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dimanche 25 avril 2021

De Samuel Paty à Stéphanie M N°5668 15e année

A la mi-octobre 2020, après la décapitation du professeur Paty dans une rue de Conflans- Sainte-Honorine que nous n’entendîmes pas : plus jamais cela ! Et pourtant qu’advient-il ? Rien. Fin avril 2021, à Rambouillet c’est l’assassinat d’une fonctionnaire de police dans le commissariat même : qu’entend-on, les mêmes dires. Et qu’adviendra-t-il ? Rien?

À la suite de ces événements, certains croient à un épiphénomène, d’autres le contraire… entre les deux, il y eut la demande maladroite de la ministre de la Recherche pour connaitre l’épaisseur et l’étendue d’un courant islamo-gauchiste dans les universités qui souleva un tollé du corps enseignant et puis la rivière intellectuelle regagna son lit…

Pourquoi rappeler cet intermède gouvernemental sans lien direct entre les deux morts ? Tout simplement pour montrer comment la société française s’engluerait et se recroquevillerait.

Les minorités sont bien plus redoutables que les masses, les premières ont l’intelligence de l’action quand les secondes guettent le sens du vent.

Chaque jour, les médias et les réseaux nous apprennent telle émeute dans telle ville, tel crime, autre que celui du fait divers, ici et là…Mais ce quotidien de l’annonce banalise les multiples drames et violences qui se produisent. A chaque fois nous avons les promesses, les annonces et à chaque fois, l 'ordinaire reprend son cours. Pourtant, plus les mois passent, plus les services observent la montée en puissance de projets terroristes, tous déjoués jusqu’à présent. Entre les actes isolés et ceux qui programment des attentats multiples en même temps sur le territoire, il y a un spectre immense. L’approche de la présidentielle, nos fragilités sahéliennes du Tchad au Mali, les guerres urbaines, nos repentances renouvelées où le Chef de l’État appelle en anglais (CBS) à « déconstruire notre propre histoire », font de la France une cible considérable, une ville ouverte….

Nous avons tort de regarder les problématiques migratoires en se référant à notre seul passé colonial et esclavagiste. Les migrations ne se développent pas parce que nous eûmes seulement des colonies. C’est là une entrée en matière biaisée qui nourrit plus les cerveaux des sociologues que celui du migrant (de l'exilé?) qui fuyant une sécheresse, une corruption, un conflit, une pauvreté est dans un nomadisme contraint, une souffrance. Personne n’aime à quitter son village, ses habitudes, son milieu. A la douleur du départ s’ajoute l’énigme de l’arrivée, parfois douloureuse. Pense-t-on, par exemple, que les migrants russes, italiens, allemands, scandinaves, polonais du XIXe siècle vers les États-Unis et la France se mouvaient de gaité de cœur ? L’accueil américain n’était pas plus tendre que celui français, c’était le triage… !

S’ajoute la problématique religieuse, l’islam qui véhicule les imaginaires, positifs et négatifs et s’agrège aux migrations quand le continent européen, sans finalité politique, tombe en pâmoison et que la France ne parait plus tenir à la laïcité, un principe juridico-politico-religieux qui grandit à travers les siècles français pour culminer en 1905. Le doute fait des ravages, rend poreux une société, la décourage : elle croit qu’en se calfeutrant dans l’émotion l’orage l’épargnera.

Nous sommes dans les illusions, nous dédaignons les réalités. La France est une idée politique unique au monde. Elle a forgé des principes simples : l’indépendance temporelle et spirituelle à l’égard des empires. Quand en 1588, Henri III qui venait d’être chassé de Paris par les ligueurs, réfugié à Rouen refuse à l’ambassadeur de Philippe II de lui rendre les rameurs turcs échappés de l’Invincible armada échouée sur nos côtes, il le justifie posément par respect pour l’alliance avec le Sultan et plus profondément : tout homme arrivant sur le sol de France est un homme libre…Cet exemple pour écrire que tant que la tête politique a conscience de ce qu’elle est, qu’elle l’assume quelle que soit la circonstance, qu’elle sait succéder dans une Histoire (le roi est mort, vive le roi), le pays tient. Et la France du XVIe siècle malgré trente-sept années de guerres inter-religieuses (1561-1598) a tenu.

Le problème actuel est la tête. La tête qui nous gouverne est-elle a-historique ou pas ? Charles Ier d’Angleterre, Louis XVI, Nicolas II de Russie jusqu’à la mort ne cessèrent pas de se vivre presque mystiquement, anglais, français, russe. Qu’en est-il en 2021 ?

On ne s’éloigne pas des morts tragiques de Samuel Paty et de Stéphanie M, le premier enseignant l’histoire, la seconde, policière autrefois « gardien de la paix ». Deux fonctions importantes structurantes pour être en société. La décapitation de Samuel Paty, le coup de poignard contre Stéphanie M, l’égorgement, en 2016, du père Hamel par l’arme blanche est très symbolique pour tuer l’impur : Henri III, Henri IV, Louis XV (blessé par Damiens un exalté)  

Le message envoyé par ces fanatiques, individuels, groupés ou fous est qu’ils craignent que nous ne gagnions contre eux alors ils nous éprouvent. Notre Histoire est là debout : qu’en est-il de la Tête politique ? Mais ce que fait ou ne fait pas la Tête politique ne dédouane pas ce que font ou ne font pas les citoyens. La prise de conscience politique est générale ou pas. Sera-t-on capable d'en tirer des raisons politiques?

A des milliers de kilomètres au Pakistan, la détestation française est dans la rue, notre ambassadeur menacé…Silence élyséen….

 

Jean Vinatier

Seriatim 2021

 

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