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mardi 21 mai 2019

Bruxelles tic-tac N°4577 13e année


La démission du vice-chancelier autrichien (et des ministres de droite) pour une affaire de corruption qui remonte à deux ans et l’annonce d’élections anticipées pour le mois de septembre ne pourraient être que d’aimables vaguelettes à l’issue du scrutin européen du 26 mai.
Le premier grand coup de canon viendra du Royaume-Uni, grâce à l’Union européenne et à une partie de Westminster. Le Brexit Party de Nigel Farrage caracole en tête (30 à 34% des intentions de vote), les conservateurs et les travaillistes s’effondrant au profit d’une multitude de listes (Lib-dem, Verts…etc). Les sondages britanniques marqueraient un retour du peuple anglais, celui qui a voté majoritairement pour le Brexit et qui ne pardonne décidément pas aux deux grands partis d’avoir joué à qui perd gagne entre eux et avec le concours de l’Union européenne. Ce réveil politique, s’il est confirmé le jeudi 23 mai, produira de grands changements dans la vie intérieure anglaise : d’abord avec le départ de Theresa May ou bien avec des élections anticipées, ensuite par la possible disparition du parti conservateur au profit du Brexit Party ; enfin, par l’idée fausse du travailliste Jérémy Corbyn de croire que la chute de l’actuel ministère le propulserait inévitablement au 10 Downing Street.
Londres risque bien de donner les trois coups d’une nouvelle pièce historique dont l’Union européenne ne sortira pas indemne.
De l’aveu même de certains médias français, le ministre italien Salvini est  l’homme fort du continent. Une année plus tôt, les mêmes avançaient la chancelière, Angela Merkel. Ce basculement d’un ordre vers une possible reconfiguration politique dans l’ensemble des 27 Etats-nations interroge beaucoup.
L’Etat-nation le plus symbolique face à ce possible espace politique est la France. La « grande nation » comme on dit ironiquement Outre-Rhin, patauge dans une campagne où « Loiseau ne fait pas son nid », avec un Chef de l’Etat qui s’imagine encore en 2017, imprudemment engagé sur des affiches électorales et qui refusera, en cas de défaite, d’en tirer une réponse institutionnelle sans doute encouragée par ce qu’il croit être l’apparente apathie des Français. Le second Etat est bien évidemment une Allemagne comme arrêtée : une chancelière en bout de course, une grosse coalition (SPD/CSU/CDU) immobilisée, une extrême-droite qui ne progresse plus face à des libéraux et des Verts en pleine ascension. Ces transferts d’électeurs vers deux partis qui ressemblent par leurs idées à la continuation d’une Europe dont de plus en plus de peuples ne veulent plus, sont un déplacement de plaque de glaise tectonique. De quel côté l’Allemagne se tournera-t-elle ? Berlin abhorre Donald Trump mais que fait-elle pour se placer en rupture, être révolutionnaire ? Et bien, strictement rien. L’idée prédominante est patience, l’ordre ancien reviendra.
Face à un Royaume-Uni qui serait prêt au grand bond dans le défi historique avec un Brexit dur, la tétanisation des partis politiques traditionnels franco-allemands révèle l’impasse dans laquelle ils se trouvent face à des partis, populistes, souverainistes, patriotes…etc  déjà vainqueurs. Leurs arguments  et programmes étant repris avec d’autres mots par leurs opposants. Tout comme les Gilets jaunes sortent « lauréats » de presque sept mois de protestation, contraignant l’exécutif a se barricader tous les samedis dans une espèce de forteresse mobile entre l’Elysée et le Quai d’Orsay via la place de la Concorde.
Le risque d’un choc très violent entre ceux qui tiennent à une Union européenne sans frontière dessinée et ceux qui appellent à œuvrer en écoutant ces mêmes peuples est réel. L’ère de la construction européenne comme seul espace géographique de libre circulation des hommes et des capitaux d’où qu’ils viennent, s’achève.
Si le Royaume-Uni avec les résultats que l’on présuppose, se séparait d’un coup bien net de l’Union européenne, cette rupture de corde d’amarrage ferait sans doute prendre bien plus de gite au continent qu’à l’île britannique, habituée depuis des lustres à affronter les éléments. Le Royaume-Uni est solide, a sa monnaie, le Commonwealth, de nouvelles réserves en pétrole et gaz de schiste et dispose déjà d’un accord de libre-échange avec Bruxelles via …le Canada. Quant à l’Union européenne, qui dispose pourtant d’atouts et de moyens, elle peut craindre de payer au prix fort son constant refus de s’envisager en tant que Politique. Le doux commerce ne suffit pas pour qu’émerge un peuple européen. Entre les patriotes et les « euro-mondialistes » se place l’Identité : qui sommes-nous ?

Jean Vinatier
Seriatim 2019

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