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mardi 17 juin 2008

Bernard Kouchner cherche narrateur diplomate N°228 - 1ere année

La France est dans la rue ! Les routiers et les ambulanciers font des blocages et des opérations escargots pour protester contre le coût de l’essence, les syndicats divisés défilent en ordre dispersé pour protester contre la politique salariale et celle des retraites décidées par le gouvernement. Ces colères là n’atteignent ni le quai d’Orsay, ni le ministre. Selon le billet du jour de Pierre Assouline, Bernard Kouchner cherche des ambassadeurs écrivains¹ dont un pour le Laos ! Je prépare mon CV, sait-on jamais ? L’ambassade de Malte a déjà été donnée à Jean-Daniel Rondeau, directeur de la collection « Bouquins »chez Robert Laffont.
Qui n’a pas rêvé d’être diplomate et narrateur ? Les diplomates français aiment la plume et les chefs d’Etat leur gloire. Citons des écrivains passés par la représentation diplomatique comme l’abbé de Choisy, le duc de Saint-Simon, Jean-Jacques Rousseau, Chateaubriand, Stendhal (Henri Beyle), Lamartine, le comte de Gobineau, Jean Herbette², Jean Giraudoux, Gilles Martinet, Eric Rouleau, François-Régis Bastide, Jean-Christophe Rufin, des diplomates devenus auteurs tels, le prince de Talleyrand, Paul Claudel, Paul Morand, Saint-John Perse (Alexis Léger), Pierre-Jean Rémy (Jean-Pierre Angremy)…etc.
Les très riches
Recueils des instructions données aux ambassadeurs de France depuis le traité de Westphalie jusqu’à la révolution française (1648-1789) soit trente-six volumes, sont une pléiade littéraire à part entière et les correspondances diplomatiques qui en sont les pendants une autre œuvre à bien des égards remarquable. Les lettres des diplomates français avant la chute de la Bastille sont parfois de véritables romans ou des pièces de théâtre. Les ministres du Roi demandaient qu’on leur rapportât tout et les diplomates s’exécutaient en ayant recours au mode mnémonique³ pour contenter, au plus juste, toutes les curiosités de leurs maîtres. Par exemple, le marquis de Maulévrier, ambassadeur à Madrid en 1720 avait-il un talent singulier pour décrire jusque dans le plus petit détail les faits et les gestes de la Cour madrilène, les rapports conflictuels entre le Roi Philippe V et sa seconde épouse Elisabeth Farnèse. Les années passées à explorer les fonds des archives du Quai d’Orsay, m’ont appris que l’écriture était inséparable du quotidien du diplomate.
Oui, mais en 2008, quel est l’intérêt de demander à tel ou tel romancier d’entrer pour une durée déterminée dans la Carrière ? Bernard Kouchner n’innove donc absolument pas, il prend le relais historique en privilégiant, par exemple, ceux qu’il côtoya dans ses années ONG. C’est une manière de donner une légitimité à celles et ceux qui ont mené des combats au milieu des calamités d’alors. Dans le ministère des Affaires Etrangères, il y a les fonctionnaires, pour beaucoup recrutés après un concours singulièrement difficile, et puis le chef de la représentation diplomatique pour lequel l’Etat se garde le droit de désigner celui qui sera son meilleur porte-drapeau indépendamment de sa formation. Les Présidents des Etats-Unis récompensent par un titre d’ambassadeur leurs meilleurs contributeurs financiers : n’est-ce pas choquant alors que leurs diplomates sont formés à la très réputée université jésuite de Georgetown ? Non.
Un ambassadeur a-t-il un pouvoir véritable ? Si l’ambassade fonctionne administrativement sans l’ambassadeur, elle ne saurait avoir de sens sans lui. Nous sommes sur le terrain particulier des Etats et des restes de la puissance qu’avait, autrefois, l’ambassadeur représentant de facto le monarque. L’ambassadeur maintient un lien physique entre le pays où il est en poste et celui qu’il incarne. La vie internationale est ainsi faite, elle peut apparaître de prime abord comme désuète ou inadéquate, elle est ainsi et ne changera pas.
La nomination d’un écrivain n’est pas saugrenue en soi si le Chef de l’Etat le juge compétent pour l’intérêt qu’il porte à telle ou telle puissance et que celle-ci ne le récusant pas y trouve à son tour sa satisfaction
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©Jean Vinatier 2008

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Source :


1-
http://passouline.blog.lemonde.fr/

Notes :

2- Jean Herbette (1878-1960), journaliste devenu le premier ambassadeur de France en Union soviétique : 1924-1931 in Yves Denéchère, Jean Herbette, journaliste et ambassadeur, Berne-Bruxelles, Peter Lang, 2003

3-Le poète grec, Simonide de Céos (556 – 467 AVJC) passe pour l’être l’inventeur de cette méthode appelée aussi, art de mémoire. Certains le contestent en proposant Aristote ou Giordano Bruno.

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