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dimanche 21 juin 2015

Ryad : l’appel à Moscou ? N°3149 9e année



Si les médias français ont veillé à réduire la portée du forum des affaires en Russie, ils ont aussi passé sous silence le nouveau contact entre les émissaires du nouveau roi saoudien et le Président Poutine. Deux années plus tôt, le prince Bandar, (depuis en disgrâce) s’était rendu à Moscou afin de circonvenir Vladimir Poutine, sans obtenir le moindre succès. Depuis la Russie n’a pas varié dans son approche de la situation géopolitique de l’Orient du Caucase au Yémen et s’est tenu à l’excellence des rapports avec l’Iran de même qu’avec la Syrie de Bachar Al-Assad. Au début du mois de juin les navires de guerre russe ont brisé le blocus mis en place par l’Arabie Saoudite au large des côtes yéménites afin de mener à bien une opération de ressortissants russes et d’autres nationalités dont celles américaines.
Le royaume saoudien engagé dans une énième conquête du Yémen et dans sa permanence de la hantise d’une résurgence de l’Iran s’est agacé de l’orientation politique américaine envers Téhéran. L’Arabie Saoudite a connu plusieurs attentats perpétrés contres des mosquées chiites dans sa partie est où se situe nombre de gisements pétrolifères. Le soutient sans désemparer des opposants à Assad est indissociable de son influence au Liban via la famille Hariri. L’Arabie Saoudite tient sa puissance de l’or noir : au début en accord avec Washington Ryad a fait orienter le cours du pétrole à la baisse afin de nuire à la Russie, depuis elle agit seule…mais plutôt contre les producteurs américains. Pourquoi dans ces conditions le royaume entamerait-il une seconde séduction de Vladimir Poutine ? La promesse d’un voyage officiel à Ryad de Poutine et puis du roi Salmane  à Moscou peut se voir certes comme une sorte de coup de théâtre mais d’abord et avant tout comme la reconnaissance du rôle de la Russie en Orient et dans la question énergétique (et aussi nucléaire) qui embrasse toute l’Eurasie. Vladimir Poutine vient de conclure un accord gazier avec la Grèce et promet de soutenir sa candidature à la banque des BRICS le 7 juillet prochain. C’est peu dire que la Russie joue sur un plateau d’échec très étendu et qu’il le peut via la Chine et l’Inde. La Russie a également resserré ses liens avec l’Egypte du Président Sissi, par conséquent sur le canal de Suez. L’espace géopolitique de l’Arabie Saoudite est donc bien moins étendu que celui de la Russie et son possible enlisement au Yémen est pensé comme une peur et ce d’autant plus que selon les écrits de Zbigniew Brzeziński, l’Arabie des Séoud disparaîtrait…
Pour Vladimir Poutine, nouer des relations avec l’Arabie Saoudite lui permettrait de devenir co-acteur des variations des cours du pétrole mais sans doute veillera-t-il à se montrer prudent. L’ire des fils de Séoud tient pour beaucoup à la nouvelle approche américaine de l’Iran, considérant que ce pays est un maillon décisif de la stabilité de l’ensemble de la Mésopotamie et de la route avec l’Afghanistan. Il suffirait que le successeur de Barack Obama revienne à l’ancienne politique pour que l’Arabie rentre dans son lit.
Pour l’heure, la Russie « isolée » selon les médias français, ces aveugles constants, s’entrouvre un nouvel espace géostratégique et géo-énergétique et qui sait, voir se réaliser le vieux rêve tsariste, l’accès constant aux mers chaudes. La Russie pourrait, aussi, être la puissance garante de l’intégrité de l’Arabie et de l’Iran  et de cette manière, sans qu’on le remarque, peser sur le monde musulman dans son entier. L’islam est depuis longtemps réfléchi à Moscou.  

Source :

Jean Vinatier
SERIATIM 2015

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