Info

Nouvelle adresse Seriatim
@seriatimfr
jeanvin22@gmail.com



mercredi 23 juin 2021

De l’Allemagne à l’aire germanique N°5743 15e année

 Le sommet européen des 23/34 juin terminera la présidence tournante portugaise du Conseil de l’Union européenne pour laisser la place à la Slovénie laquelle s’effacera le 1er janvier 2022 devant la France, quelques semaines avant le début de la campagne présidentielle, source de manœuvres et de biais.

Évidemment c’est l’Allemagne qui aura toute la place prééminente, débarrassée du Royaume-Uni et face à un Emmanuel Macron qui érige McFly/Carlito et Justin Bieber en têtes de gondole de l’avenir.

La chancelière, quoiqu’en fin de mandat, aura la satisfaction de laisser la place soit à Armin Laschet (CDU/CSU) soit à Annalena Baerbock (Grünen), à une Allemagne redevenue le centre du continent européen et à la croisée des voies géostratégiques depuis Pékin jusqu’au Washington en passant par Moscou et, désormais, avec des projections en direction de l’Afrique. Sa considérable puissance financière, ses groupes industriels puissants contrebalancent aujourd’hui encore positivement sa démographie et sa linguistique défaillantes. C’est donc une Allemagne qui a regagné en influence incontournable tant en Europe que dans le monde.

Je le répète souvent, l’Allemagne a très tôt vue tout le potentiel de la construction européenne pour se refaire une place et éviter, grâce à la protection militaire otanienne, de renouer avec des démons et des frayeurs auprès de ses voisins immédiats. Berlin s’active, désormais, à se consolider en développant une aire germanique qui engloberait le Nord et Centre du continent où le protestantisme joue toujours un rôle non négligeable. Pourquoi une aire ? Comme pour tout politique digne de ce nom ou de dirigeant de société, sa logique est de paramétrer une vision, d’évaluer les temps à venir. Que les politiques allemands pensent ou non de la viabilité de  l’Union européenne et sa monnaie, ils posent les jalons de ce que pourrait être une partie européenne autonome de son sud.

Étrangement, alors que les défis démographiques viendront d’Afrique noire auxquels se greffent et se grefferont des calculs islamistes, l’Europe sud n’affiche absolument pas de projet similaire à celui de Berlin : la France s’accroche à la vision hanséatique d’Angela Merkel convaincue que le « couple franco-allemand » est le seul qui vaille. Le problème fondamental est l’équilibre entre les deux puissances : la première allemande a gardé tout son tissu industriel et financier quand la seconde française ne présente pas du tout les mêmes piliers lui préférant l’outil militaire et son vaste espace maritime. Pour l’heure, Berlin ne les regarde pas comme équivalents : pour la chancellerie le monde passe au nord quand les fléaux viendront du sud et si ces derniers, actuellement, ne sont pas estimés encore gravissimes, ils sont dans la ligne de mire. Si l’Allemagne n’a plus la même déférence envers la France, elle sait que notre potentiel militaire aura son utilité d’où les prises de participation dans nos niches industrielles de l’armement, de la technologie sensible. Son idée serait, à terme, que l’armée française se nolise en fonction de ces besoins.

Ce que le grand public ne discerne pas, c’est qu’à l’intérieur de l’Union européenne, se dessine des aires (autrefois on parlait des cercles d’empire romaine germanique) qui devront d’une manière ou une autre obéir à un courant allemand.

Lors du mandat de Nicolas Sarkozy avait été lancé un projet méditerranéen aussitôt dénommé « Club Med » par Berlin et que la France ne poursuivit pas ni sous Hollande ni sous Macron laissant l’Italie regarder vers Berlin quand Paris a résumé sa politique maghrébine et africaine à des exercices de repentance nous affaiblissant et délitant ce qui nous restait d’aire.

Opportunément Vladimir Poutine vient d’accorder un long entretien à Die Zeit, « Être ouvert, malgré le passé » dans lequel, il appelle à la coopération (« partenariat global ») et aux points communs au vu de la dégradation de la sécurité, de la « stabilité stratégique ». Ces propos sont à destination de l’Allemagne et entrent parfaitement dans les réflexions berlinoises qui veillent à ne pas froisser Washington tout en sachant que l’administration Biden dans sa confrontation avec la Chine a besoin d’assurance en Europe : d’où le jeu à tiroirs allemand.

Le sommet européen à Bruxelles où est une maison allemande (les Saxe-Cobourg et Gotha) et présidé par le Portugal dont les derniers rois étaient aussi de cette maison (1837-1910) sera donc un point d’orgue d’Angela Merkel. Il est certain que ces successeurs, même les Grünen qui se voudront plus « mondialistes » que la CDU/CSU, n’en saperont ni les fondations, ni le patient labeur de la reconstitution d’une aire germanique: demain une ère ?

Concluons: comparée à la France cigale, l’Allemagne est fourmi……..

 

Source :

https://lanouvelletribune.info/2021/06/europe-poutine-met-en-garde-contre-la-degradation-du-systeme-de-securite/

 

Note :

Voir aussi dans le Financial Times l’entretien : “Armin Laschet on Merkel, the Greens and fiscal rules” qui n’annonce pas des lendemains qui chantent : orthodoxie budgétaire, retour aux principes de Maastricht.

 

 

Jean Vinatier

Seriatim 2021

Aucun commentaire: