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mercredi 11 juin 2008

Livre : Fin du prix unique = arrivée du libraire unique ? N°224 - 1ere année

Les députés vont se pencher sur l’amendement du député du Nouveau Centre, Jean Dionis du Séjour qui se propose, entre autre chose, de mettre un terme au prix unique du livre pendant vingt-quatre mois. Le député propose de limiter le prix unique du livre à une durée d’un an. Pourquoi ? L’objectif est de réduire le nombre d’invendus. Par quel moyen ? Les soldes d’ouvrages. Selon cet élu, plus de 70 millions d’ouvrages allant au pilon chaque année, les soldes constitueraient-elles la recette miraculeuse ?
Naturellement les libraires et les éditeurs ruent dans les brancards contre cet amendement qui risquerait, selon eux, de réduire le nombre de librairies, d’avantager les grandes surfaces et autres chaînes telle la FNAC. La loi Lang de 1981 devient leur porte-drapeau de la contestation.
Aujourd’hui, les achats de livres se font de plus en plus sur Internet. Amazone connaît un succès grandissant. Les grandes surfaces se mettent également à vendre en ligne. Les sites comme Abebook et Chapitre.com ont des catalogues fort riches qui s’appuient sur les fonds des libraires du monde entier. Les magasins FNAC proposent moins de livres en rayons alors que leur site est incroyablement plus riche. La démarche du lecteur ne serait-elle pas de regarder sur les rayons avant de passer commande depuis son domicile ?
L’ensemble de la librairie et de l’édition sont placés devant un dilemme : être à la fois une vitrine et investir pour être très dynamique sur la toile via des sites marchands comme ceux précités.
Le problème se pose autant pour les livres neufs que pour les livres d’occasion. Les librairies d’ouvrages anciens, elles, souffrent d’une autre concurrence : la vente aux enchères en ligne (Ebay). Des établissements aussi connus à Paris comme Picard ne savent pas comment lutter contre ce nouveau concurrent qui fait de l’acheteur ou du vendeur d’un livre ancien un acteur dynamique. D’une certaine façon le client ne fixe-t-il pas le prix du livre ?
Que l’on maintienne ou non le prix unique du livre ne changera pas grand-chose au faible développement du chiffre d’affaire des éditeurs, des libraires. Selon le SNL (Syndicat national de l’édition) en 2006 prés de 420 millions d’ouvrages ont été imprimés. Le nombre d’invendus tourneraient à 100 millions dont 30%, selon Dionis du Séjour, seraient remis en circulation. Les 70% restants seraient détruits.
Le problème ne se situe pas tellement au niveau de ces millions d’ouvrages envoyés au pilon. Il est plutôt dans le nouveau rapport entre le lecteur (consommateur) et le tandem libraire/éditeur. Comment attirer et fidéliser une clientèle ? Bien des libraires déploient des activités de plus en plus grandes pour faire revenir le lecteur. Certains ont tenté de créer des librairies-salon de thé ou de dégustation de vin ? Mais le succès n’est pas au rendez-vous. Comment rendre attractive une librairie qui ne propose qu’un seul service ? La FNAC tire, un peu, son épingle du jeu parce qu’elle est un centre commercial à produits multiples (téléphonie, ordinateur, télévision…etc).
Les éditeurs se plaignent, à juste titre, de la sous-représentation de leurs publications dans les grandes enseignes : le libraire constitue la seule opportunité de porter à la curiosité du public les auteurs. Une visite du Salon du Livre laisse pantois devant le nombre de maisons que l’on ne voit jamais ou épisodiquement sur les rayons, par exemple, de la FNAC ou de Virgin. Le libraire s’il ne peut concurrencer comme généraliste ces grandes chaînes devrait, alors, se spécialiser.
La distribution et la diffusion étant concentrée entre quelques acteurs, les chaînes comme la FNAC jouissent d’un avantage certain. Cette concentration nuit naturellement à la diversité du choix. Comment un lecteur pourra-t-il, en allant, sur la toile mesurer l’étendue des choix ? Le danger est bien de laisser à quelques-uns l’immense pouvoir d’imposer aux lecteurs une sélection d’ouvrages et d’auteurs. Adieu la pluralité, bonjour l’uniformité !
L’amendement Dionis du Séjour, apparemment, ne s’intéresse pas du tout à la concurrence. Il croit que les soldes donneront le coup de fouet indispensable pour maintenir en circulation et à des prix attractifs un plus grand nombre d’ouvrages. Le hic est l’immense déséquilibre entre le libraire et une maison d’édition moyenne ou petite et une maison d’édition relevant d’un groupe international (p.e :Planeta) liée d’une façon ou d’une autre au distributeur et donc à la grande surface.
Les libraires et les éditeurs, à moins de disparaître davantage chaque année, n’ont plus comme solution que de développer leur propre réseau. Mais que pèsera ce réseau si l’accès à la publicité dans les médias est hors de leur bourse, si ce réseau ne peut développer un puissant positionnement de ces marques sur le Net ? Or, le développement de synergies entre le commerce physique et le commerce en ligne est coûteux.
L’amendement Dionis du Séjour ne s’attaque donc qu’à la face émergée de l’iceberg : peut-être est-ce voulu ?

©Jean Vinatier 2008

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Sources
:

SNL :
http://www.sne.fr/
La Tribune/forum : Distribution de livres : faut-il aménager la loi Lang ?
www.latribune.fr

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