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dimanche 13 octobre 2019

Kurdistan : questions autour d’une offensive à tiroir ? N°4661 13e année


Depuis que Donald Trump a autorisé Recep Erdogan à lancer une offensive contre les kurdes situés au nord-est de la Syrie où sont, notamment, les disciples d’Ocallan qui ont imposé sur une part du territoire l’apoisme1, nous avons une foule de commentaires et d’analyses sur les conséquences mais nul ne parait s’interroger sur le pourquoi de cette décision géopolitique. Interrogeons-nous.
Quel serait l’intérêt pour le Président Trump d’autoriser son homologue turc à partir en guerre contre les Kurdes syriens alors que les relations entre les deux pays ne sont pas au beau fixe?
1-Satisfaire l’opinion publique américaine à un an de l’élection présidentielle
2-Le voir s’enliser dans un conflit alors même qu’il est en quête de succès éclatants pour reconsolider ses soutiens intérieurs ?
3-Faire revenir Ankara sur son rapprochement avec la Russie (affaire des missiles S-400) ? 
4-Sous couvert de laisser une opération militaire contre les Kurdes, ces derniers par contrecoup laisseraient d’égailler dix mille djihadistes dont ils sont jusqu’en cette heure les gardiens ?
5-Y aurait-il, alors, un double objectif américain : d’abord affaiblir le président turc, ensuite par la libération des djihadistes d’effrayer les européens ?
Quel serait le reproche de  Donald Trump aux Kurdes pour leur retirer son appui militaire et donner carte blanche à Ankara ?
Les Kurdes ont combattu les islamistes sans faiblir. A la vérité, Donald Trump n’a aucun reproche à leur formuler. Les Kurdes sont, seulement et à nouveau, les jouets entre les mains d’une puissance qui aurait décidé, de les sacrifier afin d’atteindre par ricochet mais dans un second temps: l’Union européenne.
Donald Trump n’a jamais caché qu’il regardait l’Union européenne (l’Allemagne en tête puis la France) comme un obstacle dans la guerre commerciale qu’il mène contre la Chine. Le choix du feu vert à la Turquie contre les Kurdes syriens, gardiens des djihadistes  n’a rien d’anodin : n’est-ce pas, à moyen terme, un signal envoyé vers l’Union européenne : soit elle rentre dans le rang et accepte le diktat d’outre-Atlantique, soit elle devra assumer et gérer les conséquences, nécessairement, graves de la mise en liberté de plusieurs milliers de djihadistes dont on imagine bien les actions terroristes qu’ils opéreraient d’abord en Orient puis sur le sol européen ?
Devant cette menace que peut faire l’Union européenne ? Pour l’heure seulement :
1-L’Allemagne a suspendu les livraisons d’armes à la Turquie.
2-La France dispose officiellement (et en toute illégalité) de 200 hommes sur le sol syrien et a également interrompu les contrats militaires2 avec Ankara. Paris misait tout sur la bonne entente avec les Kurdes syriens pour revenir à la table des négociations sur le devenir de l’Etat alaouite et effacer les conséquences de sa politique menée depuis 2011 avec le choix d’appuyer ,alors, sciemment des organisations islamistes dès l’instant où elles combattaient Bachar Al-Assad.  Le timide rapprochement avec la Russie, permettrait-il d’agir de façon conjointe pour endiguer le flot de djihadistes ? Vladimir Poutine a bien dit qu’il ne les laisserait pas s’éparpiller  mais a-t-il réellement les moyens d’y parvenir?
Le Président russe, en déplacement, en Arabie Saoudite a proposé l’évacuation de toutes les forces étrangères présentes en Syrie y compris ses soldats si Damas l’exigeait. C’est là un propos habile puisque la seule force armée étrangère installée légalement en Syrie est celle de Russie ! Le régime alaouite, appuyé par Moscou et Téhéran, voudra-t-il tendre la main aux Kurdes syriens et vice-versa ? Ces derniers, s’ils réussissent à attirer l’armée turque dans le territoire kurde en Irak tiendront-ils suffisamment longtemps pour convaincre de l’intérêt à les soutenir ?
Aujourd’hui, seul Vladimir Poutine pourrait ramener Donald Trump  vers une nouvelle approche de la situation qui a tous les ingrédients pour dégénérer rapidement en conflit régional……
Comment évoluera le vent du chaos depuis le nord-est syrien… alors même que Recep Erdogan est en roue libre ?


Jean Vinatier
Seriatim 2019

Note :
1-Il s’agit du municipalisme libertaire décrit dans les travaux de l’américain, Murray Boockchin, adopté par Abdullah Ocallan en confédéralisme démocratique dans le Rojava syrien.
2-Paris ne juge pas utile de suspendre les livraisons de matériel militaire à l’Arabie Saoudite en guerre au Yémen et qui massacre allégrement la population….

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