Si les médias français ont veillé
à réduire la portée du forum des affaires en Russie, ils ont aussi passé sous
silence le nouveau contact entre les émissaires du nouveau roi saoudien et le
Président Poutine. Deux années plus tôt, le prince Bandar, (depuis en disgrâce)
s’était rendu à Moscou afin de circonvenir Vladimir Poutine, sans obtenir le
moindre succès. Depuis la Russie n’a pas varié dans son approche de la
situation géopolitique de l’Orient du Caucase au Yémen et s’est tenu à l’excellence
des rapports avec l’Iran de même qu’avec la Syrie de Bachar Al-Assad. Au début
du mois de juin les navires de guerre russe ont brisé le blocus mis en place
par l’Arabie Saoudite au large des côtes yéménites afin de mener à bien une
opération de ressortissants russes et d’autres nationalités dont celles
américaines.
Le royaume saoudien engagé dans
une énième conquête du Yémen et dans sa permanence de la hantise d’une résurgence
de l’Iran s’est agacé de l’orientation politique américaine envers Téhéran. L’Arabie
Saoudite a connu plusieurs attentats perpétrés contres des mosquées chiites dans
sa partie est où se situe nombre de gisements pétrolifères. Le soutient sans désemparer
des opposants à Assad est indissociable de son influence au Liban via la
famille Hariri. L’Arabie Saoudite tient sa puissance de l’or noir : au
début en accord avec Washington Ryad a fait orienter le cours du pétrole à la
baisse afin de nuire à la Russie, depuis elle agit seule…mais plutôt contre les
producteurs américains. Pourquoi dans ces conditions le royaume entamerait-il une
seconde séduction de Vladimir Poutine ? La promesse d’un voyage officiel à
Ryad de Poutine et puis du roi Salmane à
Moscou peut se voir certes comme une sorte de coup de théâtre mais d’abord et
avant tout comme la reconnaissance du rôle de la Russie en Orient et dans la
question énergétique (et aussi nucléaire) qui embrasse toute l’Eurasie.
Vladimir Poutine vient de conclure un accord gazier avec la Grèce et promet de
soutenir sa candidature à la banque des BRICS le 7 juillet prochain. C’est peu
dire que la Russie joue sur un plateau d’échec très étendu et qu’il le peut via
la Chine et l’Inde. La Russie a également resserré ses liens avec l’Egypte du
Président Sissi, par conséquent sur le canal de Suez. L’espace géopolitique de
l’Arabie Saoudite est donc bien moins étendu que celui de la Russie et son
possible enlisement au Yémen est pensé comme une peur et ce d’autant plus que
selon les écrits de Zbigniew Brzeziński, l’Arabie des Séoud disparaîtrait…
Pour Vladimir Poutine, nouer des relations avec l’Arabie Saoudite lui
permettrait de devenir co-acteur des variations des cours du pétrole mais sans
doute veillera-t-il à se montrer prudent. L’ire des fils de Séoud tient pour
beaucoup à la nouvelle approche américaine de l’Iran, considérant que ce pays
est un maillon décisif de la stabilité de l’ensemble de la Mésopotamie et de la
route avec l’Afghanistan. Il suffirait que le successeur de Barack Obama
revienne à l’ancienne politique pour que l’Arabie rentre dans son lit.
Pour l’heure, la Russie « isolée » selon les médias français,
ces aveugles constants, s’entrouvre un nouvel espace géostratégique et géo-énergétique
et qui sait, voir se réaliser le vieux rêve tsariste, l’accès constant aux mers
chaudes. La Russie pourrait, aussi, être la puissance garante de l’intégrité de
l’Arabie et de l’Iran et de cette
manière, sans qu’on le remarque, peser sur le monde musulman dans son entier. L’islam
est depuis longtemps réfléchi à Moscou.
Source :
Jean Vinatier
SERIATIM 2015
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