En cinq jours, que d’informations : les établissements du refinancement hypothécaire, Fannie Mae et Freddie Mac « nationalisés » par l’état fédéral, la faillite de Lehman Brothers et celle évitée in extremis de Merill Lynch, l’appel au secours de l’assureur numéro 1 américain, American International Group (AIG), dix banques se liguent pour se doter d’une caisse de secours de 70 milliards de dollars! Pas étonnant que les bourses accusent le coup! La panique commence-t-elle?Les autorités monétaires américaines envoient-elles des signaux très clairs à toute la planète?
Partant du principe que Fannie Mae et Freddie Mac ont lancé la titrisation, le secrétaire d’état au Trésor, Henry Paulson, a pris sous son aile les 5 200 milliards de dollars d’actifs ce qui porte du coup la dette américaine de 10 000 à 15 000 milliards. Il garantit tous les titres adossés aux fameux crédits hypothécaires (Mortage Backed Securities) et pour soutenir les banques en possession desdits titres, il leur assure une ligne de crédit sécurisée quasi illimitée (Secured Credit Lending Facility). Le Trésor américain s’engage, aussi, à acheter les MBS de Fannie Mae et Freddie Mac émis par eux ainsi que ceux achetés aux banques d’affaires privées et aux Federal Home Loan Banks. In fine, l’état fédéral promet d’injecter jusqu’à 200 milliards dans les deux établissements susnommés.
Quelle est la conséquence à court terme? Tous ces titres surévalués - avant d’être dépréciés? - figureront dans les colonnes des actifs des bilans des banques mondiales ce qui écarterait l’effet domino. Le sauvetage de Merill Lynch par Bank of America (50 milliards de $) montre que le bord du précipice est tout proche. Lehman Brothers est, pour le moment, sacrifiée. Selon la Barclays qui était sur les rangs, le Trésor américain n’a pas accepté de garantir cet établissement à hauteur de 300 milliards de $ alors que le montant de ses encours se situe à plus de 600 milliards sans inclure les dizaines de milliers de comptes de dépôts des clients!
On le comprend l’état américain juge plus urgent de rassurer les banquiers et les banques centrales que de secourir les millions d’Américains sans toits. Il se garde bien de déclencher des poursuites judiciaires contre les dirigeants de Fannie Mae et Freddie Mac! Rappelons que ces banques sont victimes de leur cupidité et les ménages victimes de leurs discours.
Cependant, la crise des « subprimes » dure depuis 2007, elle ne semble pas finir : est-elle un serpent de mer? Les banques, les assureurs, les réassureurs qui se sont gavés d’opérations de titrisation ne savent toujours pas l’exacte étendue de leurs propres pertes. C’est incroyable mais c’est ainsi! Notons aussi que les Américains n’ont eu de cesse d’imposer des règles de transparence et des normes comptables nouvelles : résultat, une opacité exemplaire!
Nous sommes dans un climat étrange fait de doutes, d’interrogations. On rappelle ici et là le spectre de 1929 : les crises, bancaire, financière, immobilière (Etats-Unis, Royaume-Uni, Espagne) annonceraient-elles une récession économique mondiale? Le pouvoir d’achat stagne ou baisse dans de nombreux pays, le chômage menace de remonter, l’inflation donne des sueurs froides à Jean-Claude Trichet. Les chantres du libéralisme à tout crin ne maudissent pas les « nationalisations » américaines ce qui prouve, tout de même, qu’en fin de parcours l’Etat est l’ultime forteresse où personne, visiblement, rechigne à entrer. Pas étonnant que des lecteurs réagissent « privatisation des profits, étatisation des pertes » ou comme :
« GEDEON64 15.09.2008 - 14h13
Les américains nationalisent leur banque, les russes privatisent les ressources naturelles, c'est le nouveau monde. L'immobilier se casse la gueule, il n’y a que l’industrie de l’armement qui rigole, là c’est pas trop compliqué à créer de la demande. Il suffit de foutre le bordel, d’envahir, d’occuper des états et de créer un ennemi, le fameux terroriste . »¹
Si une crise systémique est possible, la comparaison avec 1929 est plus singulière. En 2008, la croissance des pays émergents soutient toute la croissance mondiale. Nous avons une croissance rapide de la liquidité mondiale et des taux d’intérêt très bas aux Etats-Unis : l’exact inverse de 1929 !
Mais l’important, à notre époque est l’impact psychologique d’un fait historique. Les gens établissement un parallèle et cela suffit à en faire une réalité. Ne sommes-nous pas devant quelque chose de plus vaste ?
« Nous vivons, écrit finement Philippe Grasset dans DeDefensa.org, une tragédie financière et pourtant rien ne se passe comme au cœur d’une tragédie. Notre esprit est tellement cloisonné, la représentation des communications si puissante, qu’on ne parvient pas à réaliser l’ampleur de la crise, ni à relier les crises entre elles d’ailleurs. (Car tout est lié, entre la crise financière, les crises de gestion et bureaucratiques comme celle du Pentagone, les crises géopolitiques comme la Géorgie, etc.)
[….]
La situation est pire qu’en 1929 parce que, dans notre perception, il semble ne s’être encore rien passé de considérable et de dramatique au niveau des événements socio-économiques et politiques, après les événements financiers qui sont eux-mêmes cloisonnés dans nos esprits et perçus comme une crise à part dont nous nous sentons étrangement étrangers, et comme immunisés contre ses effets […]
La population est à la fois polarisée et extrêmement fragmentée, par une communication automatique qui semble la dispenser de ses élans collectifs traditionnels mais qui lui permet tout de même d’avoir un meilleur accès à l’information. Jusqu’ici, le système a tenu parce que l’information hostile à son encontre et l’effacement de la confiance n’ont pas encore rassemblé leurs effets ni engendré un choc psychologique suffisant pour déclencher, sinon une révolte ou une riposte, au moins une prise de conscience collective. Il nous semble pourtant que cette prise de conscience est inéluctable si l’on accepte l’idée, ce qui est notre cas, que les chocs de décomposition du système vont se poursuivre parce que le système est irréparable et irréformable. Elle sera d’autant plus forte dans ses effets qu’elle a été retardée, et que le système s’est décomposé à mesure. Par contre, il nous paraît bien difficile de prévoir dans quel domaine et de quelle façon s’exerceront ces effets. Malgré le bruit imposant de la chute de Lehman Brothers, notre situation est celle d’un 1929 en train de se faire et dont nous n'entendons rien et dont nous ignorons tout de l’explosion en cours. Cela n'empêche pas ce 1929 de se faire. »²
C’est le nouveau monde !
Jean Vinatier
©SERIATIM 2008
Commentaires : Si vous n’avez pas de compte Gmail, et pour éviter le noreply-comment veuillez envoyer vos commentaires à : jv3@free.fr
Sources:
1-
http://www.20minutes.fr/article/253098/Economie-La-crise-semble-avoir-atteint-une-ampleur-sans-precedent.php
2-http://www.dedefensa.org/article-un_lundi_vert_de_gris_15_09_2008.html
In Seriatim:
http://seriatim1.blogspot.com/2008/01/fonds-souverains-le-monde-atlantique-t.html
http://seriatim1.blogspot.com/2008/01/vers-une-monnaie-mondiale.html
http://seriatim1.blogspot.com/2008/01/rcession-ou-pas-un-nouveau-monde.html
http://seriatim1.blogspot.com/2008/03/fed-et-banques-centrales-pompiers-en.html
http://seriatim1.blogspot.com/2008/03/le-fmi-un-vieux-fonds.html
Partant du principe que Fannie Mae et Freddie Mac ont lancé la titrisation, le secrétaire d’état au Trésor, Henry Paulson, a pris sous son aile les 5 200 milliards de dollars d’actifs ce qui porte du coup la dette américaine de 10 000 à 15 000 milliards. Il garantit tous les titres adossés aux fameux crédits hypothécaires (Mortage Backed Securities) et pour soutenir les banques en possession desdits titres, il leur assure une ligne de crédit sécurisée quasi illimitée (Secured Credit Lending Facility). Le Trésor américain s’engage, aussi, à acheter les MBS de Fannie Mae et Freddie Mac émis par eux ainsi que ceux achetés aux banques d’affaires privées et aux Federal Home Loan Banks. In fine, l’état fédéral promet d’injecter jusqu’à 200 milliards dans les deux établissements susnommés.
Quelle est la conséquence à court terme? Tous ces titres surévalués - avant d’être dépréciés? - figureront dans les colonnes des actifs des bilans des banques mondiales ce qui écarterait l’effet domino. Le sauvetage de Merill Lynch par Bank of America (50 milliards de $) montre que le bord du précipice est tout proche. Lehman Brothers est, pour le moment, sacrifiée. Selon la Barclays qui était sur les rangs, le Trésor américain n’a pas accepté de garantir cet établissement à hauteur de 300 milliards de $ alors que le montant de ses encours se situe à plus de 600 milliards sans inclure les dizaines de milliers de comptes de dépôts des clients!
On le comprend l’état américain juge plus urgent de rassurer les banquiers et les banques centrales que de secourir les millions d’Américains sans toits. Il se garde bien de déclencher des poursuites judiciaires contre les dirigeants de Fannie Mae et Freddie Mac! Rappelons que ces banques sont victimes de leur cupidité et les ménages victimes de leurs discours.
Cependant, la crise des « subprimes » dure depuis 2007, elle ne semble pas finir : est-elle un serpent de mer? Les banques, les assureurs, les réassureurs qui se sont gavés d’opérations de titrisation ne savent toujours pas l’exacte étendue de leurs propres pertes. C’est incroyable mais c’est ainsi! Notons aussi que les Américains n’ont eu de cesse d’imposer des règles de transparence et des normes comptables nouvelles : résultat, une opacité exemplaire!
Nous sommes dans un climat étrange fait de doutes, d’interrogations. On rappelle ici et là le spectre de 1929 : les crises, bancaire, financière, immobilière (Etats-Unis, Royaume-Uni, Espagne) annonceraient-elles une récession économique mondiale? Le pouvoir d’achat stagne ou baisse dans de nombreux pays, le chômage menace de remonter, l’inflation donne des sueurs froides à Jean-Claude Trichet. Les chantres du libéralisme à tout crin ne maudissent pas les « nationalisations » américaines ce qui prouve, tout de même, qu’en fin de parcours l’Etat est l’ultime forteresse où personne, visiblement, rechigne à entrer. Pas étonnant que des lecteurs réagissent « privatisation des profits, étatisation des pertes » ou comme :
« GEDEON64 15.09.2008 - 14h13
Les américains nationalisent leur banque, les russes privatisent les ressources naturelles, c'est le nouveau monde. L'immobilier se casse la gueule, il n’y a que l’industrie de l’armement qui rigole, là c’est pas trop compliqué à créer de la demande. Il suffit de foutre le bordel, d’envahir, d’occuper des états et de créer un ennemi, le fameux terroriste . »¹
Si une crise systémique est possible, la comparaison avec 1929 est plus singulière. En 2008, la croissance des pays émergents soutient toute la croissance mondiale. Nous avons une croissance rapide de la liquidité mondiale et des taux d’intérêt très bas aux Etats-Unis : l’exact inverse de 1929 !
Mais l’important, à notre époque est l’impact psychologique d’un fait historique. Les gens établissement un parallèle et cela suffit à en faire une réalité. Ne sommes-nous pas devant quelque chose de plus vaste ?
« Nous vivons, écrit finement Philippe Grasset dans DeDefensa.org, une tragédie financière et pourtant rien ne se passe comme au cœur d’une tragédie. Notre esprit est tellement cloisonné, la représentation des communications si puissante, qu’on ne parvient pas à réaliser l’ampleur de la crise, ni à relier les crises entre elles d’ailleurs. (Car tout est lié, entre la crise financière, les crises de gestion et bureaucratiques comme celle du Pentagone, les crises géopolitiques comme la Géorgie, etc.)
[….]
La situation est pire qu’en 1929 parce que, dans notre perception, il semble ne s’être encore rien passé de considérable et de dramatique au niveau des événements socio-économiques et politiques, après les événements financiers qui sont eux-mêmes cloisonnés dans nos esprits et perçus comme une crise à part dont nous nous sentons étrangement étrangers, et comme immunisés contre ses effets […]
La population est à la fois polarisée et extrêmement fragmentée, par une communication automatique qui semble la dispenser de ses élans collectifs traditionnels mais qui lui permet tout de même d’avoir un meilleur accès à l’information. Jusqu’ici, le système a tenu parce que l’information hostile à son encontre et l’effacement de la confiance n’ont pas encore rassemblé leurs effets ni engendré un choc psychologique suffisant pour déclencher, sinon une révolte ou une riposte, au moins une prise de conscience collective. Il nous semble pourtant que cette prise de conscience est inéluctable si l’on accepte l’idée, ce qui est notre cas, que les chocs de décomposition du système vont se poursuivre parce que le système est irréparable et irréformable. Elle sera d’autant plus forte dans ses effets qu’elle a été retardée, et que le système s’est décomposé à mesure. Par contre, il nous paraît bien difficile de prévoir dans quel domaine et de quelle façon s’exerceront ces effets. Malgré le bruit imposant de la chute de Lehman Brothers, notre situation est celle d’un 1929 en train de se faire et dont nous n'entendons rien et dont nous ignorons tout de l’explosion en cours. Cela n'empêche pas ce 1929 de se faire. »²
C’est le nouveau monde !
Jean Vinatier
©SERIATIM 2008
Commentaires : Si vous n’avez pas de compte Gmail, et pour éviter le noreply-comment veuillez envoyer vos commentaires à : jv3@free.fr
Sources:
1-
http://www.20minutes.fr/article/253098/Economie-La-crise-semble-avoir-atteint-une-ampleur-sans-precedent.php
2-http://www.dedefensa.org/article-un_lundi_vert_de_gris_15_09_2008.html
In Seriatim:
http://seriatim1.blogspot.com/2008/01/fonds-souverains-le-monde-atlantique-t.html
http://seriatim1.blogspot.com/2008/01/vers-une-monnaie-mondiale.html
http://seriatim1.blogspot.com/2008/01/rcession-ou-pas-un-nouveau-monde.html
http://seriatim1.blogspot.com/2008/03/fed-et-banques-centrales-pompiers-en.html
http://seriatim1.blogspot.com/2008/03/le-fmi-un-vieux-fonds.html
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