péninsule arabique.
L’île de l’Occident, autre nom donné par le monde arabe à ces pays d’Afrique du nord, ne réussit pas jusqu’à maintenant à établir une quelconque union, les antagonismes territoriaux restant nombreux et la relation avec l’Union européenne cahotante. Nicolas Sarkozy chante les mérites de l’union méditerranéenne quand le Maroc demande à adhérer à l’Union. L’Espagne, la France, l’Italie, histoire coloniale oblige, rechignent à un projet politique devant les migrations africaines. Entre un orient et un occident, le Maghreb tient sa faiblesse de maux historiques, d’un fanatisme religieux latent mais sous contrôle, sa force par l’émergence de nouvelles générations et, quoi qu’on en dise, par la montée en puissance en France de nos concitoyens dont les ancêtres étaient maghrébins. Cette île de l’occident garde aujourd’hui, toute sa singularité et refuse toute idée d’isolement. Le Maghreb va mûrir.
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vendredi 7 septembre 2007

Kosovo un millefeuille dans les Balkans N°27 - 1ere année

Le Kosovo forme un quadrilatère. Sa population est albanophone. A chaque coin une nation : Monténégrine, Albanaise, Macédonienne, Serbe. Depuis 1999 cette province est placée sous le mandat de l’ONU pour prévenir tout trouble entre les Serbes et les Albanais qui y revendiquent leur souveraineté. Ainsi sont-ce les Turcs, les Français, les Américains, les Italiens, les Allemands, les Russes, les Anglais qui veillent à la tranquillité générale.
Quelle est la singularité de cette province pour retenir autant l’attention ? Albanais et Serbes s’entremêlent totalement depuis la nuit des temps. Les premiers y furent via leurs ancêtres Illyriens lesquels succombèrent à Rome. Les Serbes conquirent une partie des Balkans jusqu’à former un empire au XIVe siècle sous Stefan IX Uroš IV Dušan. Couronné empereur des Serbes et des Grecs à Skopje (Macédoine) en 1346, il sera enterré, en 1355, dans le Kosovo à Prizren. Le corps du prince serbe Lazare Hreblejanović, héros tragique de la bataille dite du champ des merles (juin 1389) contre les Ottomans, repose à Pristina capitale du Kosovo. La destruction de la puissance serbe permit aux Osmanlis d’islamiser les Albanais et de transformer la province. L’indépendance de la Serbie en 1878 reposa la question du Kosovo lequel resta sous administration ottomane jusqu’en 1912. La Russie pesa de tout son poids pour que Belgrade obtienne cette province au grand dam de Tirana. Entre 1915 et 1919 la monarchie serbe réprima les soulèvements albanais. En 1945, Tito interdit aux Serbes de revenir dans le Kosovo. L’implosion de la Yougoslavie réactiva toutes les revendications des pouvoirs à Belgrade, à Tirana. Milosevic supprima l’autonomie du Kosovo pour l’intégrer en totalité à son pays puis ordonna, au printemps 1999 le déplacement de 800 000 Kosovars. L’OTAN répliqua par un bombardement massif contre l’armée serbe qui s’inclina le 10 juin. Depuis cette date, nous assistons à un face à face qui passe par-dessus la tête des principaux intéressés et des européens pour n’être qu’un sujet de discussion entre Bush et Poutine. Remake de Guerre Froide ?
La Russie affecte d’appuyer la Serbie, les USA pensent cette ultime bombe balkanique intéressante pour peser sur l’Union européenne. Les Européens ont triste allure !
Au vu des partis pris et de l’incapacité à donner à l’une ou l’autre puissance la souveraineté en totalité, ne conviendrait-il pas d’étudier la possibilité de la souveraineté alternée ? L’exemple de la principauté d’Andorre prouve l’exercice possible. Le Kosovo ne pouvant pas accéder au rang d’Etat, il jouirait de l’autonomie, d’un parlement, des institutions propres garanties par la Serbie et l’Albanie. Tout litige relèverait de la compétence de Bruxelles. Sa sécurité militaire, elle, incomberait à l’Union européenne. Cette politique impliquerait une reconsidération réelle de l’Union envers la Russie et, à l’endroit des Etats-Unis dire notre capacité à assumer y compris par la force, l’avenir du Kosovo. Ni Belgrade, ni Tirana ne résisteraient longtemps. Chacun trouverait le contentement de son nationalisme. Le désamorçage de la bombe Kosovar ne peut plus tarder.
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jeudi 6 septembre 2007

Oncle Hubert et le petit Nicolas N°26 - 1ere année

Hubert Védrine regarde Nicolas Sarkozy : le premier est placide, le second aventureux.
Le rapport de 63 pages sur
la France et la mondialisation commis par le premier pour le Président de la République jouit de la publicité immédiate. Doit-on y voir un signe de dédain ou bien une urgence à informer le public de la tâche en cours à Elysée ? Quoi qu’il en soit, le ton d’Hubert Védrine repose sur la pondération sans se confondre avec la flatterie quoiqu’il sut plaire sous François Mitterrand. Le mérite du travail accompli en deux mois tient dans les grandes esquisses du monde et des espérances pour la France.
Le sujet de départ étant la frilosité de notre nation face à la mondialisation, il permet à l’auteur de placer ici et là des points de politique étrangère qu’il eut aimé entreprendre à la place de Kouchner. Le style est positif d’un bout à l’autre, le négatif devient même une capacité à rebondir. Hubert Védrine ne cède pas un pouce de l’identité française sur laquelle il greffe au détour de plusieurs phrases l’expression d’indépendance européenne. L’affirmation de la France par la suggestion d’un ministère des affaires mondiales et du rôle moteur d’une Union méditerranéenne sont deux coups de sabre parmi la commission Barroso. L’ancien ministre des Affaires Etrangères rappelle bien le danger à revenir pleinement dans l’OTAN tout comme à paraître venir au secours des USA. Il ne s’agit pas d’applaudir à l’embourbement américain mais de responsabiliser cette puissance et notamment qu’elle sache répondre de ses actes devant les nations. La tentation Atlantique de Nicolas Sarkozy est là : rendre service au risque de la servilité et n’en tirer aucun avantage. Chaque jour Londres boit le calice jusqu’à la lie après les années Blair : amertume, humiliation, depuis Washington de récompenses point !
L’une des conclusions de l’auteur est le rappel de l’exception française : sa langue- rejetée facilement par nos « élites » -, son réseau diplomatique et consulaire, ses lycées sur tous les continents, son histoire originale, sa puissance atomique. Il affecte habilement de se choquer de notre « arrogance ». Qui s’émeut du fair play anglais qui ne joue qu’à la condition qu’il soit vainqueur ? Qui dénonce le protectionnisme américain ? Hubert Védrine botte en touche en écrivant noir sur blanc le degré d’aplatissement des élites, notamment françaises, devant l’idéal transatlantique.
Irrévérencieusement, le propos d’Hubert Védrine se résumerait à dire à Nicolas Sarkozy qui découvre la grandeur française au fur et à mesure qu’il se déplace, soyez collé à l’histoire de la France, ne la sacrifiez pas sur l’autel de la communication, ne la dédaignez pas au profit d’une fascination pour la réussite à l’Américaine.
« Anticiper, être inventifs…(…) Veillez aux intérêts français, prévenir les clashs qui menacent entre civilisations où entre puissances », oncle Hubert referme son court ouvrage, le petit Nicolas dort à poings fermés, apaisé, le sourire aux lèvres. Il rêvera français : pourvu que ça dure !
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mercredi 5 septembre 2007

Pantomimes en Mésopotamie N°25 - 1ere année

La visite surprise de l’empereur du Potomac à Bagdad tait, un peu, la première étape du retrait des forces anglaises de la région de Bassora. Un flot de dépêches rend compte, une fois de plus, d’une possible attaque contre la Perse et plus précisément contre les gardiens de la révolution lesquels viennent d’être classés dans la catégorie terroriste par Washington sans avoir consulté quiconque. La ville de Bassora officiellement remise à l’armée de New Mesopotamia livre, en fait à très court terme, toute la province aux chiites tenus par Téhéran. Les cris de guerre américains masquent donc une défaite sévère, une énième étape pour la partition de ce pays. Georges Bush a martelé à ses soldats hors la loi internationale et d’occupation que l’arrivée de 26 000 hommes supplémentaires conforte le succès, de même qu’un retrait signifierait la victoire. Le Pentagone a beau interdire les blogs, censurer le Net, les militaires étoilés écarquillent les yeux, ils ne voient décidément pas la même amélioration que leur chef suprême. La grogne sévit autant en Orient qu’en Amérique parmi les généraux. Il y règne un désordre jamais atteint depuis la fin de la guerre du Vietnam. La négation de la réalité culmine à un degré si élevé que les acteurs véritables s’effacent devant l’irréalité affirmée par des gens qui ne bougent pas de leurs fauteuils en cuir.
De cette étape sur la base aérienne Al-Assad, débute la campagne de communication pour proclamer urbi et urbi l’évidente victoire quoiqu’il advienne. Alain de Chalvron, correspondant de France2 à Washington répercute sans sourciller le discours autorisé. Ce n’est qu’un début dans l’attente de la publication du rapport du général Petraeus.
Qui est dupe ? Personne en vérité. Mais tout le monde incline à user du conformisme. On préfère nettement ne pas contrarier une classe politique américaine d’une très petite qualité. Comme disent les Chinois, il ne faut jamais contrarier un fou. Résultat the rest of the world applaudit des deux mains quand il sait les dés pipés.
Pantomimes en Mésopotamie : les Anglais sont sur la pointe des pieds à l’inverse des Américains pas trop éloignés d’une superproduction hollywoodienne. Les pantomimes ne retardent plus la redistribution des cartes. Israël conforte son Etat-forteresse, laisse la bande de Gaza aux adversaires du palestinien Mahamoud Habbas pour mieux l’enserrer, le ferrer avec son peuple. L’Arabie Saoudite échaudée au Liban par la défaite à Nahr el-Bared du Fatah al-Islam, groupe financé par le prince Bandar, la famille Harriri- liée à Riad- et encouragé, en sous-mains, peut-être, par Dick Cheyney se tient coi. La Turquie joue les bons offices entre la Syrie et Israël, quoique sur le pied de guerre contre les Kurdes du PKK. Le gouvernement sis à Bagdad se sait en sursis. La pause observée par Moqtada Al-Sadr prélude des évènements où le sang se répandra. L’accalmie proclamée par les USA pour accueillir le travail de peine du général Petraeus baigne tout entier dans l’artifice. Les principaux acteurs se refont simplement une beauté avant l’acte suivant.

La visite d’Abdallâh II de Jordanie à Paris où Nicolas Sarkozy dit être en accord total avec son invité laisse pantois et n’augure rien de bon. Mais à l’Elysée, on joue le jeu en chantant « tout va bien madame la marquise ». Epoque cynique, décourageante, le peuple mésopotamien est bien le seul à ne pas se voiler la face. Il n’a pas besoin de pantomimes. Il assume ses blessures, sa chair à vif.

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mardi 4 septembre 2007

Le grand soir c'est fini, le lendemain qui chante aussi! N°24 - 1ere année

L’université d’été du PS à La Rochelle joua d’abord à la comédie de mœurs, François évite Ségolène et vice-versa puis décompta les éléphants : tous barrissent dans le jardin de l’Elysée !
Que restait-il donc de ce flamboyant parti qui devait sa renaissance au florentin François Mitterrand ? François Hollande dressé sur les planches gesticula énormément, s’égosilla à dénoncer l’UMP mais devant les jeunes socialistes, il sut trouver l’expression qui tue une soirée, le grand soir c’est fini ! Défense de boire, de draguer, rentrez chez vos parents ! Exit toute pensée révolutionnaire, tout chambardement social économique, place à la raison, à la réalité du monde global.
S’il fallait bien que le PS finisse par s’apercevoir que tous ses partis frères ne pensaient plus depuis belle lurette à contester le capitalisme, le pessimisme était-il le seul ton? Le socialisme hexagonal devant sa durée à son opposition frontale au capitalisme qu’il dénommait souvent par l’épithète de libéral (ce qu’il n’était pas) il claque quelque peu de tous ses membres, habillé des seuls lambeaux idéologiques. Le socialisme français meurt faute d’un habile stratège à sa tête lequel aurait embobiné les éléphants par la vanité au lieu de les courroucer. Remarquons que Nicolas Sarkozy, en fait de socialistes ne récupèrent que des vieux fusils à un coup. Les jeunes, au sens large, ont une réelle surdité à sa séduction. On ne comprend pas la crainte qui a poussé François Hollande à prohiber le grand soir brutalement comme par abandon.
Le parti peine à assumer les conséquences de la campagne présidentielle. Le couple Hollande/Royal n’était qu’un leurre et plus grave la candidate avoua, après le 6 mai, phrase après phrase que son programme n’était pas réaliste. La tromperie n’est pas loin. Nicolas Sarkozy ne pouvait pas résister à se saisir des têtes antiques socialistes pour sa propagande. Michel Rocard est le dernier à s’incliner, Mauroy, seul manque à l’appel ! Le nom du successeur de Hollande parcourt les rangs des militants, Bertrand Delanoë. Ce dernier a quasiment reçu de la part du chef de l’Etat un oui pour un second mandat municipal. Si d’aventure il devenait le premier secrétaire, le parti de la rue de Solferino s’endormirait en douceur au gré de quelques amusements chers à ce néfaste édile.
La décrépitude n’empêche pas le sursaut ! Or, le silence prévaut sur tous les sujets. On sait que la fusion Suez-GDF, outre la privatisation du gaz, mettra dehors entre 4 et 6 mille salariés, pas un mot, rien. La gauche est unanime à se mettre la poire d’angoisse dans la bouche. Muette jusqu’au bout. Idem pour le bouclier fiscal et l’impôt plancher. Comment se fait-il qu’elle s’immobilise, par exemple, devant l’incorporation de la taxe d’habitation dans le bouclier fiscal : son surplus serait remboursé par l’Etat, un impôt que l’Etat ne perçoit pas. Si l’injustice n’est pas flagrante et si la disposition n’est pas inconstitutionnelle, je ne m’y connais plus.
Plus de grand soir, plus de lendemain qui chante, les jeunes socialistes ont du pain sur la planche. Avis aux Rastignac et aux Rubempre, la patience durera longtemps.
JV©2007

lundi 3 septembre 2007

Le français vers la fadeur? N°23 - 1ere année

Le thème récurrent de la décadence de la langue française alimente les propos de quelques auteurs, le dernier en date est Richard Millet, membre du comité de lecture de Gallimard. Lors de l’entretien qu’il accorde au Point, je note toutes les récriminations. Elles sont nombreuses. Est-il besoin d’y revenir ? Nous les devinons : faiblesse de style, mépris pour la syntaxe, pour l’étymologie, dédain pour la floraison d’auteurs.
Ce long catalogue laisse perplexe tant il s’avère aisé de découvrir dans les librairies de petits trésors, des ouvrages quel que soit le genre d’une qualité indéniable. La langue française connaît des secousses depuis l’entrée en puissance, par exemple, de ce qu’on appelle facilement le langage de la « teci » (cité). Il est certain que nous assistons à une négligence des règles élémentaires de la grammaire. L’orthographe placée au service de la phonétique via le texto, la manie des acronymes, des abréviations pèsent sur la beauté de notre langue. Mais les règles ne datent que du XIXe siècle. J’ai longtemps lu des correspondances du XVIIIe siècle où les fautes étaient légion. La construction de la phrase, elle, était irréprochable. C’était une partition musicale impeccable.
Les intellectuels ont cessé en même temps que s’écroulaient les idéologies. L’homme moderne a-t-il besoin du référent, du père ? Certainement ! Mais l’actuel est trop daté. Le milieu traditionnel de l’édition (Saint-Germain des Près) a sombré. Les ultimes batailles des attributions des prix sont des scènes assez pitoyables. Ce sont là d’antiques structures qui s’affaissent quand de plus en plus d’hommes se mettent à rapporter, à conter. Internet a considérablement raccourci la voie vers la publication. Le net a multiplié en toute logique des milliers de textes fades mais aussi d’un nombre égal de qualité. L’opprobre que les anciens jettent sur ces nouveaux narrateurs parce qu’ils se contentent de l’immédiat n’est pas juste. Le point positif n’est-il pas de noter le nombre croissant de gens séduits par l’histoire, le petit mot ? Notre société quoique au milieu de l’image exprime toujours autant l’envie de tenir non plus la plume mais de taper sur le clavier.
Richard Millet dit que les littéraires ne lisent plus, que les anciens lassent les étudiants…etc. C’est vrai. Mais ce fait exact induit-il la non valeur de l’écrit moderne?
Dans le noir tableau dressé, on voit sans fard que l’on oppose une société d’édition alanguie, un milieu littéraire décrépi aux mobilités de l’homme moderne. Le manque de repères collectifs, la faiblesse de la culture générale ne bloqueront pas l’émergence de nouveaux talents. Quant à la dénonciation de la langue anglaise omniprésente sur nos rayons, ce sont les éditeurs qui lui servent de marchepied ! Ne voit-on pas dans les FNAC, par exemple, les petits coins laissés aux autres littératures ? Cette domination ne l’est que par la paresse et le manque de travail de bien des directeurs de maison.
Le français ne s’affadit point, il se meut. Cette mue choque, elle indispose, elle heurte les règles d’une société mais elle se poursuivra inexorablement. Les apports des français issus de tant de pays, des francophones repartis sur la planète sont de formidables viviers. On oublie, un peu trop que la langue anglaise connaît aussi des secousses telle l’émergence d’une langue américaine sans omettre les anglophones qui la façonnent à leur manière. La langue française ne faiblira pas tant que nous saurons qui nous sommes. Et nous avons mille ans d’âge.
JV©2007