Info

Nouvelle adresse Seriatim
@seriatimfr
jeanvin22@gmail.com



vendredi 22 février 2008

Fidel Castro se retire : une fin morne N°146 - 1ere année

El Comandante¹ a fait dire qu’il quittait ses fonctions de chef de l’Etat cubain tout en gardant le premier poste du parti communiste. Ce départ a suscité beaucoup de commentaires. Mais dans le contexte international, cette nouvelle est-elle un événement ? Il est difficile d’expliquer l’importance de Fidel Castro dans ce qu’il a de particulier historiquement. C’est à un retour en arrière qu’il faut s’astreindre pour convenir ou pas de son originalité. Avec les années 1950 débute la guerre froide. Le monde est véritablement coupé en deux tandis que les puissances européennes se battent pour garder leur empire colonial respectif ; ainsi, la France, la Hollande. L’antiaméricanisme de l’Amérique hispanique et lusophone ne faiblit pas puisqu’il sert à régler des répartitions de pouvoir à l’intérieur de ces Etats et à entretenir une fierté face à Washington toujours perçue comme négative. L’île de Cuba devient un point de fixation emblématique. Pourquoi ?
Les longues et sanglantes luttes des Cubains (guerre de Dix ans, 1868-1878) pour arriver à l’indépendance en 1898 reproduisent avec des décennies de retard celles qui furent menées en Amérique latine au lendemain des guerres napoléoniennes. La fin de la domination espagnole sur l’île (traité de Paris, décembre 1898) n’aboutit pas à…l’indépendance mais à l’occupation militaire américaine (1898-1902) ; puis à la sujétion du gouvernement cubain aux Etats-Unis via l’amendement Platt (1902) lequel mettait le pays sous leur influence presque complète. C’est le Président Grau San Martin (1933-1934, 1944-1948) qui le déchirera en 1934 alors qu’il entreprenait un vaste programme de réformes sociales et économiques. Ce dernier était en lutte contre un miliaire sorti de rien, Fulgencio Batista (1901-1973) chef d’Etat-major de l’armée et complètement soumis à Washington. Les luttes furent sévères à Cuba dans les années 40 et au début de la décennie suivante entre les pro et les anti-américains. Le 10 mars 1952, Batista s’emparait de La Havane, livrant le pays aux gangsters américains et portant la corruption à un degré jamais atteint. Cuba était devenu un bordel !
Fidel Castro né en 1926, fils de grand propriétaire comme Grau San Martin, n’eut aucun mal à débuter une guérilla contre le régime. Son échec et sa capture devant la caserne de la Moncada (juillet 1953) auraient dû le mener à la mort si l’archevêque de La Havane n’était pas intervenu en sa faveur. Libéré en 1955, il prépare, au Mexique, aux Etats-Unis, avec son frère la poursuite de la guérilla contre Batista. Rentrés clandestinement à Cuba en décembre 1956 à bord du Granma² avec Che Guevara, ils échappent de peu à l’armée de Batista. La conquête du pouvoir débute. Les medias américains font de Castro un héros et Washington, embarrassé par la brutalité de Batista, cesse son aide armée. Ce mouvement de retrait et la couverture médiatique vont donner un coup d’accélérateur décisif au mouvement dirigé par Fidel Castro. Le 8 janvier 1959, il entre dans La Havane. Liberté ? Et bien non ! Fidel Castro est un homme de pouvoir. Il fera arrêter et fusiller les opposants par centaines tout en opérant un vaste programme de nationalisations qui lui aliènent les Etats-Unis. Les couches moyennes fuient par milliers. Il se tourne vers Moscou en février 1960. L’échec d’un débarquement de forces anti-castristes dans la baie des cochons (17 avril 1961) décide le régime à se définir comme socialiste. L’installation de missiles balistiques à moyenne portée soviétiques à Cuba en 1962 si elle aboutit devant les protestations américaines à leur retrait comprenait, en échange, l’assurance que jamais Washington ne chercherait à envahir l’île. L’embargo seul s’appliqua contre le régime castriste. Fidel Castro a été un bon manœuvrier !
Le régime castriste fit des bonnes choses en alphabétisant toute la population et en créant un système de santé de qualité (20 000 médecins ont été envoyés à l’étranger dont le Venezuela de Chavez) avec l’accès aux soins gratuits. Hélas, le régime plaça les Cubains sous une surveillance stricte. Les prisons cubaines sont pleines.Fidel Castro a joui de la faveur planétaire dans les décennies 60 et 70 quand le monde occidental entrait dans une série de crises et de doutes de toutes natures. Cuba envoya en Afrique (Angola, Ethiopie) des milliers de combattants pour continuer la révolution entre 1975 et 1988. Echecs extérieurs. Répression intérieure face à la contestation militaire favorable à une évolution du type Gorbatchev. Le général Ochoa³ le paiera de sa vie. Le régime s’enferme et s’organise pour assurer sa survie. Que reste-t-il de Castro ? C’est triste à dire, seulement l’image d’un dictateur porté par une immense espérance populaire. Fidel Castro est aussi un homme de pouvoir d’un autre temps. Il est presque anachronique. Son frère Raul, lui succède de fait.
Cuba est une île paradisiaque pour les touristes alors qu’elle compte des prisons où les droits les plus élémentaires ne sont pas appliqués : celles du régime castriste, celle située dans la base de Guantanamo (allouée par l’Espagne avant 1898 au gouvernement américain) où sont les « terroristes » décidés unilatéralement par l’administration Bush.
Cuba, île maudite ? La liberté du citoyen cubain n’est pas pour demain!


©Jean Vinatier 2008

Commentaires : Si vous n’avez pas de compte Gmail, et pour éviter le noreply-comment veuillez envoyer vos commentaires à :
jv3@free.fr

Notes:

1- El comandante désigne Castro à Cuba , les étrangers disent, « el lider maximo. »
2- Granma est le journal du régime
3- Arnaldo Ochoa né en 1930, fusillé le 12 juillet 1989. Général devenu populaire et respecté tant par les combattants angolais que par les soviétiques. Sa popularité porta-t-elle ombrage à Castro ? On l’accusa, naturellement, de trafic de drogue.

Aucun commentaire: