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vendredi 12 décembre 2008

Sarko/UE : six mois de « moi et moi » N°362 - 2eme année

Au terme de la présidence française du conseil de l’Union européenne, l’heure, non pas du bilan, mais des impressions est arrivée. Les médias européens ainsi que les chefs de gouvernement et les ministres des Etats de l’Union ont rapporté ici et là des opinions positives et négatives.
Jusqu’à ce jour, jamais une présidence du conseil n’avait été entre les mains d’un homme aussi déterminé à participer à tous les événements qui se produiraient. La chance a souri à Nicolas Sarkozy. Des crises russo-géorgienne à celles de la finance internationale et de l’économie sans oublier une ultime passe d’arme avec la Chine par Sa Sainteté interposée, ont nourri l’appétit sarkozien pour apparaître tel le manitou et l’intermédiaire exclusif parmi les grands du monde.

Pour l’heure chacun est encore saisi par le remue-ménage du Président français qui a forcé la lourde machine européenne à se mouvoir sur la scène internationale et à prendre des positions politiques. Enfin, l’Europe a existé donc Barroso a donc peu dormi !
Nicolas Sarkozy a appliqué à l’Union européenne sa façon de manipuler les hommes, à s’interposer entre chacun d’entre eux, à se rendre incontournable pour tout et rien. Sur ce point, bien des Etats membres sont heureux de voir cette période se terminer. Qu’ils ne s’endorment pas trop profondément, il reviendra à la charge à la première occasion, et, nul doute que son successeur Tchèque, Vaclav Klaus, ne lui donnera pas un motif d’excitation.
Les médias français se chargent déjà de répandre parmi le bon peuple la liste des incroyables succès de Nicolas Sarkozy. L’accord européen sur le climat et l’assurance d’un nouveau référendum en Irlande avant la fin de 2009 sont deux cerises sur la pièce montée française. En fait, Sarkozy ne supportant pas qu’une idée ou un objectif ne soit pas atteint déploie des trésors d’ingéniosité soit pour y parvenir, soit pour donner l’illusion. On me dira, mais n’est-ce pas l’important : s’agiter tel un cabri et sauter sans arrêt ? Il faut bien distinguer la forme du fond. La forme, c’est la communication à outrance, en flux continu ; le fond, c’est la conséquence à terme des différentes actions menées pendant ces six mois.
Dans ses relations avec les Etats-Unis et Israël, il a été d’une grande fidélité. Il a fait pression sur l’Union pour qu’elle affaiblisse ses critiques négatives tant sur la politique de Georges Bush que sur sa réserve sur l’entrée d’Israël, à moyen terme, dans l’Union européenne et dans l’OTAN avec, bien évidemment, un statut taillé sur mesure.
Avec la Russie, il a su, parce qu’il adore être un intermédiaire, se placer entre Moscou et Tbilissi et apparaître en pacificateur. C’est réussi. Du coup l’Union européenne se trouve à la fois replacée sur orbite américaine et obligée d’accepter un partenariat avec Moscou. Est-ce un bienfait ou pas ? Notons simplement que Poutine souligne les signes positifs envoyés par la future administration Obama. L’Union européenne serait-elle, enfin, un partenaire géostratégique acceptable par ces deux puissances ? Pas sûr !
Les rapports sino-européens constituent un point particulier que l’affaire de la rencontre avec le Dalaï-Lama illustre bien. La Chine répugne à accepter l’Union des 27 Etats comme une puissance à part entière. Elle craint son dynamisme économique et particulièrement celui de l’Allemagne. Le parti communiste chinois a donné son coup d’éventail à Sarkozy pensant provoquer une division entre les Européens : officiellement l’unité a prévalu. Pourquoi ? Parce que la question des barrières douanières est en jeu ! Evidemment pour le Président de la République vis à vis des Français, c’est l’occasion d’apparaître tel un David victorieux de Goliath. Pour les Européens, sans doute étonnés de résister, c’est une légère prise de conscience d’action solidaire !
Et l’Europe en tant que telle ? L’action de « l’omni-président » a-t-elle été audacieuse ? Sarkozy a confirmé sa politique en se rapprochant davantage du Royaume-Uni de Gordon Brown que de l’Allemagne de la chancelière, Angela Merkel. L’entente cordiale entre Londres et Paris laisse le continent européen perplexe. Le couple franco-allemand était devenu une règle non-écrite de la diplomatie. Il apparaissait comme un centre névralgique. Si l’Allemagne se retrouve éloignée de la France, Paris est-il pour autant lié à Londres ? En tout cas, le Royaume-Uni ne peut que se frotter les mains de voir le continent européen sans duo et accepte, semble-t-il pour une durée déterminée, la fascination de Nicolas Sarkozy pour la City et Wall Street. La conséquence est de laisser Berlin fourbir ses armes plus décomplexé que jamais. Le nouveau ministre français des affaires européennes, Bruno Lemaire, ne devant pas sa nomination à sa connaissance de la langue de Goethe mais à son ancienne proximité avec Dominique de Villepin, le gouvernement allemand s’en gaussera.
Le plan de relance économique de 200 milliards de l’Union est manifestement insuffisant. Mais de cela Paris s’en moque, l’essentiel est d’avoir fait entériner un plan ce qui veut dire, Sarko gagnant !
En fait les critiques que l’on adresse à Nicolas Sarkozy dans sa politique intérieure se retrouvent dans sa manière de mener une politique étrangère, un feu d’artifice permanent qui peut avoir des conséquences positives et d’autres pas. Un homme classique trouverait matière à réfléchir, Sarkozy nullement. Il jette aux orties toute pensée au profit de l’immédiat. Il ne sème pas, il installe les décors et les fait tourner.
La communication sur son « Moi » primant sur tout le reste, il laisse derrière lui plus d’amertume que de reconnaissance. L’Union européenne a, sans doute, gagné temporairement en poids mais sans privilégier la vision, la projection. Certes Sarkozy a évoqué le rapprochement sino-européen, une Europe de la défense, un gouvernement économique commun de la zone euro comme il a bâti à la va-vite l’Union pour la Méditerranée, dans le moment, pour faire bien, l’intendance devant suivre. Son « et moi et moi » a en écho le « et nous et nous des 500 millions d’Européens » !



Jean Vinatier

©SERIATIM 2008

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