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mercredi 26 mars 2008

Sarkozy à la Reine : Just a kiss! N°168 - 1ere année

Les choses sont claires : toutes les caméras et tous les appareils photos seront braqués sur le moment de la révérence de Mme Sarkozy devant la Reine et la possible gaffe de son époux. Cette visite d’Etat, la première du quinquennat prend donc une tournure éducative, d’usages de cour et de bon ton. On regrette, même, que Nicolas Sarkozy ne se soit pas rendu à Londres dés son entrée en fonction, dix mois de vulgarité eussent été épargnés.
Cet aspect officiel noté, le déplacement du Président de la République devrait-il faire bouger les relations avec le gouvernement de Sa Majesté ? Le Français aurait le souci de complaire à l’Anglais quand celui-ci ne penserait qu’à rester seul maître de son gouvernail.
Les relations entre Gordon Brown et Georges Bush ne relèvent plus du « special relationship » de la période blairiste, et ici et là des fritures sur la ligne intercontinentale existent. Mais, le Royaume-Uni attend sagement le nouveau locataire de la Maison Blanche pour se replacer en orbite.
Londres est membre de l’Union européenne à sa manière, à géométrie variable : point d’euro ni d'espace Schengen, idem pour les affaires de justice et d'immigration et un traité de Lisbonne ratifié en catimini qui lui autorise des dérogations.
Nicolas Sarkozy souhaiterait inviter le Royaume-Uni pour relancer l’Europe de la défense (refaire un second accord de Saint-Malo de 1998) sous fond otanien. Gordon Brown lui répond dans
Le Monde : C'est au président Sarkozy d'annoncer ce que veut la France mais j'accueillerais favorablement cette initiative.( retour dans l’OTAN)»¹
Pourquoi Nicolas Sarkozy tient-il autant au soutien britannique pour accompagner sa présidence européenne de juillet à décembre 2008 ?
Françoise Crouïgneau des
Echos note justement : « Enfin, sur l'Union européenne, Nicolas Sarkozy sait qu'il lui faut avancer à pas comptés, alors même qu'il veut élargir à la Grande-Bretagne un axe franco-allemand devenu trop limité pour entraîner l'Europe durant sa présidence de l'Union »²
Le 10 Downing Street aime assez bien les appels du pied d’une puissance continentale parce qu’il y devine une division ou une faiblesse. La démarche française n’est donc pas adroite, elle part d’un postulat faux, la dimension insuffisante de Paris/Berlin ; or le lien avec la capitale allemande est la base sine qua non de l’Union européenne. Mais, des deux côtés du Rhin, c’est exact, nous ne savons pas être ensemble. Londres ne fera rien pour cimenter cet axe, au contraire il y dénichera les failles.
La France et le Royaume-Uni peuvent tout à fait œuvrer sur des points précis (nucléaire, climat, aérospatial, universitaire…etc) sans aller au-delà au risque de s’entendre dire de Brown
: « Il n'est pas seulement un bon ami depuis des années; nous avons travaillé ensemble lorsqu'il était ministre des finances et nous partageons la même vision du monde globalisé. France et Grande-Bretagne peuvent donc travailler main dans la main avec des intérêts communs et des valeurs partagées »¹ Elégante manière de botter en touche tout en rassurant les gens persuadés que l’anglophilie sauvera la planète ! Gordon Brown en rajoute une louche supplémentaire : « L'Europe mondiale, l'Europe unie, travaillant ensemble pour des enjeux mondiaux dans la société mondiale est capable de changer fondamentalement les choses. »¹
L’appel à l’Europe unie est une gageure puisqu’elle n’existe pas ! Le drame du continent est bien dans cette incapacité, à agir par lui-même, à réfléchir sans maître et se satisfaire d’une bienveillance définie depuis les rives du Potomac et avalisée sur les bords de la Tamise. Remarquons que le politique anglais ne mentionne jamais le Président des Etats-Unis, pas davantage l’Asie ! Pense-t-on sérieusement que la modernisation des institutions internationales se fera sans leur aval ?
Le problème de Gordon Brown se limite à garder l’Angleterre anglaise dans la mondialisation. Le Premier ministre sait le mépris que les Américains ont pour le royaume depuis la Première guerre mondiale. Peu lui importe tant que son pays avance, conserve le Commonwealth, accueille tous les milliardaires du globe y compris quelques seigneurs de la guerre afghans lesquels envoient leurs progénitures à Oxford, à Cambridge. C’est aussi pour cela que la candidature de Tony Blair à la présidence de l’Union n’est l’objet que d’un soutien très mesuré, presque hostile.
Londres ne veut nullement être contraint ou arrimé à notre continent, la Reine est le pays.
Le Royaume-Uni est-il un Etat européen ? Non, c’est un Etat anglais.
Le Président de la République peut dire sincèrement à la
BBC :«Oui, j'ai l'ambition de travailler avec les Anglais, main dans la main, contre personne. Cela ne remet pas en cause la nécessité d'un axe Paris-Berlin. Cela la complète, voilà la vérité des choses […] Moi je dis: mettez-vous à l'intérieur de l'Europe, on a besoin de vous, on a besoin de votre force, on a besoin de votre potentiel, on a besoin de votre dynamisme.»C’est bien, mais c’est idéaliser une nation toujours pragmatique. En 1783, Vergennes et Shelburne pensèrent à une union étroite, Guizot parla, dans les années 1830, le premier d’« Entente cordiale » avant son officialisation en 1904 ou encore Churchill en 1940.
Pour l’heure, c’est « Pump and circonstances Marches» !³

©Jean Vinatier 2008

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Sources :

1-
http://www.lemonde.fr/europe/article/2008/03/26/gordon-brown-une-europe-mondiale-peut-changer-les-choses_1027364_3214.html#ens_id=1026862

2-
http://www.lesechos.fr/info/analyses/4705943.htm

Note :

3- de Sir Edward Elgar (1857-1934), occupe la charge de Master of the King's Music sous le Roi George V

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