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samedi 4 avril 2009

Saint-John Perse: “Le Poète.…sur la chaussée des hommes...” N°433 - 2eme année

Hitler l’appelait le « martiniquais sautillant » ! Erreur, chancelier ! Saint-John Perse (Alexis Leger, 1887-1975) a vu le jour à la Guadeloupe.
Pour sa biographie : voir la fiche sur Wikipedia :
http://fr.wikipedia.org/wiki/Mus%C3%A9e_Saint-John_Perse

Ci-dessous un poème extrait de Vents (cycle américain) fort beau sur la place du poète :

«Telle est l’instance suprême où le Poète a témoigné.
En ce point extrême de l’attente, que nul ne songe à regagner les
chambres.
Enchantement du jour de sa naissance….Le vin nouveau n’est pas plus vrai, le lin n’est pas plus frais…
« Quel est le goût d’airelle sur ma lèvre d’étranger, qui m’est chose nouvelle et m’est chose étrangère ?….
« A moins qu’il ne se hâte, en perdra trace mon poème…Et vous aviez si peu de temps pour naître à cet instant… »

(Ainsi quand l’Officiant s’avance pour les cérémonies de l’aube, guidé de marche en marche et assisté de toutes parts contre le doute – la tête glabre et les mains nues, et jusqu’à l’ongle, sans défaut – c’est un très prompt message qu’émet aux premiers feux du jour la feuille aromatique de son être)

Et le Poète aussi est avec nous, sur la chaussée des hommes de son temps.
Allant le train de notre temps, allant le train de ce grand vent.
Son occupation parmi nous : mise en clair des messages. Et la réponse en lui donnée par illumination du cœur.
Non point l’écrit, mais la chose même. Prise en son vif et dedans son tout.
Conservation non des copies, mais des originaux. Et l’écriture du poète suit le procès-verbal.
(Et ne l’ai-je pas dit ? les écritures aussi évolueront. –Lieu du propos : toutes grèves de ce monde.)
« Tu te révéleras, chiffre perdu !…Que trop d’attente n’aille énerver
« L’usage de notre ouïe ! nulle impureté souiller le seuil de la vision !… »
Et le Poète encore est avec nous, parmi les hommes de son temps de son mal….
Comme celui qui a dormi dans le lit d’une stigmatisée, et il en est tout entaché,
Comme celui qui a marché dans une libération renversée, et il en est comme souillé,
Homme infesté du songe, homme gagné par l’infection divine,
Non point de ceux qui cherchent l’ébriété solanée- belladone ou jusquiame,
De ceux qui prisent la graine ronde d’Ologhi mangée par l’homme d’Amazonie,
Yaghé, liane du pauvre, qui fait surgir l’envers des choses-ou la plante Pi-lu,
Mais attentif à sa lucidité, jaloux de son autorité, et tenant clair au vent le plein midi de sa vision :

« Le cri ! le cri perçant du dieu ! qu’il nous saisisse en pleine foule dans les chambres,
« Et par la foule propagée qu’il soit en nous répercuté jusqu’aux limites de la perception…
« Une aube peinte sur les murs, muqueuse en quête de son fruit, ne saurait nous distraire d’une telle adjuration ! »
Et le Poète encore est parmi nous…Cette heure peut-être la lumière, cette minute même, cet instant !….Et nous avons si peu de temps pour naître à cet instant !
« ….Et à cette pointe extrême de l’attente, où la promesse elle-même se fait souffle.
« Vous feriez mieux vous-même de tenir votre souffle…Et le Voyant n’aura-t-il pas sa chance ? l’Ecoutant sa réponse ?…. »
Poète encore parmi nous…Cette heure peut-être la dernière….
cette minute même !…cet instant ! »

-« Le Cri ! le cri perçant du dieu sur nous !
»¹




Jean Vinatier

©SERIATIM 2009

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Sources :

1-In Vents, III, 6, Paris, Gallimard, 1993

http://www.fondationsaintjohnperse.fr/html/loeuvre_04.htm

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