Info

Nouvelle adresse Seriatim
@seriatimfr
jeanvin22@gmail.com



vendredi 10 avril 2020

Union européenne/euro : ambiance Pirate des Caraïbes N°4876 14e année


Après des semaines de disputes et d’un échec, finalement, hier soir, l’Eurogroupe s’est entendu pour établir un plan de relance évalué à 500 milliards d’euros (hier la FED injectait dans l’économie américaine 2300 milliards de dollars) soit trois piliers d’un immense convoi de prêts, d’aides dont il faudra assurer le remboursement.
Quant au plan de relance ou quatrième pilier (français), il reviendrait aux chefs d’Etat et de gouvernement de s’entendre pour savoir s’il s’agirait de dettes mutualisées ou pas : les députés néerlandais ont déjà répondu négativement !

Le vice-chancelier et ministre des finances allemand, Olaf Scholz affirme : « c’est un grand jour pour la solidarité européenne » quand Bruno Le Marie clame : « pas de bons compromis sans bonnes ambiguïtés ».
Solidarité et ambiguïtés, deux mots qui résument le terme tout à fait provisoire des querelles et des suivis de ces mesures dont le contribuable aura à payer le prix.
Ces discussions constantes se sont déroulées au terme de la « guerre des masques »: on vit des Etats européens se saisirent de stocks de masques destinés à d’autres Etats européens : spectacle lamentable très « Pirate des Caraïbes » qui soulignait, une fois encore, la faiblesse de la solidarité intercontinentale.
Davantage depuis le Brexit, l’Union européenne est entre les mains de l’Allemagne et des Provinces-Unies. La Haye et Berlin alternent good cop/bad cop. Cette fois-ci, les néerlandais eurent apparemment le mauvais rôle qui permettait à Berlin de parler « solidarité » pour contenter la demande française.
Cet accord à l’arraché aura des longues réunions pour la mise en place des piliers de lignes de crédits et du fonds de garantie,  tout en se faisant sous les yeux scrupuleux de La Haye et de Berlin. Aux Provinces-Unies, le parlement a voté son soutien au Premier ministre très opposé aux coronabonds quand Berlin, écoutant les remarques du patronat et plus particulièrement celui du secteur automobile dont les sous-traitants sont très nombreux en Italie du nord, lâche du lest au nom « de la solidarité européenne » en réalité pour soulager son pays très largement exportateur : charité bien ordonnée…
Paris, de son côté, s’agrippe à la mutualisation des dettes chère à l’Europe du sud (« le club Med pour Angela Merkel) et dont la France aimerait bien être le porte-drapeau : c’est son quatrième pilier  qui baigne dans le flou complet.
Très clairement, l’Allemagne et les Provinces-Unies sont les deux Etats qui ont le plus de capitaux, de richesses et occupent la tête-liste des pays sérieux pour les financiers mondiaux. Berlin a réussi à reconquérir son rang de grande puissance industrielle et financière via les étapes de la construction européenne et a su placer sous son égide l’euro. Géopolitiquement, l’Allemagne a sous son aile d’influence toute l’Europe, du Nord (pays baltes), centrale et le Benelux. La France n’a gardé que le seul verbe politique tout en délocalisant des pans entiers industriels : elle n’est plus en mesure de peser sur l’Allemagne. Qu’on ne s’y trompe pas, c’est Berlin qui donne le tempo « solidaire » et laisse à Paris les incantations.
D’une façon plus générale, cet afflux monétaire ne suffit pas. A tous ces milliards magiques qu’y-t-il en face, c’est-à-dire politiquement, philosophiquement, spirituellement, stratégiquement ? Rien, le vide total. Bien sûr, il est normal de se féliciter des nouveaux crédits (à rembourser) pour une reprise d’activité entrepreneuriale, néanmoins, faudrait-il voir au-delà à moins que l’Union européenne n’ait de finalité que la répartition des milliards.
Le coronavirus s’il perturbe les dogmes économiques en cours ne renverse pas la table européenne. On y voit une continuité avec les mêmes outils qu’hier et le bon fonctionnement du duo germano-batave qui verrouille l’irrigation financière tout en préservant ses intérêts nationaux (automobile allemande) tout en veillant, par exemple à éviter une nouvelle crise politique en Italie, gardant en réserve la carte Draghi.
Alors, la remarque du ministre Le Maire qui mettait en parallèle « compromis » et ambiguïtés » n’était- elle pas sans ambiguïté !


Jean Vinatier
Seriatim 2020

Aucun commentaire: