Info

Nouvelle adresse Seriatim
@seriatimfr
jeanvin22@gmail.com



jeudi 21 février 2008

Alain Robbe-Grillet: il est Minuit! N°145 - 1ere année

L’écrivain Robbe-Grillet est inséparable des Editions de Minuit, nées clandestinement, en 1942, sous la houlette de Pierre de Lescure et de Jean Bruller (Vercors) pendant l’Occupation. Robbe-Grillet avait vingt-ans.
Les Editions de Minuit, au sortir de la guerre, surmonteraient-elles la clandestinité ? Grandiraient-elles parmi les autres concurrents qui se remettaient plus ou moins rapidement de leurs relations « intimes » avec les nazis ? Jérôme Lindon, entré comme stagiaire, en prit les rênes en 1948. Il comprit la nécessité de se placer en avant-garde, de lancer de nouveaux concepts.
L’historienne de la littérature, Anne Simonin nous dit que cette maison se fixait pour tâche la «
modernisation littéraire » et d’être le « fer de lance dans les combats du siècle. »¹ En un mot, il fallait faire de la communication, happer les auteurs modernes et les fédérer autour d’une idée ! En sus de la bienveillance et du soutien de Jean Paulhan, le mythique patron de la NRF et d’Alain Robbe-Grillet venant avec son souci d’en découdre avec le roman classique, Lindon avait sous la main des bons hommes.
Au sortir de la guerre, tout était neuf ou bien se devait de l’être : Nouvelle vague pour le cinéma (Françoise Giroud dans l’Express, en 1957), Nouveau Roman pour la littérature. En 1957, Alain Robbe-Grillet s’attira les foudres d’Emile Henriot, critique au
Monde (avant il était au Temps) pour la Jalousie : c’était donc çà « le nouveau roman » ! Expression négative qui grandit dans le cerveau du romancier. Il collectionna les essais sur la nature et le futur du roman où il rejette en bloc la construction du roman classique (balzacien) : intrigue, portrait psychologique…etc. Selon Jean Ricardou, « le roman n’est plus l’écriture d’une aventure, mais l’aventure d’une écriture. » En France, ce genre de phrase fait mouche ! Et Alain Robbe-Grillet se hâta de théoriser le concept du Nouveau Roman en publiant en 1963, le fameux, Pour un nouveau roman. Dix années plus tôt, son livre, Les Gommes, pastiche du roman policier préparait le terrain par son parallélisme entre l'acte de lecture et la résolution d'une enquête policière. Dans les deux cas, un individu devait reconstruire une trame qui lui échappait d'abord à partir des indices qu'il ramassait.
Alain Robbe-Grillet surfera jusque dans les années 1970 sur le Nouveau Roman avec les Editions de Minuit. Les universitaires étrangers le réclamaient : l’écrivain eut la sagesse de répondre à l’appel. Sa participation au superbe scénario de l’Année dernière à Marienbad d’Alain Resnais en 1961 le plaçait aussi dans le renouveau cinématographique. Il enseigna alors avec succès aux Etats-Unis et en Belgique.
Le Nouveau Roman ne résista, ni aux événements de Mai 68, ni à l’entrée en force des auteurs « engagés » politiquement et aux Nouveaux Philosophes menés, notamment, par Bernard-Henri Lévy.
Marié en 1957 à Catherine Rstakian (Jean de Berg), devenue la papesse du sado-masochisme; le couple draina une réputation sulfureuse qui entretint les fantasmes et les désirs inassouvis. C’est un excellent procédé pour durer dans la littérature et animer les conversations des dîners en ville. Libertinage germanopratin ? Ses romans obliquèrent logiquement vers l’érotisme.
Alain Robbe-Grillet était-il un homme important ? Se souviendra-t-on de son œuvre ? On n’oubliera pas qu’il sut deviner avant les autres l’habileté à revendiquer une autre forme de récit, d’écriture dans une période de l’immédiat après-guerre. Bien des auteurs connurent grâce à lui la publicité, Nathalie Sarraute, Claude Simon, d’autres un peu moins, Michel Butor, Jean Cayrol, Marguerite Duras.
En 2004, il refusa de porter l’habit vert d’académicien, prétexte à d’ultimes passes d’armes. Il partit dans la nuit du 17 au 18 février 2008…vers l’immortalité ?
Les Editions de Minuit continuent.

©Jean Vinatier 2008

Commentaires : Si vous n’avez pas de compte Gmail, et pour éviter le noreply-comment veuillez envoyer vos commentaires à :
jv3@free.fr

Source :

1-
http://bbf.enssib.fr/sdx/BBF/frontoffice/1995/04/document.xsp?id=bbf-1995-04-0108-016/1995/04/fam-critique/critique&statutMaitre=non&statutFils=non

Aucun commentaire: