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jeudi 23 octobre 2008

Jean Tardieu : Le témoin invisible (1943) N°317 - 2eme année

Voilà un grand homme! Jean Tardieu (1903-1995) qui a presque traversé tout le siècle. Poète, éditeur, auteur de pièces de théâtre (La cité sans sommeil), ami avec celles et ceux qui faisaient les belles lettres : Max Ernst Martin du Gard, Ponge, Queneau, Follain, Jaccottet, Char, Félicien Marceau, Schiffrin père… . Et, excuser du peu, Jean Paulhan le fait publier dés 1927 !
Jean Tardieu aimait apporter sa touche de saugrenu, un humour. Il le fit dans ses poèmes narquois ainsi dans
" Môme néant" :
« Quoi qu’a dit ?
–A dit rin
Quoi qu’a fait ?
-A fait rin,…etc »
Cette façon familière de conter masquait, naturellement, une certaine angoisse qu’il connut dés 17 ans, âge de sa crise « névrotique ». Le poète contemporain, Christian Cottet-Emard interviewant Jean Tardieu en 1991 s’attirait cette réponse fort instructive à propos de la poésie :
« un retour à des origines ou la possibilité de reconstituer, forcément à l'aide d'artifices, des origines tribales en retrouvant les paroles et les gestes qui correspondaient à un besoin d'explication du monde que tout être humain a dû connaître dès l'âge le plus préhistorique. La poésie, alors, n'était pas loin de la magie, de la sorcellerie ou même de la religion, bref, de tout ce qui échappe à une définition scientifique. »¹
Le poème proposé ci-dessous est tiré de ceux écrits pendant la guerre, alors qu’il collabore aux publications clandestines de la Résistance, le définit assez bien comme pourrait le suggérer sa biographe belge, Emilie Noulet en 1964 : « Silence plein, sens étouffé, ce sont peut-être les deux pôles de l’œuvre de Jean Tardieu. »²
En 2003, à l’occasion du centenaire de sa naissance, Gallimard a publié l’ensemble de son œuvre : lisez-la !

« Le Temoin invisible

Les yeux bandés les mains tremblantes
trompé par le bruit de mes pas
qui porte partout mon silence
perdant la trace de mes jours
si je m’attends ou me dépasse
toujours je me retrouve là
comme la pierre sous le ciel.

Par la nuit et par le soleil
Condamné sans preuve et sans tort
Aux murs de mon étroit espace
Je tourne au fond de mon sommeil
Désolé comme l’espérance
Innocent comme le remords

Un homme qui feint de vieillir
Emprisonné dans son enfance,
L’avenir brille au même point,
Nous nous en souvenons encore,
Le sol tremble à la même place,

Le temps monte comme la mer. »

in Jean Tardieu Le Fleuve caché,: Poésies 1938-1961. Accents. Le Témoin invisible. Jours pétrifiés. Monsieur, Monsieur. Une Voix sans personne. Histoires obscures, Préf G.E Clancier, Paris Gallimard, 1968

Jean Vinatier

©SERIATIM 2008

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Sources:

1-
http://www.orage-lagune-express.com/jt.htm

2- Jean Tardieu, coll. Poètes d’aujourd’hui, Paris, Seghers, 1964.

Association Jean Tardieu
http://www.amis-auteurs-nicaise.gallimard.fr/html/autgall/02505.htm

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