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lundi 5 juillet 2021

Afghanistan : la tentation chinoise ? N°5755 15e année

 Le retrait américain d’Afghanistan est l’objet de beaucoup d’attention, le pays restant dans une parfaite instabilité : les luttes entre les Talibans et Daech (ISKP) et entre groupes ethniques rivaux ne faiblissant pas. Apparaîtrait un nouvel acteur, la Chine à laquelle on prêterait l’intention de succéder aux Russes puis aux Américains. Toute l’évolution afghane confirme de plus en plus son aspect d’un gigantesque nid de serpents ultra venimeux. L’Afghanistan n’est pas seulement une tombe pour les envahisseurs, c’est aussi un piège.

Il est paradoxal que l’Histoire ne pénètre pas les intelligences des puissances, ces dernières obsédées par la possession territoriale et la nécessité d’entourer telle ou telle autre rivale, croient toujours dans la mystique de la force, dans la qualité technologique lesquelles ne pèsent pas toujours aussi lourdement qu’on ne le croit, de se persuader, surtout, d’être plus habile que l’autre.

L’Afghanistan et la Chine n’ont pas de frontière au sens strict, seulement un point d’entrée ou de sortie, le corridor de Wakhan conséquence de la répartition d’influence anglo-russe au XIXe siècle (Tadjikistan/Inde-Pakistan).

Quel serait l’intérêt d’une entrée chinoise dans le bourbier afghan ? Se rapprocher plus de l’Iran ? Mais Téhéran dénonce les traitements infligés par les Talibans aux chiites (assassinat du personnel consulaire iranien de Mazari Sharif en 1998). La Chine disposant d’une alliance solide avec le Pakistan, elle contourne très facilement l’Afghanistan et y opère donc vers l’Iran, l’Irak, la Syrie, l’Europe. D’ailleurs la Chine doit tenir compte de la position pakistanaise vis-à-vis de l’Afghanistan via la problématique pachtoune, peuple divisé depuis l’instauration de la ligne Durand (1893) conséquence de la seconde guerre anglo-afghane. Ces mêmes pachtounes eux-mêmes ne présentant pas d’unité : entre ceux qui s’activent pour un territoire indépendant et ceux qui sont des talibans au sein desquels ils forment une force majoritaire, vous avez un cocktail explosif où il est prudent de ne pas mettre un seul bout de pouce. Se pose aussi pour le gouvernement chinois le jeu d’un autre acteur, l’Inde qui regarde l’Afghanistan comme un hypothétique moyen de contrer le Pakistan. Un gouvernement indien de plus en plus sollicité par les États-Unis pour jouer un rôle dans l’axe indopacifique, de réduire son partenariat stratégique avec la Russie et contrarier les appétits chinois. New Delhi ne donne à aucun solliciteur une réponse claire affectant de ne mirer que le Cachemire et le Pakistan.

Il faudrait surtout poser la question du pourquoi du retrait de l’armée des États-Unis. Un retrait très relatif car resteraient sur le territoire une myriade de conseillers et ONG. Rappelons à cet égard que les Américains n’ont plié totalement bagage (sauf erreur) qu’en France (1967) et au Vietnam (1974). Il vaudrait mieux parler d’un réaménagement des forces militaires. N’oublions pas que la Maison Blanche tient à cette idée d’endiguement de la Chine, elle doit donc agir pour l’affaiblir ou la tenter d’entrer sur un champ de bataille voulu.

A travers la question afghane se pose l’équilibre des puissances en Asie centrale où sous couvert d’une approche multilatérale la Chine et les États-Unis tiennent à être les seuls à tenir le manche.

 

Jean Vinatier

Seriatim 2021

 

 

 

 

 

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